Je vous fais suivre un article publié dans le
LIZHER AR POHER n° 14 à propos d'une enquête menée en
1668 sur le découverte d'un trésor de près de 400 pièces à GLOMEL.
Envoi de Mr Gilles LE PENGLAOU, responsable du
Centre Généalogique du Poher (à Carhaix) :
Centre généalogique du Poher :
http://www.cgh-poher.org/
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IL y a 330 ans...
DECOUVERTE D'UN TRESOR MONETAIRE A GLOMEL
Louis de la Boëssière sénéchal au siège royal de Carhaix
savoir faisons que sur l'avis nous donne qu'un particulier bêchant de la terre dans l'étendue de la paroisse de GLOMEL aurait depuis quelque temps trouvé un trésor d'or et d'argent, et qu'un autre particulier uni d'intelligence avec le premier expose une monnaie inconnue, qu'il distribue pour de l'argent blanc ayant à présent cours avec des particuliers, tant de l'étendue de cet évêché et juridiction, que des évêchés de Léon et Tréguier, au préjudice du Roi et du public, à quoi voulant à notre possible pourvoir et prévoir aux inconvénients qui pourraient advenir, avons jugé à propos de descendre dans le bourg paroissial de GLOMEL pour tâcher de nous informer plus positivement de l'état des choses.
Le 6 décembre 1668, il se rend à GLOMEL, accompagné de Me Jan du PAYS avocat en la Cour, commis d'office en l'absence du Procureur, de son substitut Me Jan HERVE commis aux fonctions de greffier et de Me Yves DASSUET huissier audiencier
ENQUETE A GLOMEL
En la maison de Messire Gilles JEGOU seigneur de Kerviliou où Madame sa compagne leur montre 2 pièces d'or d'une fabrication inconnue et fort antiques, chacune d'environ la grandeur et pesanteur d'un écu d'or achetées 15 livres d'avec un Léonnois, lequel mandé pour audition, sera interrogé le lendemain. Attendu l'intervention de la nuit, ils prennent logement chez le nommé La COTTE hôte y débitant.
7 décembre
Au village de Kervidan (1) Interrogatoires de Jacques et François TANGUY demeurant de tout temps en la métairie de Kervidan appartenant à Mme de NEVET
Jacques TANGUY environ 40 ans jure n'avoir jamais trafiqué du vieil or
François TANGUY son neveu environ 21 ou 22 ans reconnaît avoir bêché ou écobué de la terre dans un champ nommé Parc en Leur avec Charles LE SCOUARNEC valet de son oncle, mais soutient n'y avoir trouvé ni pot ni trésor
Interrogatoire de Yves CARO texier de son métier fils de Jan, natif de GUIMILIAU (2). demeurant au manoir de Kervidan chez Jacques Louis QUENET, 25 ans au mois de février prochain, dépose qu'au commencement du mois d'août Jacques TANGUY l'a prié en secret de lui distribuer et changer de l'or de la ville. II a vendu plusieurs pièces, notamment à Yves LE BRAS hôte et habitant de LANNION demeurant rue du Quai François TANGUY avait découvert ces pièces d'or rangées sur leur côté dans un pot de médiocre grandeur II s'est défait d'environ 28 pièces; le reste se trouve dans une armoire.
dans la cuisine de la maison neuve et dans un petit coffret fermé à clé, au bas de la couchette près du feu dans la cuisine. Au total 400 pièces d'or,
PERQUISITION CHEZ LES TANGUY
Jacques TANGUY chef de ménage
François dit le jeune son neveu laboureur de terre
autre François son père
Guillaume son frère
Janne RACLET sa femme.
D'abord dans la maison d'habitation : aucune trace de trésor dans la presse neuve (3) ni ailleurs.
Le sénéchal et ses auxiliaires de justice se rendent alors dans une sorte de chambre, mitoyenne de la maison neuve. A l'évidence la terre du sol a été récemment remuée et creusée près du pignon : les nombreux trous de ce mur sont explorés un à un et de l'un d'eux on retire une vessie liée d'une ficelle : elle ne contient pas moins de 315 pièces de vieille fabrication.
