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Encyclopédie Celtique

Cularo / Gratianopolis (Grenoble)

Les villes Celtiques
Nom antique:Cularo / Gratianopolis
Nom actuel:Grenoble
Ville:Grenoble
Localisation:Isère
Peuple:Tricores ? Allobroges / Viennenses, puis Cularonenses
Etymologie:(1) le champ de courges / concombres ; (2) le domaine de Cularos
Superficie:15 ha au Haut-Empire ; 9 ha au Bas-Empire


Cularo - Nom antique de Grenoble (Isère). Ce toponyme ne fut mentionné qu'à l'ablatif-locatif, sous la forme Cularone (var. Cuiarone) dans une lettre de Lucius Munatius Plantus à Cicéron (Cicéron, Lettres aux familiers, X, 23) et Culabone sur la Table de Peutinger. Par la suite, on le retrouve sous des formes très dégradées sur les documents ultérieurs ; Calaronae sur le Registre des dignitaire (XLII, 17) et Curarore dans la Cosmographie de Ravenne. Quelques sources épigraphiques mentionnent également ce lieu sous les formes STAT(IONIS) CVLARON(IS) (CIL 12, 2227), MVRIS CVLARONENSIBVS (CIL 12, 2229) et STATIO[I]NIS CVLAR(ONIS) (CIL 12, 2252). Ces documents permettent de déterminer que ce toponyme était Cularō au nominatif. Dans un premier temps, X. Delamarre (2003) a rapproché ce nom du gaulois *cularo(n)-, qui signifie "courge / concombre" et a proposé de traduire ce toponyme par "champ de courges". Cette hypothèse se heurte néanmoins au fait que ce nom n'est pas au genre neutre, comme on l'attendrait d'un toponyme. Par la suite, X. Delamarre (2012 ; 2013 ; 2017 ; 2019) a indiqué que ce nom appartient une famille de toponymes faisant exception, caractérisée par un suffixe nasal au nominatif (supposant une finale gauloise ) et un genre animé. Le prototype de ce nom devait donc être *Cularū. L'étude des toponymes en nasale a conduit X. Delamarre à conclure qu'ils sont manifestement formés sur des théonymes, ce qui explique certainement l'originalité de leur genre. *Cularū n'y fait pas exception, et semble se rapporter à un hypothétique dieu *Cularos "la courge". Ainsi, le nom de cette localité pourrait également se traduire par "(le domaine) de (du dieu) Cularos".

Cularo fut longtemps une modeste bourgade, dont on peut supposer qu'elle relevait originellement du territoire des Tricores. Au début de l'époque romaine, le territoire de ces derniers fut rattaché à celui des Allobroges, comme en témoigne la plus ancienne mention de cette localité, dans une lettre de Lucius Munatius Plancus à Cicéron, datée du 6 juin 43 av. J.-C., et rédigée depuis Cularone, ex finibus Allobrogum "depuis Cularo, en territoire allobroge" (Cicéron, Lettres aux familiers, X, 23). Lorsque la cité des Allobroges fut érigé en colonie latine, la colonie des Viennenses, Cularo connut un véritable essor. Le supposé vicus (1) de Cularo se développa principalement sur la rive gauche de l'Isère, près de la confluence avec le Drac, et mit à profit sa position remarquable. En effet, l'Isère y est encore navigable et franchissable par un pont. En outre, cette localité se trouve au carrefour de deux importantes voies de communication reliant l'Italie à la vallée du Rhône (par le col du Petit-Saint-Bernard et celui du Montgenèvre), ce qui en faisait un point de rupture de charge. Compte-tenu du fait que la ville moderne repose sur les vestiges de la ville romaine, les quelques campagnes de fouilles effectuées ne permettent pas de se faire une idée claire de l'aspect de la ville au Haut-Empire. Les archéologues apprécient ce développement de manière directe à partir des vestiges ténus fouillés, ou de manière plus indirecte, à partir les éléments découverts en réemploi et des inscriptions découvertes sur des monuments funéraires. Ces indices permettent d'assurer que marchands, transporteurs, bâteliers, tisserands, etc. fréquentaient ce lieu, lui faisant bénéficier d'une certaine prospérité (Rémy & Jospin, 2002 ; 2006 ; Jospin, 2005 ; Bonfand, 2017). Aussi, l'importance des échanges qui s'y effectuaient incita les Romains à y installer un poste douanier du 40e des Gaules, chargée de percevoir 2,5% de la valeur des biens qui y transitaient (CIL 12, 2227 & 2252). Enfin, le vicus fut visiblement doté d'une parure monumentale dont les archéologues ont observé ça et là, les vestiges ténus, le plus souvent hors-contexte (Rémy & Jospin, 2002 ; 2006 ; Jospin, 2005). À son apogée, cette petite agglomération couvrait une superficie modeste, d'environ 15 hectares (Leveau, 2005).

