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Re: Divinités Atrébates.

MessagePosté: Lun 23 Mai, 2011 11:23
de Séléné.C
La feuille de gui a beau avoir une forme dans laquelle on peut faire "rentrer" celle des bois du cerf, ça n'est pas la même chose... Au contraire puisqu'elle échappe (en fait, non, ses feuilles tombent quand les nouvelles branches poussent, mais on va pas chipoter) au cycle des saisons.
Et le gui n'a pas une forme animale alors que les bois du cerf ont une forme végétale

Re: Divinités Atrébates.

MessagePosté: Lun 23 Mai, 2011 12:21
de Alexandre
C'est une question de point de vue : dire que les bois de cerf ont la forme d'un arbre, c'est dire que les arbres ont la forme de bois de cerf... Il ne faut pas essayer de plaquer à toute force une vision contemporaine sur les Anciens, même si elle nous paraît évidente.

Re: Divinités Atrébates.

MessagePosté: Lun 23 Mai, 2011 13:04
de Séléné.C
Il ne s'agit pas seulement de leur forme (laquelle me semble pourtant assez difficile à nier : le cerf porte sur la tête des cornes qui bifurquent de la même façon que les branches d'un arbre, essaye de shématiser au plus simple et tu verras que tu ne pourras pas faire autrement que te retrouver avec deux dessins semblables)
Il s'agit aussi du fait que les bois du cerf meurent en hiver de la même façon que les arbres et renaissent au printemps en même temps que la végétation... :wink: Ce qui rapproche cet animal du monde végétal !

(et dire que je disais plus haut qu'il n'y aurait pas besoin d'expliquer? J'suis la seule à trouver que le cerf perd ses bois quand la forêt perd ses feuilles ?)

Re: Divinités Atrébates.

MessagePosté: Mar 24 Mai, 2011 11:26
de ejds
La symbolique du bois de cerf repoussant chaque année renvoie à la vigueur, la fécondité, le renouveau printanier…

Animal-arbre qui s’enfuit et se cache à l’approche de l’homme (qui aurait voulut aussi être cet animal, cet arbre parmi les arbres de la forêt), la métaphore est belle. L’image fugace et gracieuse.

Mais, pourquoi et comment ce trophée d’une paire d’andouillers symétriques trouvée dans la forêt, ou bien souvenir qui a été vaillamment chassé et mangé…, serait-il plus facile à porter, ficelé sur la tête, qu’une paire de branches d’arbre ?

Est-ce que le fait de se déguiser en portant la dépouille d’un agresssif omnivore ou carnivore (sanglier, ours, loup, lynx… ) aurait eu la même signification, et la même importance, que la ramure d’un relativement placide et craintif herbivore ? Est-ce une façon plus douce pour le chaman-animiste d’intercéder auprès des dieux qui habitent et animent la faune et la flore de la forêt ? Et obtenir ainsi en échange d'offrandes, des faveurs, des mercis, de la protection…

La numismatique gauloise nous mène vers le bucrane (bucranium, bos cranium), crâne de bœuf, de taureau… aux cornes (— qui ne tombent pas et ne repoussent pas tous les ans —) et qu’on retrouve enguirlandées de feuillages à la mode gréco-romaine.

Le Cernunnos gallo-romain du pilier des Nautes, mi-homme, mi-animal ou mi-arbre (?), arbore une paire d’oreilles et des bois de cervidé auxquels pendent des torques :

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Re: Divinités Atrébates.

MessagePosté: Mar 24 Mai, 2011 13:57
de Séléné.C
ejds a écrit:Mais, pourquoi et comment ce trophée d’une paire d’andouillers symétriques trouvée dans la forêt, ou bien souvenir qui a été vaillamment chassé et mangé…, serait-il plus facile à porter, ficelé sur la tête, qu’une paire de branches d’arbre ?

On peut faire un masque de cerf avec des branches d'arbre, aïe sup-oz...
Avec des morceaux de bois de forme convenable on peut bien faire des cornes de taureau ...

Re: Divinités Atrébates.

MessagePosté: Mer 25 Mai, 2011 12:20
de ejds
Vivides et généreuses sont les pulsions de l'imagination dans les mythologies.

Pour l'exprimer en propre et en imagé, les surprenants aléas d'un dieu-fleuve : dieu aux oreilles et aux cornes de taureau (et non de bélier ou de cerf).


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Re: Divinités Atrébates.

