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Re: historiographie arthurienne

MessagePosté: Jeu 07 Jan, 2010 11:05
de DT

Re: historiographie arthurienne

MessagePosté: Jeu 07 Jan, 2010 20:27
de Muskull
Yep !
Je crois que l'on est hors sujet par ma faute et que André-Yves grogne en sa caverne hivernale tapissée de livres.
Le mieux est je crois *petits pas prudents* en orée, de revenir au sujet proposé sur lequel mes connaissances sont infimes. :(
Ceci explique cela...

Re: historiographie arthurienne

MessagePosté: Jeu 07 Jan, 2010 21:05
de Séléné.C
Alexandre a écrit:
Muskull a écrit:Ce qui serait intéressant de savoir c'est pourquoi l'image du 'roi parfait' s'est retrouvé un jour nommé Arthur ou Artus.

Il n'y a peut-être pas de réponse à cette question : Un personnage historique peut avoir illustré certains traits d'un archétype et s'être vu attribuer le reste de la figure mythologique. Il s'appelait "l'ours" - ça tombait bien, c'est tout.

Il peut aussi s'être trouvé un poète pour lui attribuer ce surnom qui, avec le temps, aie effacé son nom, à moins même qu'il n'aie été construit sur base de légendes relatives à plusieurs rois différents...



Et puisque Muskull propose de revenir au sujet initial :
André-Yves Bourgès a écrit:Bonjour à tous et bonne année !

le succès du fil de discussion "Implantations bretonnes en Gaule et survie de la langue bretonne" m'encourage à (ré)ouvrir ici la question de "l'historiographie arthurienne" : sur un précédent fil dont les débordements ont conduit à son verrouillage, j'avais évoqué la question dans les termes suivants qui me paraissent toujours d'actualité :

Nul imposteur médiéval n'a prétendu, semble-t-il, être le roi Arthur, ce qui incline à relativiser la portée du messianisme arthurien. Ce constat rappelé par G. Lecuppre (lui même spécialiste de l'imposture politique médiévale) dans son CR de l'ouvrage d'A. Chauou sur L'idéologie Plantagenêt, a donné l'occasion à Virginie Greene de développer l'hypothèse suivante dans les Cahiers de civilisation médiévale, vol. 45 (2002), p. 321-340 :

"Il a été souvent affirmé qu'une croyance au retour du roi Arthur était largement répandue chez les Bretons insulaires et continentaux des XIIe-XIIIe s. Or les sources médiévales citées à l'appui paraissent plutôt répéter un stéréotype que témoigner d'un fait objectif. L'examen d'autres sources littéraires et historiques (littérature médiévale galloise, travaux d'historiens sur le Pays de Galles et la Bretagne, travaux sur les mouvements messianiques), n'apporte aucune confirmation qu'une telle croyance ait vraiment été significative hors du champ de la fiction arthurienne. Qui croit au retour d'Arthur ? Toujours les autres".

S'inscrit dans ce champ de la fiction arthurienne la pseudo-correspondance entre Arthur et le roi Henri II, rapportée sur le mode comico-épique par Etienne de Rouen dans le Draco Normannicus.


Vos avis et commentaires sont les bienvenus.

Afin de lever toute ambigüité, je précise que l'approche retenue ici ne porte pas sur l'existence pour le moins douteuse d'un Arthur historique, mais bien sur le personnage légendaire qui tient à partir du Moyen Âge central, la place importante rappelée par M. Aurell dans son beau livre sur La légende du roi Arthur.

Bien cordialement.


Est-il vraiment utile que quelqu'un vienne se prétendre être celui qu'on attend pour qu'il y aie attente ?
L'espoir est toujours porteur... Et d'autant plus qu'il reste un espoir (et non une réalité qui pourra toujours se révéler décevante)

Re: historiographie arthurienne

MessagePosté: Jeu 07 Jan, 2010 21:13
de André-Yves Bourgès
Muskull a écrit:Yep !
Je crois que l'on est hors sujet par ma faute et que André-Yves grogne en sa caverne hivernale tapissée de livres.


