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MessagePosté: Sam 24 Jan, 2009 12:51
de ejds
Fr. Noël dans son Dictionnaire de la fable, apporte d’autres interprétations moins imagées et bien plus pragmatiques sur le combat titanesque d’Hercule, sa B.A, sa bonne action contre les violentes crues et les humeurs du plus grand fleuve de Grèce Achéloüs, Acheloos, Acheloias en latin… , le père des Sirènes : :shock:

Fr. Noël a écrit:ACHÉLOÏA, CALLIRHOÉ, fille d'Achéloüs.

ACHÉLOÏDES, surnom des Sirènes, d'Achéloüs leur père.

ACHÉLOÜS, fils de l'Océan et de Téthys ; selon d'autres, du Soleil et de la Terre. Amant de Déjanire qui lui avait été promise, il la disputa à Hercule, mais il fut vaincu. Aussitôt il prit la forme d'un serpent, sous laquelle il fut encore défait ; ensuite celle d'un taureau, qui ne lui fut pas plus favorable. Hercule le saisit par les cornes, le terrassa, lui en arracha une, et le contraignit d'aller se cacher dans le fleuve Thoas, depuis appelé Achéloüs. Le vaincu donna au vainqueur la corne d'Amalthée, pour recouvrer la sienne. Selon d'autres, c'est la corne même d'Achéloüs que les Naïades ramassèrent, et dont elles firent la corne d'abondance.

Ceux qui ont prétendu trouver dans l'histoire l'explication de tous les mythes ont vu dans cet Achéloüs un fleuve de Grèce, qui coulait entre l'Étolie et l'Acarnanie, dont les inondations fréquentes désolaient les campagnes de Calydon, et, confondant les limites, faisaient naître des guerres entre les peuples de ces contrées. Hercule fit faire des digues, et rendit le cours du fleuve uniforme. La métamorphose d'Achéloüs en serpent exprimait les sinuosités de son cours, et celle en taureau, les ravages que ses débordements causaient dans les campagnes. Hercule lui arracha une corne, c'est- à-dire qu'il réunit dans un seul lit les deux bras du fleuve ; et cette corne devient une corne d'abondance, parce que le cours réglé de l'Achéloüs devint une source de richesses pour le pays qu'il arrosait.


Dictionnaire de la fable, ou Mythologie grecque, latine, Egyptienne, Celtique…, Fr. Noël, 1801, p. 12.

Concernant cette corne d'abondance, É. Hamilton, p. 359 et de son livre La mythologie, fournit d'autres explications :

É. Hamilton a écrit:Amalthée

Selon un récit, elle serait la chèvre qui nourrit l’enfant Zeus de son lait. Selon un autre, elle était une nymphe qui possédait une chèvre. Son front, disait-on, s’ornait d’une corne toujours pleine de mets et de boissons — la Corne d’Abondance (en latin Cornu Copiae — aussi connue sous le nom de Cornucopia en mythologie latine). Mais les Latins disaient encore que la Cornucopia était cette corne qu’Hercule enleva à Achéloüs, quand il vainquit le dieu marin qui avait pris la forme d’un taureau pour lutter contre le héros.


Sedullos a écrit:Il faudrait consulter le livre de Patrice Lajoye, Des dieux gaulois, ou mieux que l'auteur vous réponde lui même. Il y a bien un rapport entre un dieu taureau et cornu et un fleuve ou un lac avec notamment un exemple en Italie du Nord.

Il s'agit d'un lac, le lac de Garde et le nom du dieu est Benacus = "le Cornu", d'après Patrice Lajoye, Des dieux gaulois, pp. 29-30, qui donne la référence à Virgile, Enéide, X, 205. Le culte de ce dieu est attesté par deux inscriptions, une près du lac, "Lacus Benacus", l'autre près de Brescia. Sur cette dernière, Benacus est assimilé à Neptune...

Selon Les métamorphoses, livre VI, 115, d'Ovide, Neptune dans ses déboires amoureux se retrouvera, et entre autre, changé en taureau dans ses amours avec une fille d'Éole, le dieu des Vents :

Ovide a écrit:Te quoque mutatum toruo, Neptune, iuuencouirgine in Aeolia posuit ;

Toi aussi, Neptune, elle te plaça, transformé en jeune taureau farouche,sur la fille d'Éole.

Lago di Garda, le plus long lac d'Italie, anciennement le Benaco, cité aussi par Horace et Catullus, l'est deux fois par P. Virgilius Maro (70 - 19 av. J.-C) dans ses Géorgiques, 11. 158 et son Æn. X. 204 :

Hinc quoque quingentos in se Mezentius armat,
Quos patre Benaco, velatus arundine glauca,
Mincius infesta ducebat in aequora pinu.


