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saint derven (brandivy, meucon) morbihan

MessagePosté: Ven 03 Mar, 2006 20:07
de gérard
Un des nombreux saints bretons énigmatiques: Derven.

Un village de Brandivy (département du Morbihan) est appelé sur la carte IGN 1:25000 "Saint-Derven".
JY Le Moing cite (Klask 2, p. 75): St DERUEN… en Brandivy, St DERVEN… en Meucon, St DERVEN… en Pluvigner (le même probablement que celui de Brandivy: celui de Brandivy étant à la limite de Pluvigner, à 200m de la rivière limite le Loc'h).
Pour Meucon, le St Derven cité par JY Le Moing correspond probablement au Saint-Adrien qui a sa chapelle – au titulaire romanisé?- en Meucon. Toutefois Adrien prend en principe plutôt la place de Derien. Derian, Drian(Derien en vannetais) et Derven ne semblent pas avoir de rapport. Derven est un parfait inconnu (de moi, en tout cas). On peut penser à "derùenn", = chêne, et même parfois arbre (par excellence) en breton vannetais (Bignan).
Serait-il plausible que nous ayons là un Saint-Arbre? Y a-t-il un rapprochement à faire avec le St-Déron de Ploemeur (j'ai su et oublié l'origine de ce nom, qui pourrait me la rappeler)??
Le village de St-Derven occupe une position loin d'être anodine par rapport à la ligne "Saint-Michel" de Guénin à Baden.
Pour celui de Meucon (à Cranuhac?), voir un éventuel rapport avec les voies anciennes.
Qui serait capable d'en dire plus?

Merci.
gg

MessagePosté: Ven 03 Mar, 2006 22:03
de gérard
Bon, si je fais les questions et les réponses maintenant...
Mais cela peut intéresser les amis lecteurs de l'Arbre Celtique.

J'ai trouvé une réponse dans l'indispensable "Dictionnaire des noms de lieux bretons" d'Albert Deshayes, p. 299. Et cette réponse est encore plus intéressante que ma supposition première. On aurait en effet, par fausse coupe, Saint Erven (et saint Eron à Ploemeur), le dit saint Erven à interpréter en rapprochant du gallois "erwyn" "= très blanc, très pur". Evidemment, je fais aussi un rapprochement avec Guénin, saint Guen et Maneguen.

St-Derven est à peu près au milieu de la ligne, à l'endroit où précisément je pouvais m'attendre à trouver un "saint" de ce genre.

Cordialement,
gg

MessagePosté: Ven 03 Mar, 2006 23:54
de Marc'heg an Avel
Salut Gérard,

Si tu te sens seul sur ce fil, c'est parce que le sujet est pointu et très localisé. :wink:

As tu des formes écrites anciennes ?

La recherche Erven me semble trop facile : dédoublement d'un T en t/d :

Sant Erven > Sant Derven ?

------------

Ne pourrait-on pas remonter à un hypothétique Sainct Uueruen ? si toutefois ça existe ! :roll:

C'est pour faire avancer le schmilblick ! :wink:

JCE :)

MessagePosté: Sam 04 Mar, 2006 6:01
de gérard
Mat an traoù?
Deshayes donne pour Brandivy, en 1427: Saint Nerven. On ne peut exclure le chêne, à priori donc. Il postule un nom ancien *Eruuen.

gg

MessagePosté: Sam 04 Mar, 2006 14:15
de gérard
Le résultat de mes observations de ces derniers jours et de cette matinée:

A 550m de St-Derven, on a Castelguen. Castel est souvent un toponyme marqueur de retranchements (fossés – talus) anciens. On retrouve dans Castelguen "guen" = blanc, sacré. On a aussi le village Nevédic un peu plus au nord. Si on n'a pas là l'anthroponyme Dévédec apparenté au nom vannetais de la "fauvette", on peut penser au petit "neved", le petit sanctuaire. St-Derven est précisément sur le sommet de l'angle droit du triangle rectangle 3, 4, 5 sud-ouest accolé au 8ème segment –central, 7 segments au sud, 7 segments au nord – de 2415m de la ligne courant entre la chapelle Saint-Michel de Locmiquel (frairie) en Baden et la chapelle Saint-Michel du Maneguen en Guénin. Nevédic et Castelguen sont inclus dans ce triangle. Castelguen marque le début d'une hauteur de 68m, sorte de plateau qui se prolonge jusqu'à Favizion, 71m d'alt. Le milieu du segment de valeur 3 (au sud ouest) du triangle rectangle marque la limite communale entre Plumergat (qui a une célèbre stèle octogonale en remploi avec inscription gauloise en capitales romaines, la seule du nord ouest de la Gaule) et Brandivy (avec là changement d'orientation de cette limite). Cette limite rejoint le segment de valeur 5 (hypoténuse et supposée "lieue gauloise" de 2415m) après une course quasi rectiligne d'environ 725m. Or la valeur du côté 3 du triangle rectangle est de 1449m. Ce segment de limite communale mesure donc la moitié du côté de valeur 3 du triangle rectangle. Arrivée sur le segment de valeur 5, cette limite communale change d'orientation et part vers l'est.