Comment as-tu deviné ? :D

AYB

Re: historiographie arthurienne

MessagePosté: Jeu 07 Jan, 2010 23:48
de DT
Salut à tous,
Historiographie = dessin de l'histoire,
Historiographie-graphie = redessin du dessin de l'histoire :wink:
A+

Re: historiographie arthurienne

MessagePosté: Ven 08 Jan, 2010 1:27
de Taliesin
Bonsoir,

Pour revenir au messianisme arthurien, je crois qu'il serait intéressant d'élargir le débat au messianisme britonnique, c'est-à-dire au thème de la littérature prophétique - genre particulièrement ancien et fécond dans la culture britonnique - qui voit un ou plusieurs héros désignés comme les sauveurs qui permettront aux Bretons de recouvrer leur île et leur grandeur passée aux dépens des Saxons maudits. Le texte le plus important traitant de ce thème est bien sûr l'Armes Prydein Vawr (la grande Phophétie de Bretagne), composé vers 930. Les sauveurs sont Conan et Cadwaladr, "ces deux ours pour lesquels le combat quotidien n'est pas une honte" (trad. L. Fleuriot, Récits et poèmes celtiques)

Mais il est tard, j'y reviendrais demain si le temps me le permet. Je voulais juste remettre un peu le sujet sur les rails...

Re: historiographie arthurienne

MessagePosté: Ven 08 Jan, 2010 21:36
de André-Yves Bourgès
Taliesin a écrit:Bonsoir,

Pour revenir au messianisme arthurien, je crois qu'il serait intéressant d'élargir le débat au messianisme britonnique, c'est-à-dire au thème de la littérature prophétique - genre particulièrement ancien et fécond dans la culture britonnique - qui voit un ou plusieurs héros désignés comme les sauveurs qui permettront aux Bretons de recouvrer leur île et leur grandeur passée aux dépens des Saxons maudits.


Elargissement intéressant et bienvenu.

Le texte le plus important traitant de ce thème est bien sûr l'Armes Prydein Vawr (la grande Phophétie de Bretagne), composé vers 930. Les sauveurs sont Conan et Cadwaladr, "ces deux ours pour lesquels le combat quotidien n'est pas une honte" (trad. L. Fleuriot, Récits et poèmes celtiques)


deu arth nys guna guarth kyfarth beunyd ("deux ours qui n'ont pas de honte à aboyer tous les jours") : voir ici la page correspondante du manuscrit (le texte concerné est aux lignes 2 et 3).

Ces "ours" là m'avaient échappé : voilà peut-être un écho de la tradition arthurienne. Et n'oublions pas non plus Armel !

Mais il est tard, j'y reviendrais demain si le temps me le permet. Je voulais juste remettre un peu le sujet sur les rails...


Merci.

Re: historiographie arthurienne

MessagePosté: Sam 09 Jan, 2010 5:01
de jakes
Bonjour à tous, une bonne nouvelle année,

Content de ce fil A Y Bourgès et de t’y retrouver Taliesien.

Comment pourrait-on dater cet Arthur « messianique » ? Le mot est il bien choisi ?

En fait, je ne suis pas sur que G de Monmouth a vraiment relayer la fable cornouaillaise, rapportée par H de Malmesbury au sujet du retour posthume (et messianique ?? !) d’Arthur :


A la lecture de l’ HRB :
-Il y a la prophétie de Merlin §115 (20) « Cadvalladr appellera Conan et contractera une alliance avec l’Albanie. Les étrangers seront alors massacrés, le cours des fleuves…. » C’est une reprise de l’Armes Prydein. Geoffroy de Monmouth a certainement pensé à Conan Mériadec dont il écrit l’histoire quelques chapitres auparavant.

Mais au Chapitre 205 : « Au bout de quelques temps, alors que le peuple breton avait repris des forces, Cadvalladr se souvint de son royaume, désormais débarrassé de la peste et il demanda l’appui d’Alan pour recouvrer sa dignité passée. Mais alors qu’il avait obtenu le soutien du roi et qu’il préparait sa flotte, une voix venue du ciel lui intima l’ordre de renoncer à ses projets. Dieu refusait, en effet que le peuple breton dominât plus longtemps l’île de Bretagne, avant le temps prédit par Merlin à Arthur. »

Il n’y a pas de divergence entre Geoffroy et l’Armes Prydein de 930 qui place les espoirs des Bretons dans le retour de Cynan et Cadwaladr. »
Aucune ambigüité dans l’HRB d’un bout à l’autre : Merlin prédit bien le retour (post mortem) de Cadwaladr. Et non d’Arthur !