En traduction dans L'Enéide, Flammarion, année ?, 360 pages, p. 274 et 275 sur les déesses de la mer :

Virgile a écrit:La guerre contre Mézence avait rangé sous les mêmes drapeaux, et embarqué sur le même navire cinq cents guerriers des bords du Mincio, fils du lac Bénacus 1 ; fleuve dont les rives sont toujours couronnées de roseaux.

1. Ce lac s’appelle aujourd’hui le lac de Gard, que traverse le Mincio.

[…] Énée, à qui ses inquiétudes ne permettaient pas de se livrer au repos, assis à la poupe, gouvernait lui-même le timon et les voiles de son vaisseau. Il avait achevé la moitié de sa route, lorsque les déesses de la mer, ces nymphes dans lesquelles la mère des dieux avait transformé ses vaisseaux, s’assemblèrent autour de sa galère, et la suivirent. Elles avaient de loin reconnu leur ancien maître, et, nageant en ordre et en cadence, elles semblaient former une danse autour de lui. Alors Cymodocée, la plus éloquente de ces nymphes, élevée jusqu’à la ceinture sur la surface des aux tranquilles, appuyant sa main droite sur la poupe, et nageant de la main gauche, tint ce langage au roi des Troyens, pour l’informer de ce qu’il ignorait : […]


Patrice a écrit:J'arrive un peu tard, mais je confirme ce que dit Sedullos. Benacus a un nom qui est clair en lui-même. Certes ici c'est un lac, mais les fleuves sont aussi représentés comme étant cornus.

Quant à la forme des fleuves (ou des lacs qu’ils traversent), aux crues porteuses de vie comme le Nil, il faut surtout les représenter en termes de vitalité et d’abondance...

e.

MessagePosté: Sam 24 Jan, 2009 19:32
de Muskull
Hi !
Et les nymphes deviennent sirènes marines emportées par le flot tumultueux mais gardent les ailes du taureau céleste. :wink:
Si, si c'est écrit chez Ovide sans doute.

Taureau et nymphes, j'avais abordé la problématique:
L'ours serait le garant de la régularité des cycles, un rôle que l'on peut fort bien attribuer au roi mythique. Sa position est au Nord, le plus près de la Polaire avec le dragon qui on le sait est un emblème guerrier. Guerriers qui sont eux aussi chargés de maintenir l'équilibre sous les ordres du roi. Les liens de l'ours avec Artémis et Diane ne sont plus à démontrer.
Le taureau est lui aussi lunaire et pas seulement à cause de ses cornes. Son sacrifice et sa décomposition faisant naître les abeilles, il peut représenter la lune noire qui fait naître des essaims d'étoiles voilées lorsque la lune est lumineuse. Ainsi la voie lactée apparaît dans toute sa splendeur. Il est lié zodiacalement à Mai et donc à Beltaine, l'ouverture de la saison claire. Il peut être relié à l'Est.
Le sanglier est un laboureur nocturne destructeur que l'on pourrait mettre en opposition dualiste avec le taureau. Il est parfois un roi fautif métamorphosé en son aspect le plus sombre. Il est un des aspects de la chasse nocturne. Dans ce carré nous pouvons le relier à l'Ouest, le domaine des morts où il en emporte beaucoup.
Les abeilles sont clairement reliées au Sud, la partie la plus lumineuse du ciel diurne. Aux nymphes d'Artémis / Diane. Cette Diane qu'il ne faut surtout pas aller déranger à l'heure de Midi dans un mythe galate et que l'on retrouve dans le bain de Mélusine et de la Vouivre.

http://forum.arbre-celtique.com/viewtop ... highlight=

Comme le signale Ejds en apposition, le taureau céleste levant de Beltaine peu être fertile ou destructeur. Le rite servant à contenir ce dernier terme.

MessagePosté: Sam 24 Jan, 2009 21:35
de Alban
Merci à tous pour ces réponses,

cela me parait plus clair maintenant.

A bientôt

Alban.

MessagePosté: Lun 26 Jan, 2009 13:04
de ejds
Hè Alban, ne file pas comme ça ! Reviens. Il existe des suites à cette histoire.