Prié de dire s'il en possède d'autres. Jacques TANGUY soulève une pierre près du foyer; dans la cachette, 83 pièces de plomb.
Le dimanche 9 décembre 1668
sur l'avis de Jan du PAYS
sont entendus Ollivier LE CERFF 28 ans, hôte débitant de vin au bourg de GLOMEL et sa femme Louise LE GOFF 34 ans
Ils confirment que Jacques et François TANGUY ont rencontré chez eux "dans la chambre de la noblesse". Yves ou Yvon LE BRAS marchand de LANNION.
Suite de l'affaire en 1669
René de NEVET agissant au nom de sa mère Bonnaventure de LISCOET réclame la propriété du trésor.
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Source : AD annexe de BREST 2B 647 et 650
Notes
(1) Kervidan village situé a peu de distance au N.E. de l'ancienne voie romaine reliant VANNES à CARHAIX. Le manoir n'existe plus.
(2) Le pays de GUIMIL1AU dans le HAUT-LEON était réputé pour ses toiles et ses tisserands,
(3) presse : haut bahut à plusieurs étages et compartiments munis de serrures avec des clés.
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COMMENTAIRE
Ces enfouissements monétaires ont été généralement réalisés lors d'une période troublée, guerres ou conflits de tous genres. Les propriétaires de ces trésors enterraient leurs économies avant de prendre la fuite vers des cieux plus cléments, pensant les récupérer plus tard quand tout serait rentré dans l'ordre. Certains ne sont jamais revenus reprendre leur bien.
De quelle époque date notre trésor de Glomel ? Difficile à déterminer, les indications de l'enquête sont très vagues : 400 pièces d'or de la taille et du poids d'un écu, de fabrication inconnue et fort antique et rangées sur le côté dans un pot au moment de leur découverte.
Puis-je me risquer, toutefois, à proposer une explication ?
Cette absente de description détaillée est peut-être un indice : si ces monnaies avaient eu une quelconque inscription ou une effigie, les enquêteurs n'auraient pas manqué d'en faire part dans leur rapport. A mon avis, il s'agissait de pièces gauloises. Elles sont toujours, anépigraphes et leur graphisme est très stylisé, à la limite de l'abstrait.
Le village de Kervidan se situe à proximité de ta voie reliant la capitale des Vénètes, Darioritum-Vannes, à celle des Osismes, Vorgium-Carhaix. Cet itinéraire important fut réaménagé plus tard par les Gallo-romains. Non loin de là, et toujours à proximité de cette voie, un important établissement gaulois est en cours de fouilles archéologiques; à Saint Symphorien en Paule, Plusieurs statuettes gauloises y ont été découvertes, dont la fameuse statuette à la lyre. Les archéologues datent la destruction violente de ce site de l'époque de la conquête romaine.
En 56 av. J.C.. Jules César, après avoir vaincu les Vénètes lors de la fameuse bataille navale à proximité de leurs côtes, aurait eu le temps de continuer sa conquête plus à l'ouest jusque chez les Osismes avant d'aller pacifier les Morins et les Ménapes au nord de la Gaule, 15 jours exactement d'après P. MERLAT, en septembre 56. On peut donc supposer qu'après la victoire, les légions romaines aient continué leur route vers la capitale des Osismes détruisant tout sur leur passage et c'est à ce moment-là que les propriétaires du trésor auraient procédé à son enfouissement avant de prendre la fuite ou de livrer combat. De plus, étant donné l'importante quantité de monnaies, on peut ne demander s'il ne s'agissait pas, en fait, d'un atelier monétaire Osisme. or ce peuple est le dernier de la péninsule armoricaine à avoir frappé monnaie d'or, et ce jusqu 'à 56 av. JC justement, (Louis PAPE, Protohistoire de la Bretagne, Editions Ouest-France)
Quoiqu'il en soit, cette découverte semble inédite pour les historiens, puisque personne n 'y fait allusion dans les différents inventaires réalisés.
G. LE PENGLAOU
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Pour info.
JCE