|
Connacorix / Konnakorix / Κοννακόρηξ - Commandant de la garnison à Héraclée du Pont (Bithynie, Anatolie), très probablement un Galate d’Asie Mineure, au service de Mithridate VI, chargé de défendre Héraclée du Pont. Selon Photius, Bibliothèque (LXXI-LXXVI), il assure initialement la défense d'Héraclée contre Cotta et Triarius. Son opposition aux Romains est relative : il laisse ses soldats maltraiter les habitants et tente de négocier pour son profit personnel. Profitant du silence de la nuit, il abandonne la garnison et la ville, permettant aux Romains de prendre Héraclée, la piller et la détruire. Après cette trahison, il s'empare ensuite de Tlos et Amastris, qu'il obtient par capitulation. Sa manoeuvre lui permet de se retirer librement avec la garnison, justifiant sa trahison par la défense de ces villes.
Le nom nous est probablement parvenu altéré. Seul le suffixe -rix ("roi, chef) est immédiatement reconnaissable. Le reste du nom semble d'origine celtique, mais difficile à interpréter :
*connaco- / *conno-co- → "tête avec", que nous pourrions interpréter par "qui est à la tête des rois" → "roi suprême". *con-aco → "celui qui est un chien" (chien = guerrier) → "roi des guerriers / roi guerrier". Ces hypothèses étymologiques sont toutefois très spéculatives, mais elles correspondent bien à son rôle historique de chef militaire et stratège opportuniste.
Sources littéraires antiques.
| Photius, Bibliothèque, LXXI : "Cotta de son côté continuait de bloquer Héraclée, il ne l'attaquait point encore avec toutes ses forces, mais seulement par des détachements où il y avait toujours beaucoup plus de Bithyniens que de soldats Romains. Cependant comme il vit que la plupart revenaient blessés et qu'il ne laissait pas de perdre beaucoup de monde, il résolut de faire avancer ses machines et entre autres, une tortue qui semblait devoir être redoutable aux assiégés. Marchant donc avec toutes ses troupes, il fit dresser la tortue contre une tour qui lui paraissait n'être pas de grande résistance ; mais il y fut trompé: le bélier ayant été lancé deux fois, non seulement la tour résista, contre l'attente des assiégeants, mais à sa troisième fois, la machine elle-même fut ébranlée et le bélier, qui en était la principale pièce, se rompit. Cet accident donna un nouveau courage aux Héracléens, en même-temps qu'il décourageait Cotta, qui désespérait presque de prendre la place. Toutefois le lendemain il voulut redoubler les efforts et faire encore usage de la tortue; mais ce fut avec tout aussi peu de succès. Alors de dépit il ordonna que l'on mit le feu à cette machine de guerre, fit trancher la tête aux charpentiers qui l'avaient construite, laissa un corps de troupes devant la place, pour la tenir toujours bloquée et alla avec le reste camper au Lycée, lieu peu distant, mais abondant et fertile, d'où ravageant le pays d'alentour, il augmenta beaucoup la misère qui se faisait déjà sentir dans Héraclée. Les habitants réduits à ce fâcheux état, députèrent une seconde fois aux Scythes, aux peuples de la Chersonèse, aux Théodosiens et à plusieurs Princes du Bosphore, pour leur demander du recours. Les Députés, à leur retour, donnèrent de grandes espérances, mais le mal était pressant; car pendant que les ennemis attaquaient la ville au dehors, les habitants avaient beaucoup à souffrir au dedans. Les soldats de la garnison voulurent être nourris autrement que le peuple; ils maltraitaient les citoyens, exigeant d'eux l'impossible. Pour comble de malheur, Connacorix leur Commandant, bien loin de les réprimer, semblait les autoriser."