MessagePosté: Mer 25 Mai, 2011 13:12
de Séléné.C
"Lorsque de tous ces lieux, il [Enki] eut détourné son attention et que le vénérable Enki l"eut portée sur l'Euphrate, il se campa sur ses pieds comme un taureau impatient, erigea son pénis, éjacula et remplit d'eau chatoyante le fleuve comme si c'eût été une vache au pâturage, meuglant après son veau resté dans l'étable... Le Tigre ensuite se soumit à lui (...) puis ayant touché le sol de sa senestre, l'opulence jaillit de la terre."
Les voix du sacré, editions Laffont, 1992.
page 20, chapitre sur les sumériens, babyloniens et assyriens.

Oui, un autre cornu...
Qui n'a pas les mêmes particularités.
Si on va chercher du côté des cornus-bélier, on trouvera peut-être plutôt le soleil que l'eau...

J'attirais l'attention sur le côté végétal du cornu-cerf spécifiquement... Muskll a semblé dire que Kruta allait en ce sens, mais ce qu'il a cité ne correspond pas.
Je suis une "pommée" mais j'ai beaucoup de mal à croire que l'homme-cerf n'est pas aussi un homme-arbre.

Qu'est-ce que ça aurait d'extraordinaire ? Les grecs et les romains, eux-mêmes, avaient attribué un arbre à chaque dieu... Pourquoi les dieux celtes ne s'exprimeraient-il pas ainsi aussi ? C'est vraiment accorder trop d'importance au Gad Goddeu que chercher un syncrétisme entre les formes d'existence ?

Re: Divinités Atrébates.

MessagePosté: Mer 25 Mai, 2011 18:51
de Muskull
Séléné.C a écrit:Oui, un autre cornu...
Qui n'a pas les mêmes particularités.
Si on va chercher du côté des cornus-bélier, on trouvera peut-être plutôt le soleil que l'eau...

C'est ce qu'Alexandre te disait plus haut.
La systématique symbolique actuelle n'est pas applicable aux peuples "premiers". Il faut beaucoup lire (mais pas trop sur le web :x ) et tenter de se faire une idée entre les différentes écoles qui se bagarrent sans prendre parti car "prendre parti" est une forme d'abandon de sa propre intelligence. Un "transfert" disent les psychologues...
Et peut-être après causer, poser des questions bien étudiées mais toujours sur la pointe des pieds. :D

Re: Divinités Atrébates.

MessagePosté: Mer 25 Mai, 2011 19:21
de Séléné.C
C'est aussi ce que je disais plus haut qu'Alexandre... Et contrairement à ce que tu as l'air de croire, je ne lis pas que sur internet.

Quand à la pointe des pieds, je me disais en reposant mon livre, tout à l'heur, que les chercheurs avancent toujours de cette façon, bien caractéristique... C'est tout à leur honneur. C'est ce qu'on attend d'eux.
Mais moi qui ai choisi d'être ce qu'étaient les "fous" du Moyen-Age, c'est à dire une amuseuse, j'avance comme le fou du jeu de tarots c'est à dire sans toujours bien regarder où je mets les pieds.
Et, ne t'en déplaise, je me suis avant d'en arriver là, d'abord défaite de beaucoup plus de préjugés de notre époque que je ne saurai jamais les compter. D'ailleurs, je sais de notre époque bien peu de choses, je dois dire. J'ai autant de culture générale qu'un trou noir. Ne me demandez pas les résultats de l'Eurovison ni qui a réalisé les effets spéciaux du dernier film d'héroic fantasy et comment ils sont.

J'ai ma vision du cornu-cerf et j'aimerais bien trouver des auteurs qui aillent dans mon sens, mais si je n'en trouve pas, ça ne me gênera pas plus que ça. De toutes façon, je n'ai évoqué la question que parce que ça se présentait.

Re: Divinités Atrébates.

MessagePosté: Dim 29 Mai, 2011 7:03
de ejds
Les mythologies sont ainsi. Mutantes et sinueuses !

A la croisée de leurs légendes et de leurs récits, on s'engage et trottine dans un irrationnel peuplé d’êtres et de symboles inquiétants ou rassurants, polyvalents, protéiformes, thériomorphes...

Le serpent, est le Vieux-Dieu premier présent dans la plupart des cosmogénèses. Bâton caducée, devin, genius… , il est celui qui peut donner la mort ou la vie.