La carte de Cassini donne St-Derven, le Nevidic, Melin (Merleign sur carte IGN 1:25000, "lin" est souvent prononcé "leign" en vannetais), le Venier (IGN le Veniel, je soupçonne ce Venier de jouer un rôle dans le système, s'il y a système, cf. saint Venier de la chapelle Sainte-Agathe en Langon, Ille-et-Vilaine, pour peut-être Vénus), Favizon et Mastolguen (?, pour Castelguen). Qu'est-ce qu'est ce Mastol- ? On voit bien sur la carte de Cassini le plateau de Castelguen à Favizion, et aussi les limites paroissiales.

Concernant la ligne Baden-Guénin, on notera aussi qu'elle passe à moins de 30m à l'ouest de l'église paroissiale du bourg.
Enfin, on notera aussi que la ligne "Lorient-Grandchamp" coupe la ligne "Baden Guénin" à 71m du point marquant l'extrémité nord du 6ème segment de 2415m de la ligne "Baden-Guénin". Moins de 0,5% de décalage (arrivé au Maneguen, le décalage serait de 181m).

Cette coïncidence s'apparente à celle que j'ai observée au Peu Roby, dans la Creuse.

gg

MessagePosté: Dim 05 Mar, 2006 13:25
de gérard
Bonjour (soleil et beau temps à Nantes après la neige d'hier),

dimanche 5 mars 2006:
(cf. fil de discussion du forum " Histoire / Archéologie, " du site "arbre-celtique" intitulé "Borne anépigraphe de Guénin, …")

Rebondissement:
On a Fetan-Erven au pied du Maneguen (probablement près de la borne (leugaire?) anépigraphe de la voie romaine Vannes (ou Angers)-Carhaix décrite par Merlat), on a Saint-Derven à côté de Castelguen (en Brandivy, je lis Mastolguen ou Mastelguen sur la carte de Cassini)).

Trois interprétations possibles: fontaine et saint
1) de la pierre,
2) du chêne,
3) très blanc (cf. gallois "erwyn").

De toute façon, le plus important, ce sont les correspondances (que je trouve vraiment étonnantes et qui devraient être l'objet de la plus grande attention) entre les sites de Guénin et de Brandivy.

Cordialement,
gg

MessagePosté: Mar 07 Mar, 2006 10:02
de Marc'heg an Avel
Trouvé dans : Paschale Gaultier et Michel Priziac : PABU. Toponymes et patrimoine. Février 2004

p. 31 :

noté Crec'h en Nerven par l'I.G.N.
Derven, dervenn : chêne.
Crec'h an Derven : la colline où il y a du chêne; la colline de la chênaie.

------------------------------

Pour citation. Sous réserves.

Michel Priziac est un étymologiste contesté ... même quand il a raison !

Pabu est une commune du canton de Guingamp

http://marikavel.org/bretagne/pabu/pabu-accueil.htm

JCE :)

MessagePosté: Mar 07 Mar, 2006 19:17
de gérard
Merci Jean-Claude.

Je connais Michel Priziac et ses travaux, qui valent bien ceux d'autres quand on voit que les meilleurs spécialistes ont des opinions divergentes parfois (je pense au cas de La Limousinière en Loire-Atlantique, par exemple, que je développerai plus loin si j'en ai le temps dans le fil sur les Lémoviques armoricains). L'important, c'est de regarder avec "un" œil critique (donc avec "an daou-lagad dibikouset") les hypothèses et de leur accorder une notation sur une échelle de probabilité sans jamais écarter complètement ce qui pourrait sembler au prime abord farfelu.

Albert Deshayes cite aussi des Erven ou Erwen (il emploie 2 graphies différentes dans ses livres pour le même mot!) à Plouay (Morbihan), Ploéven et Quéménéven (Finistère).
J'ai regardé les cartes IGN 1:25000 correspondantes.