|
| Photius, Bibliothèque, LXXV : "Dans cette extrémité, Connacorix résolut de livrer la ville aux Romains et de faire sa condition meilleure aux dépens des citoyens, il mit dans la confidence un Héracléen nommé Damophile, qui avait toujours été le rival de Lamachus et qui, par la mort, était devenu Préteur de la ville. Mais comme il connaissait Cotta pour un homme dur et sans foi, il voulait traiter à son insu avec Triarius, en quoi Damophile le secondait de tout son pouvoir. Tous deux donc s'ouvrent à Triarius, ils en obtiennent des conditions avantageuses pour leur personne et pleins de l'espérance d'une meilleure fortune, ils prenaient déjà des mesures pour exécuter leur trahison, lorsqu'un bruit lourd s'en répandit dans Héraclée. Aussitôt il se fait une assemblée du peuple et le Commandant de la garnison est prié d'y venir prendre séance. Quand il fût arrivé, Brithagoras, homme distingué parmi les Héracléens, lui adressant la parole, expose le mauvais état de la ville, la nécessité de songer à l'intérêt commun des habitants et de faire des propositions d'accommodement à Triarius ; il finit par l'en prier, l'en conjurer. Alors Connacorix se lève et ouvrant un avis tout contraire, il dit que pour lui il ne voit aucun sujet de désespérer, ni du salut, ni de la liberté ; que la fortune pouvait changer et qu'il n'était pas encore temps de se rendre ; qu'en effet il avait reçu des lettres de Mithridate, par lesquelles il paraissait que ce Prince était fort bien avec son gendre et qu'incessamment il obtiendrait un puissant secours qui le mettrait en état de rétablir ses affaires. C'est ainsi que le perfide Connacorix jouait l'assemblée; cependant comme on croit volontiers ce que l'on souhaite, le peuple sortit, persuadé que l'on pouvait encore attendre. Quand le traître vit que son discours avait eu l'effet qu'il en espérait, profitant du silence de la nuit, il embarque tous les soldats de la garnison sur des galères et se sauve avec eux ; car tel était son traité, qu'ils pourraient en toute sûreté se retirer où ils voudraient et emporter avec eux ce qu'ils auraient pu gagner par leur service. Pendant ce temps-là Damophile ouvre les portes à Triarius; les Romains entrent en foule, quelques-uns escaladent les murs qu'ils trouvent sans défense, en un moment la ville est pleine de soldats, ou plutôt d'horreur et de carnage. Alors, mais trop tard, les Héracléens connaissent qu'ils se sont laissés tromper; les uns s'abandonnent à la merci des soldats, les autres sont impitoyablement massacrés; leurs maisons, leur argent, leurs meubles, tout est pillé, tout devient la proie de l'ennemi, qui se rappelant avec quel acharnement les galères d'Héraclée avaient combattu contre lui et les peines qu'il a essuyées durant un si long siège, en prend droit d'exercer toutes sortes de cruautés contre ces malheureux citoyens : rien ne peut le retenir, il égorge jusqu'au pied des autels, ceux qui pensaient y trouver un asile."
|
| Photius, Bibliothèque, LXXVI : "Cotta ensuite ayant appris que Connacorix s'était emparé de Tlos et Amastris, donna ordre à Triarius d'aller l'en chasser. Pour lui, demeuré maître d'Héraclée, après s'être assuré de tous les prisonniers de guerre et de ceux qui voulaient se rendre, il traita la ville avec la dernière rigueur, fouillant partout dans les maisons, même dans les temples, d'où il enleva grand nombre de belles statues et de riches ornements. Il y avait dans le marché un Hercule adossé contre une pyramide, c'était une statue admirable, qui pour sa grandeur, pour la richesse de la matière et la beauté de l'ouvrage, ne le cédait à pas une autre des plus renommées; la statue d'Hercule était d'or massif, la peau du lion qui lui couvrait les épaules, son carquois, son arc et ses flèches étaient aussi d'or. Cotta la fit enlever, avec une infinité de choses précieuses qu'il avait tirées, soit des places publiques, soit des maisons particulières ; il en chargea ses vaisseaux, après quoi il fit mettre par les soldats, le feu aux quatre coins de la ville. C'est ainsi qu'Héraclée fut prise, saccagée et détruite, après deux ans de siège. Cependant Triarius exécutait ses ordres, en le rendant maître d'Amastris et de Tlos; il les prit toutes deux par capitulation et Connacorix, qui avait prétendu couvrir sa trahison du prétexte de les aller défendre, eut la liberté de se retirer où il voudrait." |
|