Il est tout à fait remarquable qu’Arthur est encore oublié à la fin du texte (fidèle à l’HRB, on dit plutôt à Wace ?) en moyen anglais de Lawamon ( après 1190):
« Ainsi parla Cadwalader - le roi de G.Bretagne : "Yvor et Yni, vous descendez tous les deux de mon peuple. Ecoutez ce que j'ai à raconter. Maintenant vous (=les Bretons) ne connaîtrez plus le malheur ; du ciel, j'ai reçu un signe de dieu. Je vais partir pour Rome et me rendre à la cour de l'excellent pape. Le pape s'appelle Sergius, il vit dans la maison de Pierre. Il me bénira et m'absoudra, ainsi que ma femme, et nous passerons là les jours qui nous mèneront à notre mort. D'ici la fin des temps, vous ne me verrez jamais plus. Je vous donne la terre galloise que j'ai encore en ma possession. Prenez cette grande armée, rejoignez ce territoire et détenez-le avec joie aussi longtemps que vous pourrez le défendre. Et je vous demande instamment tous les deux, au nom du Roi des cieux, de vous aimer comme deux frères. Gardez ce pays jusqu'à la fin de vos vies, possédez le avec joie, puis tous vos enfants. Yni, tout ceci avait été prévu comme vous allez pouvoir vous en rendre compte : Merlin, plein de sagesse, avait annoncé ma mort et mes soucis extrêmes. Et Sybille, pleine de sagesse, avait écrit que je ferais la volonté de mon Seigneur. Que chacun suive maintenant sa route et au-revoir à tous".

En conclusion le Brut de Layamon , texte anglais de la fin du XIIe siècle,( et contre une croyance populaire concernant Arthur attribué a la Cornouaille au début du XIIe ! ), perpétue le souvenir de Cadwalader comme le dernier souverain de Grande Bretagne, possible revenant, dans la ligne à peine modifiée de l’Arrmes prydein vawr galloise..

Bien amicalement, jacques.

Re: historiographie arthurienne

MessagePosté: Sam 09 Jan, 2010 13:09
de Sedullos
Salut à tous,
AYB a écrit:deu arth nys guna guarth kyfarth beunyd ("deux ours qui n'ont pas de honte à aboyer tous les jours") : voir ici la page correspondante du manuscrit (le texte concerné est aux lignes 2 et 3).


Arthur est parfois nommé dans les textes, le Sanglier de Cornouailles.

Re: historiographie arthurienne

MessagePosté: Dim 10 Jan, 2010 18:56
de Agraes
Muskull a écrit:Bonjour,
Ce qui serait intéressant de savoir c'est pourquoi l'image du 'roi parfait' s'est retrouvé un jour nommé Arthur ou Artus. Il a en fait de multiples noms dans les mythes dont le plus ancien en Irlande serait Nuadha et l'un de ses avatars les plus récents Conan (Cynan) en Cornouailles.
La racine 'art' (ours) et ses connotations symboliques n'apparaissent pas chez Nuadha or la symbolique de l'ours est puissante.
D'abord cyclique associée comme celle du cerf à la période claire et sombre de l'année mais aussi comme le maître de l'hiver, celui qui peut faire revenir la régénération du monde en luttant contre les démons du froid (mythes slaves).
Comme je ne pense pas qu'il y ait eut des ours en Irlande (mais je me trompe sans doute), est-il possible de voir en ce nom d'Artus une influence saxonne plus tardive ?
Le mythème de 'l'amputation qualifiante' devrait aussi être abordé...


L'onomastique brittonique regorge de noms basés sur la racine 'Art'. On a des Arthuis par exemple.
Une inscription retrouvée à Tintagel dans les années 90 et datée de la fin Ve/début VIe siècle mentionnait (entre autres) un certain Artognou, ou Arthnou. A l'époque on avait pas manqué de faire le lien avec Arthur dont Tintagel est le lieu de conception mythique, même si les deux noms sont différents. Saint Gildas évoque il me semble une "forteresse de l'ours" lorsqu'il fustige Cuneglasus dans le De Excidio.
Il me semble qu'un roi irlandais légendaire se nomme Cormac mac Art.