En creusant un peu : :shock:

La vie d'Hercule ne fut qu'une suite ininterrompue d’aventureux exploits, d'épreuves, d'intriques, de victoires mais aussi de drames. Après l'avoir ravie au fleuve Achéloüs, Hercule épousa Déjanire, la fille d’un roi d’Étolie. Mais, d'une autre de ses expéditions, il ramena une jeune captive, Iole. Déjanire, jalouse, crût pouvoir regagner l’amour de son mari au moyen d’une composition magique faite du sang du centaure Nessos ou Nessus : elle y trempa une tunique qu’elle donna à Hercule ; mais, dès que celui-ci s’en fut revêtu, il fut en proie à des douleurs intolérables, le sang de Nessos agissant comme un venin qui lui brûla le corps.

Ovide (43 av. à 17 ap. J.-C.) raconte dans son Livre des Métamorphoses : Achéloüs et Hercule (IX, 1-97). Sénèque (v. 4 – 65 ap. J.-C.) dépeint aussi la fin tragique du héros dans son Hercule sur l'Œta. Vaincu par la souffrance, le héros ordonna d'élever un bûcher sur le mont Œta, et, après avoir remis son arc et ses flèches à un des compagnons, il se précipita dans les flammes avec sa massue et la peau du lion de Némée que ni le fer ni le feu peut entamer. Après sa mort, il fut reçu parmi les dieux dans l’Olympe.

Après avoir discouru sur les îles Échinades, Strabon (v. 57 av. à 25 ap. J.-C.) dans son Geographica, livre X, 2, chapitre 19, s'interroge à juste titre sur la manière de concevoir des faiseurs de mythologie, à leur esprit inventif et à leur imagination féconde, qu’à la pure vérité historique. Il demeure dubitatif quant à cette légende : — « Mais ceux qui font profession d'expliquer tous les mythes et d'en dégager l'élément historique prétendent que, si l'on a comparé l'Achéloüs à un taureau (comme maint autre fleuve du reste) » : :?

Strabon a écrit:[...] La même cause a fait anciennement de toute la Parachéloitide ou vallée de l'Achéloüs le théâtre de contestations sans fin entre les Acarnanes et les Aetoliens : ces deux peuples qui voyaient bouleverser sans cesse par les atterrissements du fleuve les limites qu'eux-mêmes s'étaient données, en appelaient aux armes faute d'arbitres à qui soumettre leur différend, et l'avantage restait naturellement au plus fort.

Telle est aussi l'origine du mythe qui nous représente Hercule triomphant d'Achéloüs et obtenant pour prix de sa victoire la main de Déjanire, fille d'Oenée. On connaît les vers que Sophocle met à ce propos dans la bouche de l'héroïne : « J'avais alors pour prétendant le Fleuve Achéloüs, qui, pour m'obtenir de mon père, se métamorphosa trois fois sous ses yeux, ayant pris d'abord la forme d'un taureau, puis celle d'un serpent aux couleurs variées, aux replis tortueux, pour reparaître encore avec la tête d'un bœuf sur un corps d'homme » (Trachin. 9).

Quelques auteurs complètent le mythe en disant que la fameuse corne d'Amalthée n'est autre que l'une des deux cornes d'Achéloüs brisée par Hercule dans le combat et offerte par lui comme présent de noces à Oenée, son beau-père. Mais ceux qui font profession d'expliquer tous les mythes et d'en dégager l'élément historique prétendent que, si l'on a comparé l'Achéloüs à un taureau (comme maint autre fleuve du reste), c'est pour rappeler et le bruit mugissant de ses eaux et ses brusques changements de direction, ce que les gens du pays justement appellent ses cornes ; qu'en le représentant, ensuite, sous la forme d'un serpent, on a voulu exprimer la longueur de son cours et ses nombreuses sinuosités ; qu'enfin cette tête de bœuf sur un corps d'homme n'est qu'une variante du premier symbole.

Quant à Hercule, voici comment ils expliquent son rôle dans le même mythe. Toujours prêt à rendre service et brûlant d'ailleurs d'obtenir la main de Déjanire, Hercule entreprit par un système de levées et de canaux de rectifier de force le cours désordonné de l'Achéloüs ; il réussit ainsi, pour le plus grand profit du roi Oenée, à assécher une bonne partie de la Parachéloïtide, et c'est là ce qu'exprimerait le don fait par lui à son beau-père de la corne d'Amalthée.

------------------Image
-------------------Mes beaux contes mythologiques, par mademoiselle H.-S. Brès,
-------------------Hachette, 1921, 66 pages, p. 5, illustration non signée.


