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Icovellauna: la bonne eau ou la grande Victoire?

MessagePosté: Lun 19 Mar, 2007 22:00
de Scrupulum
Bonjour!

Je ne suis très calée en linguisitique et je consulte en général le dico de Delamarre en toute confiance, laissant les mystères de la linguistique à d'autres que moi. :129:
En ce moment, je m'intéresse au sanctuaire du Sablon près de Metz, qui a livré tout un lot d'inscriptions à la déesse Icovellauna.
En général (Duval, etc...), on la présente comme une déesse de l'eau bienfaisante. Il faut dire que les inscriptions ont été trouvées dans une sorte de puits (une pièce hexagonale semi-enterrée).
Le puits en question n'était apparemment pas sur une source.
Le site comporte ses mystères, mais apparemment la divinité aussi...
Delamarre, dans son dictionnaire donc, donne une interprétation complètement différente de la déesse.

Il découpe ainsi:

Ico- le Pic (?)
-uellaunos - le chef, celui qui règne

Du coup, les fonctions de la déesse en deviennent complètement différentes.

J'aimerais savoir si certains d'entre vous ont des idées sur la question... :65:

à +

MessagePosté: Lun 19 Mar, 2007 23:05
de Marc'heg an Avel
salut,

chez Rivet & Smith (Place-names of Roman Britain), sous l'artcicle consacré aux ICENI, j'ai une entrée à partir de *iak- = healthy = santé;

------------------

en breton : Yec'hed Mat = Bonne santé / à votre santé = à la votre.

à suivre.

JCE :biere:

MessagePosté: Lun 19 Mar, 2007 23:10
de Alexandre
icos = montagne est plutôt bien assis. Je m'en suis déjà servi sur un autre problème : http://www.forum.arbre-celtique.com/viewtopic.php?p=42005&highlight=#42005
vellaunos est postulé comme dérivé de *bélon = force, sur une idée du chef "homme fort" établie par ailleurs.
Il me paraît intéressant de remarquer que le dieu indien S'iva et le dieu grec Διóνυσος, tous les deux illustrations du dieu de la sorcellerie, sont tous les deux qualifiables comme "amis de la déesse de la montagne" (resp. Artemis et Parvita), et que tous les deux ont leur pouvoir résidant sous l'eau (cf. Apam Napat en Inde et en Perse). Si le sanctuaire du Sablon est bien un bassin, il pourrait bien être une reconstitution de ce genre de mystère dans un contexte celtique.

MessagePosté: Lun 19 Mar, 2007 23:55
de Sedullos
Salut,
Nicole Jufer et Thierry Luginbühl répertorient cinq inscriptions à Malzéville (France) et une à Trèves. Ils la classent dans la catégorie des déesses topiques ou tutélaires et la considèrent comme une source vénérée en tant que divinité féminine chez les Mediomatrices de la Gaule belgique, au même titre que Sequana aux sources de la Seine et Coventina sur le mur d'Hadrien. Ils précisent : "Beaucoup plus nombreuses que leurs équivalents masculins, les divinités topiques ou tutélaires féminines sont attestées dans toutes les provinces celtiques et représentaient aussi bien des cours d'eau ou des sources que des villes ou des montagnes".

Les dieux gaulois : Répertoire des noms de divinités celtiques connus par l'épigraphie, les textes antiques et la toponymie / Nicole Jufer, Thierry Luginbühl .- Paris : Errance, 2001. - 131 p. [titre de couverture = Répertoire des dieux gaulois], p. 15 et 45.

MessagePosté: Mar 20 Mar, 2007 0:05
de Scrupulum
Le site n'est pas vraiment un bassin, c'est en fait une grande salle semi-enterrée: on y accède par des marches. Au centre, il y a effectivement un bassin avec un trou... le problème, c'est que les fouilleurs précisent bien qu'il n'y a pas de source. L'eau trouvée dans le bassin est apparemment celle des nappes phréatiques.

Le site a été fouillé de 1879 à 1882 par un entrepreneur allemand (G. May) sur le terrain de sa sablonnière... à cette époque la Lorraine était allemande et donc la publication du site est en allemand... :? :

Möller F., ‘Ein Nymphaeum in Sablon bei Metz’, dans Westdeutsche Zeitschrift für Geschichte und Kunst II, 1883, p.249-287.

En fait, j'aimerais pouvoir coller les relevés qui existent mais je n'ai pas encore trouvé le moyen d'insérer une image dans mes messages... :60:

MessagePosté: Mar 20 Mar, 2007 0:14
de Scrupulum
Salut Sedullos!!

Les inscriptions de Malzeville sont en fait celles du Sablon! Apparemment, il y a une erreur dans le répertoire de Jufer et Luginbuhl...

La commune est en réalité Montigny-lès-Metz... Le nom Sablon (nom du lieu-dit en fait) vient du fait que c'est une Sablonnière. C'est juste au sud de Metz.

Et effectivement la déesse est aussi attestée par une inscription de Trèves...

Mais ça reste mystérieux tout ça... Une divinité de source, sans source... et qui se déplace chez les Trévires... :?:
Bref, cette histoire de source pose un problème, il est vrai cependant que les Anciens pouvaient aussi accorder des propriétés salutaires aux eaux stagnantes... ce qui a l'air d'être le cas au Sablon.

MessagePosté: Mar 20 Mar, 2007 0:58
de Sedullos
Il n'est pas impossible que les Mediomatrices et les Trévires aient partagé des sanctuaires et des divinités. Il me semble que cette question a été évoquée, à propos de Nasium = Naix-aux-Forges chez les Leuques, mais où ?