Enfin on a connaissance de plusieurs rois ou princes portant le nom d'Arthur au Haut Moyen Age. Il s'agit notamment d'Arthur fils d'Aedan (roi des Irlandais du Dal Riada vers 580-600), ou encore d'un Arthur dans le Dyfed au VIIe siècle. Dans les deux cas il s'agit de personnages issus de dynasties irlandaises implantés en Grande-Bretagne. Les partisans de l'historicité d'Arthur, quant ils n'ont pas voulu faire de l'un d'entre eux son avatar historique, ont proposé que son nom aurait connu une certaine vogue plusieurs générations après sa mort...

Re: historiographie arthurienne

MessagePosté: Dim 10 Jan, 2010 20:28
de Muskull
Merci vraz Agraes :)
Il semblerait donc que le symbole germain de l'ours germain comme "maître des combats" soit aussi partagé par le domaine celtique mais ce, de façon tardive. D'ailleurs les différences conceptuelles entre celtes et germains ne sont que question de temps et de lieux, ils appartiennent à mon sens à une culture commune 'élargie' avant l'intervention de la culture romaine.
L'Art (le nom) celte pourrait donc être être une réponse à l'Art (le nom) saxon comme il est avéré en histoire de l'art cette même influence des entrelacs animaliers saxons sur l'art irlandais. :roll:

Re: historiographie arthurienne

MessagePosté: Dim 10 Jan, 2010 21:11
de André-Yves Bourgès
Agraes a écrit: Saint Gildas évoque il me semble une "forteresse de l'ours" lorsqu'il fustige Cuneglasus dans le De Excidio.


receptaculum ursi : il pourrait s'agir du toponyme Dinerth (ou Dineirth), à proximité de Llandudno. Voir ici.

Benjamin, je pense qu'il est inapproprié de parler de saint Gildas à propos de l'auteur du DEB ; cette "sanctification" est assurément tardive et il n'est pas impossible que l'on ait confondu à cette occasion plusieurs homonymes.

Bien cordialement.

Re: historiographie arthurienne

MessagePosté: Dim 10 Jan, 2010 22:36
de Agraes
Pas de problème André-Yves ! Juste un abus de langage de ma part :)

Merci vraz Agraes :)
Il semblerait donc que le symbole germain de l'ours germain comme "maître des combats" soit aussi partagé par le domaine celtique mais ce, de façon tardive. D'ailleurs les différences conceptuelles entre celtes et germains ne sont que question de temps et de lieux, ils appartiennent à mon sens à une culture commune 'élargie' avant l'intervention de la culture romaine.
L'Art (le nom) celte pourrait donc être être une réponse à l'Art (le nom) saxon comme il est avéré en histoire de l'art cette même influence des entrelacs animaliers saxons sur l'art irlandais. :roll:


Culture commune, très certainement ! L'Irlande et la façade atlantique de la Grande-Bretagne sont relativement encore en dehors de la zone d'influence culturelle germanique vers l'an 500.
Un thème onomastique il me semble à relier avec Ci/Con (le chien, ou la meute) de loin le plus fréquent, ou encore d'autres animaux comme March, le cheval, ou Broch, le blaireau... Et quelques exemples connus de Brochmael, Brochfael ou Brocmail, littéralement le "prince-blaireau" :wink:

Re: historiographie arthurienne

MessagePosté: Lun 11 Jan, 2010 0:41
de André-Yves Bourgès
Agraes a écrit:Pas de problème André-Yves ! Juste un abus de langage de ma part :)


Il n'y a pas mort d'homme en effet ! ; mais vous êtes trop bon connaisseur de la période pour que je ne relève pas cet "abus de langage"... Sinon, on va nous ressortir les deux vitae tardives de saint Gildas pour servir de "caution historique" à ce texte très particulier qu'est le DEB ! :wink:

Bien cordialement.

Re: historiographie arthurienne

MessagePosté: Lun 11 Jan, 2010 0:57
de Sedullos
Salut à tous,
Agraes a écrit:Les partisans de l'historicité d'Arthur, quant ils n'ont pas voulu faire de l'un d'entre eux son avatar historique, ont proposé que son nom aurait connu une certaine vogue plusieurs générations après sa mort...


Ce que tu dis concerne-t-il le nom d'Arthur, duc de Bretagne, fils de Geoffroy Plantagenêt, neveu de Richard et probablement assassiné sur l'ordre de Jean-Sans-Terre en 1203 ?