Il est surprenant de constater que c'est St-Coff le village (= hameau en langue noroistine) le plus proche de St-Erven, que celui de Kergonnec est à côté du Ker(h)erven de Ploéven et encore que celui de Kergonnec (pas le même) jouxte le Menez-(H)erven de Quéménéven.
En plus, j'ai découvert un Kererven à la limite de Guengat (Finistère) sur la commune de Plogonnec!
… Mais il y a aussi le terme "ervenn" (= sillon).

J'ajouterai que Quéménéven (la commendatio –portion de territoire, ou commanderie? - de M. Maen, selon Bernard Tanguy), Ploéven, Guengat ne sont pas éloignés de Locronan, du Ménez-Hom, de la forêt de Nevet.

Ken ur wech all,

gg

MessagePosté: Mar 07 Mar, 2006 23:14
de Marc'heg an Avel
Répertoire INSEE, mis en page AIEC (J-Y Le Moing. 1998) :

à la question : Derven :

22018 Derven: BRÉLIDY (T)
22063 Crech en Derven: GOMMENECH (T)
22131 Dervenic an Huré: LOGUIVY-PLOUGRAS (T)
22199 Mez an Derven: PLEUMEUR-GAUTIER (T)
29113 Coz Derven: LANMEUR (T)
56022 Saint Derven: BRANDIVY (V)
56177 Saint Derven: PLUVIGNER (V)

à la question Erven :

29229 Menez Erven: QUÉMÉNÉVEN (K)
56166 Saint Erven: PLOUAY (V)

----------

K = Kernev; Cornouaille
T = Treger; Trégor
V = Bro Wened; Pays de Vannes

-------------
JCE :)

MessagePosté: Jeu 09 Mar, 2006 16:48
de Marc'heg an Avel
A la question NERVEN,

réponse :

56101 Nervenic: LANGUIDIC (V)
56101 Nervenic Izel: LANGUIDIC (V)
56146 Nervenic: NEUILLAC (V)

donc tous en vannetais.

JCE :)

MessagePosté: Jeu 09 Mar, 2006 18:21
de Patrice
Salut,

je pense au cas de La Limousinière en Loire-Atlantique, par exemple, que je développerai plus loin si j'en ai le temps dans le fil sur les Lémoviques armoricains



Si tu penses attribuer la Limousinière à des Lémovices, attention, car les toponymes en -ière sont tous tardifs (Moyen Age central). Ils ont succédé aux formations en -villa qui eut même ont remplacé les -acum.

-ière est un suffixe typiquement français. Pour chercher des Lémovices, il vaut mieux chercher des formes de type Limoux, Limeux, etc.

A+

Patrice

MessagePosté: Jeu 09 Mar, 2006 19:35
de gérard
Bonjour,

Je sais bien Patrice. Mais on a des cas où le suffixe change selon les époques (question de mode?), accolé à un même radical.
La première attestation de la Limouzinière est Lemouicina, latinisation abusive? Date: 1059. Les suffixes en -ière sont semble-t-il plus tardifs. Peut-être une erreur d'attribution de Lemouicina à la Limouzinière (fiabilité de l'attribution et de la lecture/leçon?) ?
La Limousinière de Vendée a une autre explication.
JY Le Moing (et l'érudit local E. Boutin) soutient la thèse de alimosinaria (l'aumônerie). JL Le Quellec, du moins pour la Limousinière de Vendée, démolit cette hypothèse apparue en 1904 pour la commune vendéenne. JY Le Moing ne me convainc pas. Les Hospitaliers ont été créés vers 1050. Quel médiéviste pourrait nous dire s'il existait des Aumôneries avant 1059? Y a t il d'autres exemples en toponymie? Les arguments de Michel Kervarec me semblent plus forts. Le texte de César et les travaux numismatiques de Hiernard pourraient appuyer l'hypothèse des Lémoviques armoricains. La Limouzinière est en outre au sud immédiat de Déas (St-Philbert-de-Grandlieu de nos jours), qui semble avoir joué un important rôle dans le passé gallo-romain. Kervarec, si j'ai bien compris, pense que le nom de Lemouicina s'appliquait à la région autour de Déas.
Tous ces éléments pour la réflexion.

Cordialement,

gg

MessagePosté: Jeu 05 Juil, 2007 17:17
de gérard
Quelques observations de plus sur la ligne "Michel" Guénin-Baden.