Mais imperturbable, et pas disputeuse, la mythologie grecque puis romaine, monde confus et fabuleux des dieux, demi-dieux et héros de l’Antiquité, parfois s’oublie et aime bien faire des petits sauts de cabri. L'image ci-dessus, et le texte suivant rappelle qu'Amaltée, la chèvre, fut la nourrice de Zeus, le Jupiter romain, le Seigneur du ciel, le père des dieux et des hommes :

E. Genest a écrit: ------------------------------ La Chèvre Amalthée

---------------------La Corne d’abondance


---Vous n’avez certainement pas oublié la chèvre Amalthée broutant sur le mont Ida. Jupiter non plus n’avait pas oublié son opulente nourrice aux succulentes mamelles, dont il avait gloutonnement sucé le lait délicieux. Il n’avait pas oublié davantage les jeux auxquels dès sa plus tendre enfance, il se livrait avec l’animal haut encorné ; il se rappelait les bonds joyeux, les prodigieuses gambades, les sauts prestigieux et des luttes de grâce, d’adresse et de force. Il se souvenait surtout d’avoir, d’une main trop nerveuse, arraché l’une des belles cornes qui surmontaient le front de sa plantureuse nourrice.

Voulant réparer le tort involontaire d’une bouillonnante jeunesse, et prouver la reconnaissance de l’ancien nourrisson, Jupiter élève Amalthée au rang des constellations célestes. Quant à la corne malencontreusement ravie, il en gratifia les nymphes du mont Ida, en lui donnant le pouvoir de prodiguer à profusion fleurs, fruits d’or et pierreries, d’où son nom de Corne d’abondance.

---------------------------- Image

Contes et Légendes Mythologiques, Émile Genest, Fernand Nathan, Éditeur, 1956, 254 pages, pp. 31-2.

e.

Re: Dieu à cornes de taureau

MessagePosté: Lun 13 Juil, 2009 21:12
de strate
salut à tous je me posai une question : Minos ne serait-il pas un dieu à cornes ? car je séche !!!!!

Re: Dieu à cornes de taureau

MessagePosté: Lun 13 Juil, 2009 21:36
de Alexandre
Certains ont prêté à Minos un caractère lunaire, par exemple dans le cadre de son intervention dans le mythe de Céphale. Il est probable que cela ne dépasse pas le simple jeu d'assonance (le nom Minos ressemble à μηνη, la lune en grec, et peut-être aussi à mi-na, la lune en minoen).
Il a également des liens avec des taureaux, mais ceux-ci s'inscrivent clairement dans le cadre de liens avec Dionysos.
Globalement, je ne lui connais aucune figuration cornue.

Re: Dieu à cornes de taureau

MessagePosté: Mar 14 Juil, 2009 18:43
de strate
merci toutefois ,je continue mes recherches ......

sait-on jamais......

MessagePosté: Lun 20 Juil, 2009 12:08
de ejds
Les tempéraments, assimilations les plus sombres et relations fortes des dieux et des animaux se fait particulièrement ressentir dans l’empire romain, par exemple avec Jupiter dominant ou ne faisant qu’un avec le taureau.

Ainsi la découverte effectuée récemment dans un fort du mur d’Hadrien près de la porte nord de Vindolanda, dans le Northumberland. Un sanctuaire avait été consacré par Sulpicius Pudens, préfet de la quatrième cohorte des Gaules à Jupiter Dolichenus, dieu qui était adoré à l’origine en Asie Mineure à Doliche (Dülük dans l’actuelle Turquie du sud-est).

L’autel en pierre est haut d’environ 120 cm et d'un poids estimé à une tonne cinq. Debout sur un taureau, le dieu brandit d’une main une hache de combat et de l’autre un foudre :

hexham-courant.co.uk a écrit:
Shrine to Jupiter discovered at site

By BRIAN TILLEY
Last updated 09:45, Friday, 17 July 2009


ONE of the most important artefacts ever unearthed at the Vindolanda Roman site near Bardon Mill could also be the heaviest.

http://www.hexham-courant.co.uk/news/ne ... rPath=home

Image
Enshrined: The shrine to Jupiter discovered
at Vindolanda. The god can be clearly seen
holding an axe and thunderbolt while riding
a bull.

Les exemples de ce dieu ne manquent pas : wikipedia.org, ou encore :

Image
khm.at

Re: Dieu à cornes de taureau

MessagePosté: Lun 20 Juil, 2009 13:13
de Alexandre
Jupiter Dolichenus n'est que secondairement un Jupiter :
http://www.persee.fr/web/revues/home/pr ... 183_0000_1
Ce genre d'assimilation est typique de l'Empire Romain, et pas très parlante pour la religion des Celtes de l'Antiquité.