MessagePosté: Mar 20 Mar, 2007 1:00
de Sedullos
Pourquoi ne pas considérer qu'on a affaire à une divinité souveraine, comme la Boyne en Irlande, ça poserait moins de problème ?

MessagePosté: Mar 20 Mar, 2007 1:46
de Alexandre
Mais comment expliques-tu son nom dans ces condtions ?

MessagePosté: Mar 20 Mar, 2007 9:50
de Pierre
Salut à tous,

Pour les chanceux la réponse est dans cet ouvrage, page 54 à 58 :wink:

Les noms d origine gauloise - La Gaule des dieux



@+Pierre

MessagePosté: Mar 20 Mar, 2007 9:58
de Scrupulum
Merci, Pierre pour la réf...
En fait, j'attends avec impatience qu'il arrive à la bibliothique... dans quelques jours m'a-t-on dit! :D

Pas vraiment le temps maintenant de réagir par rapport à certaines de vos réflexions... Mais je reviendrai ce soir :roll: !

Cette histoire d'image que je n'arrive pas à importer m'agace!!
J'aimerai pouvoir vous montrer à quoi ressemble le site!!
Est-ce que l'un d'entre vous pourrait m'expliquer??? J'ai l'impression qu'on ne peut faire apparaître que des images qui sont déjà sur le net...
La mienne est dans mon ordinateur et au format JPEG!
Désolée pour ce laïus informatique, mais je pense que ça pourrait être utile à la discussion...

MessagePosté: Mar 20 Mar, 2007 10:11
de Patrice
Salut,

En fait, la description du lieu de découverte fait presque penser à la structure d'un mithraeum, avec une salle basse et des banquettes...

Sur le nom, Claude Sterckx a du écrire quelque chose. Je vais chercher ça.

A+

Patrice

MessagePosté: Mar 20 Mar, 2007 10:16
de Patrice
Re-Salut,

Déjà, en français, il y a cette publication:

Charles Abel: La Dea Icovellauna et la Dea Victoria au Sablon, près Metz, Mémoires de l'Académie de Metz, 1894, 1891-1892, p. 201-209.

Il signale non loin du lieu de découverte de cette déesse un autel dédié à Mogontia et une statue de Victoire.

Pour les inscriptions, voir CIL XIII 4294-4298 (Malzeville), et CIL XIII 3644 (Trèves).

Pour l'Alsace, la Lorraine et d'une manière générale l'Allemagne, le Luxembourg et l'Autriche, les localisations données par Jüfer et Luginbuhl sont à prendre avec de grandes précautions: leur géographie est celle du CIL, donc celle d'avant la guerre 14-18.

A+

Patrice

ya un Ik-

MessagePosté: Mar 20 Mar, 2007 11:01
de Matrix
Bj
il y a deux directions de recherche pour le suffixe Iko-
:arrow: Iko- = Pic/Pointe/Pointu
Arica = Ile Hoédic = ?
Ar-iconium en GB = ?
Ic-iacus = Issac/Issey/Issy
Ic-iniaco = Itzing (Allemagne)
Icio-magos = Usson (Loire)
Icio-durum =Issoire (Puy de Dôme) et Yzeure (Cruese)
Ico-rigium = Jünkerath ?
Noms de personnes
Icia = ?
Ico-rix = ?
Icotiae Dea = Divinité ?

:arrow: Iko--I(n)ko- = Eau/cours d'eau si l'on en juge aux répétitions en -Iko- des noms de rivières, il doit y avoir une relation avec l'eau (Gué/Port ?) à moins qu'il ne faille reprendre le premier élément (Pointe < avancée dans l'eau/promontoire)
Atur-ico = Ourcq ?
Autr-icum = Chartres = ?
Auar-icum = Bourges = ?
Longat-icum = Logatec Slovénie = Le port de la flotte ?
Auant-icum = Avenches/Avançon
Ico-tarion en Galatie = littérallement "le traverse fleuve" < gué ?
Ic-aunis/Ic-auna = Yonne
Ico-tasgo = Nom d'homme = qui va sur l'eau < le marin ? (Cf *Steigo = Aller)
Ico-uici = nom d'homme = qui vainc dans l'eau = marin combattant (cf longo-uicum = la flotte de guerre)
et donc en relation avec les Equo/Ico-randa

En déclinaison avec -Ink
Abr-inca/Obr-inca cf les Abr-inc-atui = ceux de l'estuaire (adbero+ -Inc+ate)
Bod-incus = Pô = Le jaune/Maronnase/Fleuve frontière/Le fleuve colérique ?
Durot-incum = ?
Lem-incum = Leyment (Ain)
Reg-inca = Rance Manche

Mais cela se complique avec les noms en déclinaison Ikko- (mais peut être autre signification ?)
noms = Iccalus/Iccauos (Ic-cauos ? cf les Ande-caui < grands alliés/protecteurs ?)/Iccia/Iccianus/Iccius/Icco/Icconius/

MessagePosté: Mar 20 Mar, 2007 11:23
de Alexandre
Je crains que tu ne fasses des mélanges...

Pour le début, icos = pointe, tout à fait d'accord, comme j'ai dit plus haut.

Il faut se souvenir que dans les langues indo-européennes, "en pointe" signifie rapide (*h2ékwos = cheval, sur *h2ek- = être pointu, grec θοóς = rapide ou pointu...) En conséquence, le sens de rapide explique certains composés (Icotasgo = qui marche rapidement, Icovici = qui vainc rapidement...)

Plusieurs mots en -icum me semblent avoir grandes chances d'être le produits d'une suffixation analogue au grec -ικος

Enfin, je ne vois pas comment on peut postuler une équivalence entre -icos et -incos : seule une forme verbale peut (parfois) s'autoriser ce genre d'infixation.