Un des 4 triangles rectangles aux côtés de proportion 3, 4, 5 qu'on peut accoler au premier segment de 2414,9m de la ligne "Saint Michel" Guénin-Baden (Morbihan, Vannetais), celui ayant le sommet de son angle droit au sud-ouest, a le sommet de cet angle droit situé à 170m d'un hameau appelé Locmiquel, en Guénin, précisément au bord de la rivière Evel (rive gauche). L'angle sud a son sommet à 130m du hameau appelé Keriquel.
A priori ce Keriquel est une "villa de Jézéquel". Deshayes le classe ainsi dans son dictionnaire des noms de lieu bretons, sans toutefois donner une forme ancienne au toponyme comme il le fait pour la plupart des autres Keriquel mentionnés par lui qui ne laissent guère de doute quant à la présence étymologique de "Jézéquel" dans le deuxième élément de ces "Keriquel". La carte de Cassini donne la même forme Keriquel, elle aussi. Deshayes mentionne par ailleurs à Surzur (toujours en Vannetais) le hameau Kerviquel (avec une forme ancienne identique), qu'il classe dans la catégorie "ker + Miquel" (Michel). Dans le "Keriquel" de Guénin, un v issu de la mutation lénifiée de m en v, régulière en breton derrière ker-, aurait-il pu s'amüir?

Le triangle rectangle nord-est du 2ème segment de 2412,9m appuie lui aussi le sommet de son angle droit sur un cours d'eau, le ruisseau de Tallené, rive gauche, qui sert de limite communale entre Guénin et la Chapelle Neuve, trêve de Plumelin, et qui est un affluent du Tarun et un sous-affluent de l'Evel.

[ruisseau de Tallené est à rapprocher des hameaux Tal-Len et Tellené situés de part et d'autre d'un étang artificiel créé sur le ruisseau: (e-) tal (al) lenn = en front de l'étang, Tellené est probablement pour Tal-Lennig = le petit Tal-Len.]

La pointe sud (extrémité sud du 2ème segment) de ce 2ème triangle rectangle est sur le territoire de Baud, mais à 100m de la limite communale avec la Chapelle Neuve.

Cours d'eau, Locmiquel, cours d'eau limites, limites communales héritières de limites paroissiales très anciennes…

Le Manéguen, un pivot géographique?

La voie romaine Angers-Carhaix (trouvaille en cet endroit d'une borne –leugaire?- anépigraphe) passe au pied sud du Manéguen ("mont blanc" = "sacré") sur lequel trône une chapelle Saint-Michel.

Selon E. Vallerie, vers le sud-ouest du Manéguen (sauf la partie est de Guénin), Baud, Guénin, Saint-Barthélemy et la moitié nord de Camors auraient formé une paroisse bretonne primitive. Au nord du Manéguen, Pluméliau, Remungol et Moustoir-Remungol en auraient formé une autre. Enfin, vers le sud-est, la Chapelle-Neuve, Plumelin, Moustoir-Ac et la majeure partie (celle du sud) de Locminé en auraient formé une troisième.

a+

gg

MessagePosté: Ven 06 Juil, 2007 11:42
de gérard
Cette note est plus archéologique que linguistique, mais s'inscrit dans la continuité du fil.
En épluchant l'Histoire rurale des Vénètes armoricains (P. Naas, 1999), je
découvre l'existence du gué du Tron. Coincidence ou pas:

La 12e LG de "Guénin-Baden" aboutit à N 47°39,385' W 2°55,316' soit à 250m à l'est du gué du Tron sur la rivière de Bono (gué du Tron, Naas, HRVA, 1999, note de la page 29 qui renvoie à Rialan, 1924, Découvertes … dans le Morbihan de 1886 à 1892, BSPM, pp29-71).
On lit le cheminement probable de la voie ancienne sur la carte 1/25000 de l'I.G.N. Bourg de Plougoumelen, le Tron (gué sur la rivière de Bono), en Ty-Nuhuy (= la Maison-Neuve), le village de Ste-Avoye avec sa célèbre chapelle, un peu au sud de Kerdaniel, à l'ouest de Kerisper (présence d'un château), la pointe de Kerisper d'où partait l'impressionnant aqueduc romain (travail de romain mais inachevé à cause de son coût probablement) qui a laissé ses piles dans le lit de la rivière d'Auray et sa trace toponymique de l'autre côté de la rivière d'Auray en Locmariaquer à Rosnarho, le "côteau des arches").

gg

MessagePosté: Ven 06 Juil, 2007 11:48
de gérard
erratum:
Rosnarho est en Crach.
gg