Par sa liberté de ton, la parution de
Mme Bovary fit scandale à l'époque. La rédaction des quelques 4.500 feuillets manuscrits sont depuis peu en ligne sur internet, fut conçu avec le temps nécessaire, le réalisme et contraintes qu’imposent ce genre d’ouvrage.
Flaubert se lança, entre 1857 et 1862, dans la toute aussi éreintante et laborieuse rédaction de
Salammbô, avec des corrections sans fin, pas moins de neuf versions du même chapitre, et de quatorze chapitres pour certains passages.
On peut aussi s'attendre à une mise en ligne prochaine des manuscrits de cet ouvrage qui fut mis en vente le 24 novembre 1862. Le renom de l'auteur lui fit d'emblée obtenir un succès croissant de curiosité auprès du public, mais souleva aussi par sa liberté et vivacité de ton, ses lacunes et imperfections, de laisser dire n'importe quoi n'importe comment, maintes discussions d’un ton parfois assez vif.
Oeuvre divertissante et géniale de semi-fiction, imaginée et retravaillée d'après une assise solide de l’archéologie et de l’histoire vraie (ou vice et versa, si l’on veut), l’intrusion de ce genre de roman novateur dans le monde littéraire, ne manqua pas de créer une très forte réaction de la part de certains critiques qui émirent publiquement et sans tarder des réserves.
Et, pour reprendre ici la polémique autour de sa parution, certaines remarques issues de
Flaubert, œuvres complètes, par Bernard Le Masson, Éditions du Seuil, 1964, 800 pages, pp. 751-8, et dont on peut retrouver les lettres des protagonistes :
http://www.mediterranees.net/romans/sal ... hner1.htmlAinsi, l'écrivain, Sainte Beuve (1804-1869), qui s’empressa de disséquer le roman et rédiger une longue, pointilleuse étude empreinte de doutes et répartie en trois articles (et qu’il regrettera finalement d’avoir écrit) parus dans le quotidien politique le
Constitutionnel des 8, 15, et 22 décembre 1862.
De son côté Wilhelm, dit Christian-Guillaume,
Froehner (1834-1925), d’origine allemande, finit par devenir, par la faveur du Pouvoir, conservateur des Antiquités du Musée du Louvre. Il fût entre autres mandé par Napoléon III, pour relire et corriger son
Histoire de Jules César, et faire parti de la commission sur Alésia. Fort de son savoir et piqué au vif par la lecture du roman, Froehner s’empêtra pourtant à son désavantage dans un article de la
Revue contemporaine, datée du 31 décembre 1862, qu’il intitulait avec un lazzi quelque peu mérité : «
Le roman archéologique en France, G. Flaubert,
Salammbô ».
Flaubert ne se laissa pas déstabiliser car Froehner était à son tour pris en flagrant délit de mauvaise foi, d’inexactitude ou d’ignorance. L'écrivain porta la répartie qui fait mouche et le jeu de la réponse serrée. Pour mieux défendre et rebouter les travers enflammés de son imagination, il répliquait, sans cesse et sans lâcher prise, à grands coups de preuves, de textes et documents historiques.