bienpublic.com, le 20/03/2012 par Emmanuel Hasle, a écrit: Interview croisée par Emmanuel Hasle - Edition. Silvio Luccisano, coscénariste, et Christope Ansar, dessinateur, de la BD Alésia.
« Une bataille incroyable » Silvio Luccisano, à gauche, au côté du scénariste Christophe Ansar (au centre). Photo SDR
A six jours de l’ouverture au public du MuséoParc d’Alésia, nous avons rencontré l’un des scénaristes et le dessinateur de l’album de bande dessinée Alésia. Qu’est-ce qui vous a attiré dans ce projet de bande-dessinée sur Alésia ?
Silvio Luccisano : « Je suis un passionné de cette période de la Guerre des Gaules. Je m’intéresse à ce sujet depuis de très nombreuses années, j’ai visité le site il y a très longtemps déjà, et à plusieurs reprises. Et lorsque j’ai su que le MuséoParc allait être créé, je me suis rendu sur place, j’ai pris un rendez-vous avec Claude Grapin (le conservateur du patrimoine au sein de la Mission Alésia, ndlr) pour lui présenter un album que je venais juste de sortir sur les Gaulois, c’était en 2005. Je lui ai alors proposé un scénario sur la bataille d’Alésia, dans le même style que l’album que j’avais réalisé sur les Gaulois. »
Avez-vous rencontré des difficultés particulières pour raconter Alésia ? Quelles ont été vos priorités ?
Silvio Luccisano : « Oui et non. On a dû allonger l’album de quelques planches, car il y avait beaucoup de choses à dire en fait. Alésia est une histoire dense. Les priorités ont porté sur les faits historiques majeurs et connus. En même temps, comme nous avons travaillé en co-édition avec le MuséoParc, j’avais quelques recommandations que m’avait faites le conservateur. Il s’agissait par exemple des reconstitutions, la vie des gens à l’intérieur de l’oppidum et éventuellement celle des légionnaires durant le siège.
Quant aux difficultés, elles étaient plutôt liées au graphisme. Il fallait associer les données archéologiques à un dessin réaliste et faire en sorte que tout soit retranscrit le plus fidèlement possible. Ce qui n’est pas forcément facile pour un dessinateur ; ça a demandé un gros travail de correction, de reprise de certains dessins. »
Vous êtes-vous inspiré directement des recherches archéologiques ?
Silvio Luccisano : « Tout à fait. Mon optique était de faire quelque chose qui colle le plus possible aux dernières données de l’archéologie de terrain. »
Christophe Ansar : « Oui, complètement. Silvio a fait un gros boulot de documentation, il a poussé le curseur assez loin. Et puis on avait le conseil scientifique du MuséoParc qui validait les planches. Vu de ma table à dessin, ce fut parfois un peu lourd, toutes ces corrections et ces reprises, surtout au début, d’autant que c’était une époque sur laquelle je n’avais pas encore travaillé. Les costumes sont très différents, je n’avais pas encore travaillé sur les Gaulois de l’époque césarienne… »
Combien de temps vous a pris la réalisation de cette BD ?
Silvio Luccisano : « Nous avons commencé en 2008, dès que nous avons signé le partenariat. Mon travail de recherches avait commencé bien avant, mais les premiers dessins ont été réalisés en mai 2008. La bande dessinée a été publiée en octobre 2011. Ce qui représente donc plus de trois ans de travail. »
Christophe Ansar : « Très exactement 4 058 heures de temps de travail ! Qui se sont étalées sur deux ans et demi, à la planche. Il faut compter en moyenne 60 heures par planche, entre le crayonné, la mise en place, les corrections, l’encrage… »
En tant que scénariste, comment avez-vous travaillé avec le dessinateur Christophe Ansar ?
Silvio Luccisano : « On se voyait environ une fois par mois : j’apportais le découpage, on travaillait sur les corrections que nous avait données Claude Grapin sur les planches précédentes. »
A votre connaissance, y a-t-il déjà eu des bandes dessinées sur Alésia ?
Silvio Luccisano : « Il y a eu quelques bandes dessinées qui sont sorties sur la période, avec par exemple Alix, de Jacques Martin. Mais, à ma connaissance, et en toute modestie, je crois que c’est la première bande dessinée qui traite le sujet de façon aussi pointue. »
Réaliser une œuvre sur Alésia, qu’est-ce que cela vous a apporté à titre personnel ?
Christophe Ansar : « C’est avant tout pousser mon dessin. Le travail avec les archéologues, pour moi, ça a été une vraie découverte. Ce qui me permet d’ailleurs de travailler aujourd’hui avec l’Inrap (l’Institut national de recherches archéologiques préventives) sur d’autres projets. Je suis devenu le Gaulois de service à l’Inrap, j’ai fait quelques travaux d’illustration pour eux. Et puis ça a été aussi un changement de scénariste. C’est forcément enrichissant, d’autant que la vision qu’a Silvio de la Rome de cette époque est différente. Quand on aime l’Antiquité, c’est toujours intéressant de confronter toutes ces données et ces connaissances avec d’autres personnes. »
Maintenant que l’album est fini, que représente pour vous Alésia ?
Christophe Ansar : « Avant tout, un énorme boulot pour moi, parce que ça a été assez dense au fil de ces trois années. La quantité d’informations à ingurgiter a été assez impressionnante ! Aujourd’hui, j’ai une vision beaucoup plus précise de ce qu’a pu être ce siège. Et d’un point historique, c’est cette grande bataille incroyable, qui rassemble entre 350 000 et 500 000 hommes ! Et ça, à cette époque-là, ça reste quelque chose d’impressionnant… »