Entouré du cerf et de sa garde d’animaux, bestiaire hybride ou allochtone, aux traits approximatifs (taureau/bouquetin, ours/sanglier, chien/loup, fauve/lion, cétacé/dauphin dompté par un enfant), le Cernunnos du chaudron de Gundestrup brandit dans sa main un serpent criocéphale à tête de bélier, tel une offrande, un présage, masse vivante, menace ou talisman…

------------- Image
------------- Photo :jfbradu.free.fr

Fréquent dans l'iconographie celtique et surtout gauloise, le serpent est esprit des eaux qui courent sous ou sur la terre, à l'image du Père Rhin (Rhenus Pater), de la Seine (Deus Sequana)... Dans la fureur de ses crues, le dieu-fleuve Acheloos, le plus grand de la Grèce antique, se métamorphose tour à tour en serpent, puis en taureau pour affronter Hercule.

On le retrouve esprit-gardien, protecteur des voyageurs qui peuvent facilement faire des mauvaises rencontres et s’égarer aux carrefours, séjours des divinités multiples. Il apparaît dans ce décor de poterie gallo-romaine en terre sigillée, fabriquée à la fin du IIe siècle dans l'un des plus importants centres de production de l'est de la Gaule, non loin du Rhin (Rhenanae Tabernae, Rheinzabern, en Rhénanie).

On y lit : BIBIE,TRIBIE, QVADRVBIE. Deux, trois, puis quatre femmes debout, représentant autant de croisements de chemins, sont séparées par un serpent. A droite, deux autres serpents ondulent et s’entrelacent à l’horizontale.

Au centre, dans le cartouche, la signature du potier : CERIALIS F. Et à droite deux lettres grecques ΓΛ pour GL (?).

Henri-Paul Eydoux, dans son Hommes et dieux de la Gaule, Librairie Plon, 1961, 334 pages, p. 287, nous fait un petit commentaire :

Image

Re: Divinités Atrébates.

MessagePosté: Dim 29 Mai, 2011 21:40
de Séléné.C
J'ai cherché notre ami à bois de cerfs partout sur Persée... Je dois dire que je suis assez triste de ce que j'ai trouvé. Peu de pistes, finalement, qui m'indiquent où je pourrais continuer mes lectures...
Vais mijoter ce que j'ai déjà...

serpent = fleuve, ciel ou bien puissance souterraine ? ou les trois en même temps ?

Re: Divinités Atrébates.

MessagePosté: Lun 30 Mai, 2011 20:13
de Kambonemos
Bonjour,

Il y a ce fil de notre ami Sedullos ; tu en avais pris connaissance ?

viewtopic.php?f=6&t=5420

@+

Re: Divinités Atrébates.

MessagePosté: Lun 30 Mai, 2011 22:24
de Séléné.C
Je me souviens l'avoir lu, il y a quelques temps déjà...
Mais même si y est abordé l'aspect cyclique (j'ai trouvé via Persé deux auteurs dans ce cas), il n'y a pas vraiment d'aspect "végétation".
:| Pourtant, les bois du cerf se prêtent bien à établir un lien entre domaine végétal et domaine animal, et que dire d'un "maître de la nature" qui ne commanderait pas aussi la végétation ? Dès lors pourquoi n'en porterait-il pas un attribut ?
Les bois du cerf me semblent pouvoir en tenir lieu...

Rapport au fait que j'avais, plus haut, parlé du Cad Goddeu (Sur un coup d'énervement, d'ailleurs)
Il y a un truc qui m'est "tombé dessus" tout à l'heure, sur un coup de soleil (vive les chaleurs estivales)... Dans la pensée bouddhique (et hindhouistes, je crois), les plantes ne sont pas considérées comme faisant partie des "6 niveaux d'existence" du Samsara... Chose qui m'avait souvent paru profondément anormale car après tout, elles vivent, meurent, sans ressentir de haine (ni d'amour) et prodiguent aux être vivants leurs bienfaits (ombre des arbres, alimentation, remèdes...) sans se poser de questions.
D'où un "chpouffff" tout à coup : les plantes sont au-delà du cycle des souffrances... Dans le système bouddhique, cela les rend supérieures aux déités. Dans le système hindhouiste, je ne m'y connais pas assez. Petit déplacement indo-européen... En Grèce, il y a des nymphes-arbres et des arbres qui parlent pour donner l'oracle... Chez les celtes, on a le "combat des arbres" (énigmatique s'il en est)