Muskull a écrit:------ Cette sculpture de Roquepertuse est souvent mise en rapport avec le Janus romain :
Est-il plus facile de connaître, recomposer le passé que le futur ?
Janus est une divinité italique et romaine, dieu de l’année et des contraires.
Roi légendaire de l’Italie ancienne, à qui Saturne aurait donné la faculté de connaître le passé et l’avenir. On le représente avec deux visages tournés en sens contraire (
bifrons vel biceps), il est le gardien des portes (
ianua, janua), qui, comme lui, ont une double face. Gardien des passages (
iani, jani), il surveille aussi bien les entrées que les sorties, et veille également sur les ports et les routes.
----------------------- Protecteur de Rome, les portes de son temple qui lui était dédié étaient ouvertes en temps de guerre, car il partait combattre et elles étaient fermées en temps de paix (
Histoire de Rome depuis sa fondation,Tite-Live, I, 19). Les Romains ont fait figurer son mythe sur les plus anciennes pièces de monnaies romaines, l’as de bronze vers le IIIè s. av. J.-C.
Quelques précisions et commentaires :
H.-P. Eydoux a écrit:
Dieux et héros.
---[…] Quel témoignage nous en apporte également cette étrange sculpture faite de la conjonction de deux têtes qu’un oiseau rapace saisissait (de celui-ci, il ne reste l’arrachement du bec) ! On l’intitule « Hermès bicéphale ». Le grand archéologue provençal Fernand Benoit estime que cette sculpture s’inscrit, pour une part, dans la tradition classique ; elle appartient à une série de têtes accolées par la nuque, dont le prototype aurait apparu, dès le VIè siècle avant notre ère, dans la nécropole étrusque d’Orvieto.
---Ces deux têtes de Roquepertuse sont sensiblement de grandeur naturelle (20 centimètres de haut). Les oreilles n’ont pas été figurées, non plus que les cheveux qui étaient seulement indiquées de peinture noire. Le visage, quant à lui, était coloré en rouge. Cette sculpture dénote un réalisme recherché et une habileté d’exécution qui en font une des pièces maîtresses de l’art gaulois avant l’occupation romaine.
Révélations de l’archéologie, Henri-Paul Eydoux, Éditions Gautier Languereau, 1963, 190 pages, 48-50.
J. Schmidt a écrit:JANUS. Cette divinité est assurément l’un des plus grands dieux du Panthéon romain et possède même une certaine prééminence sur le dieu suprême, Jupiter. Il aurait abordé l’Italie avec une flotte et se serait établi dans le Latium, où il aurait fondé une ville, qui prit de lui son nom de
Janicule. Il aurait régné sur le Latium et accueilli Saturne chassé des cieux. Pour le remercier, Saturne aurait donné à Janus le don de la « double science » celle du passé et celle du futur, mythe que les Romains ont rendu en représentant Janus avec deux visages tournés en sens contraires.
Ce dieu à double face possède de nombreuses autres attributions. Il est la divinité gardienne des portes, parce que toute porte regarde des deux côtés (
Janus Bifrons).
Lors d’une déclaration de guerre, les Romains ouvrent solennellement les portes de son sanctuaire, pour indiquer que le dieu est parti combattre, et les referment en temps de paix, pour montrer que le dieu, sauvegarde de la cité, a réintégré son sanctuaire. Peu à peu, les attributions de Janus ont pris une extension considérable. Il est devenu le dieu du commencement de toutes choses, celui de l’Année (
Januarius signifie « janvier »), le dieu des Quatre Saisons : il porte alors quatre têtes au lieu de deux. Ovide prétend que Janus possède un double visage, parce qu’il exerce son pouvoir sur la Terre et sur les Cieux. Peut-être n’est-il nullement un dieu cosmogonique, mais seulement et exclusivement un dieu de Rome, symbolisant la surveillance de la ville, où transitent les trafics sur le Tibre, en amont comme en aval.
La diversité de ces attributions montre à quel point Janus est le dieu essentiel d’un monde ou d’une ville qui s’ouvre et se ferme à sa volonté, sans que rien lui échappe.
--------------Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, Joël Schmidt, Librairie Larousse, 1965, 320 pages, p. 171.
É. Hamilton a écrit:
Les dieux romains
---Janus, lui aussi, fit d’abord partie des Numina ; il était le dieu des « entreprises propices », qui ne pouvaient que s’achever heureusement. Jusqu’à un certain point, il fut plus tard pourvu d’une personnalité distincte. Parmi les nombreux temples qui lui furent dédiés, le plus important se trouvait à Rome ; il était orienté d’est en ouest, du levant au couchant ; deux portes y donnaient accès, entre lesquelles s’élevait une statue de Janus à deux visages, l’un jeune, l’autre âgé. On ne fermait ces portes que lorsque Rome était en paix.
Elles ne furent closes que trois fois pendant les 7 premiers siècles qui suivirent la fondation de la cité, la première pendant le règne du bon roi Numa Pompilius ; la seconde après la première guerre Punique, en 241 av. J.-C., lorsque Carthage fut défaite ; et enfin sous le règne d’Auguste, lorsque, ainsi que dit Milton :
------------- On n’entendait plus dans le monde
-------------Ni le bruit de la guerre ni celui des batailles.
---Bien entendu, janvier, mois de Janus, commençait l’année.
--- [...] Une coutume de la ville voulait que la porte du temple de Janus, toujours close en temps de paix, fût ouverte dès qu’une guerre était décidée. Alors le Roi soulevait les barres des deux battants, les trompettes résonnaient et les guerriers poussaient de grands cris. […] Et la joie envahit la cité, joie du combat promis, des cuirasses scintillantes et des chevaux de bataille et des fiers étendards déployés, joie de se préparer à une guerre sans merci.
La mythologie, Édith Hamilton, Les Nouvelles Éditions Marabout, 1962, 416 pages, p. 43 et 284.