À l'occasion d'une des réformes administratives qui touchèrent l'empire à la fin du IIIe ap. J.-C., deux nouvelles cités furent déduites de celle des Viennenses ; la cité des Genavenses et la cité des Cularonenses. Dans ce cadre, Cularo changea du statut, pour devenir la métropole de la dernière de ces cités (Rémy & Jospin, 2006). Ce changement entraîna un profond bouleversement dans l'urbanisme de cette ville, puisque celle-ci a vu sa surface notablement diminuée (autour de 9 hectares), pour être ceinte d'un imposant rempart, haut de 9 à 10 mètres, long de 1150 mètres, et flanqué d'une trentaine de tours de guet semi-circulaires. La synthèse publiée par F. Baucheron et al. (1998) portant sur les recherches archéologiques menées sur cette enceinte invite à penser que le début de sa construction remonte au règne de Probus (276-282 ap. J.-C.). Elle ne fut terminée que plus tard, du temps de Dioclétien et Maximien Hercule (2), qui s'en seraient attribués l'honneur, comme le démontraient les inscriptions qui surmontaient les deux portes de la ville (CIL 12, 2229).

Aussi, quelques indices montrent que cette ville abrita occasionnellement une garnison à partir du milieu du IIIe s. ap. J.-C. Le Registre des Dignitaires indique quant à lui que la cohorte I Flavia Sapaudica (probablement levée dans cette région du temps de Constantin Ier) y était cantonné de manière permanente (Rémy & Jospin, 2006).

À la fin du IVe s., Cularo prit le nom de Gratianopolis, "la ville de (l'empereur) Gratien", duquel la ville actuelle tire son nom. Le plus ancien témoin de ce changement sont les Actes du concile d'Aquilée (381), qui mentionnent l'évêque Domninus (saint Domnin) comme [episcopus] Gratianopolitanus (Dauzat & Rostaing, 1979). En conséquence, la cité des Cularonenses prit à son tour le nom de cité gratianopolitaine (ciuitas Gratianopolitana). L'origine de ce changement fait toujours débat, et certains veulent y voir la conséquence du passage de l'empereur Gratien dans la vallée du Rhône en 379.


Notes

(1) Aucune sources antique ne mentionne Cularo comme ayant été un vicus. Ce statut lui est néanmoins fréquemment attribué dans la littérature (Leveau, 2005 ; Bonfand, 2017).

(2) Les inscriptions qui surmontaient les deux portes de la ville plaident pour une dédicace effectuée entre décembre 285 ap. J.-C. (avènement de Maximien Hercule) et le 1er mars 293 ap. J.-C. (instauration de la tétrarchie).


Sources littéraires anciennes

Cicéron, Lettres aux familiers : Lettre de Plancus à Cicéron, X, 23 : "PLANCUS A CICERON. Cularon, pays des Allobroges, 6 juin. Jamais, mon cher Cicéron, jamais, je le jure, je ne reculerai devant un danger pour la patrie. Mais dû moins qu'en cas de malheur on ne m'accuse pas de légèreté. Si j'avais eu une confiance aveugle dans Lépide, je n'hésiterais pas à le reconnaître. [...]"


Sources épigraphiques

Grenoble (CIL 12, 2227)
[D(IS) M(ANIBVS)] P(VBLIVS) <P=T>RIMITIVVS AVGVSTOR(VM) LIB[RARI]O STAT(IONIS) CVLARON(IS) ET QVARTINIA [...] CON(IVX) PRO SE ET HEREDIBVS SVIS DONVM DANT

"[Aux Dieux Mânes]. Publius Primitivus, (affranchi) des Augustes, secrétaire de la station de Cularo et Quartinia [...], son épouse. Pour eux et leurs héritiers, ils ont fait ce don."

Grenoble (CIL 12, 2229)
DD(OMINI) NN(OSTRI) IMP[P](ERATOR) CAES(AR) GAIVS AVREL(IVS) VALERIVS DIOCLETIANVS P(IVS) <F=P>(ELIX) INVICTVS AVGVSTVS ET IMP(ERATOR) CAESAR MARCVS AVREL(IVS) VALERIVS MAXIMIANVS PIVS FELIX INVICTVS AVG(VSTVS) MVRIS CVLARONENSIBVS CVM INTERIORIBVS AEDIFICIIS PROVIDENTIA SVA INSTITVTIS ADQVE PERFECTIS PORTAM ROMANAM IOVIAM VOCARI IVSSERVNT // DD(OMINI) NN(OSTRI) IMP[P](ERATOR) CAES(AR) GAIVS AVREL(IVS) VALERIVS DIOCLETIANVS P(IVS) <F=P>(ELIX) INVICTVS AVGVSTVS ET IMP(ERATOR) CAESAR MARCVS AVREL(IVS) VALERIVS MAXIMIANVS PIVS FELIX INVICTVS AVG(VSTVS) MVRIS CVLARONENSIBVS CVM INTERIORIBVS AEDIFICIIS PROVIDENTIA SVA INSTITVTIS ADQVE PERFECTIS PORTAM VIENNENSEM HERCVLEAM VOCARI IVSSERVNT

"Nos deux seigneurs, l'empereur César Gaius Aurelius Valerius Diocletianus, le pieux, favorisé des dieux, invincible Auguste et, l'empereur César Aurelius Valerius Maximianus, le pieux, favorisé des dieux, invincible Auguste, après la construction des murailles des Cularonenses avec leurs édifices intérieurs, ouvrage de leur prévoyante sollicitude, heureusement entrepris et achevés, ont donné à la porte du côté de Rome le nom de porte de Jupiter."
"Nos deux seigneurs, l'empereur César Gaius Aurelius Valerius Diocletianus, le pieux, favorisé des dieux, invincible Auguste et, l'empereur César Aurelius Valerius Maximianus, le pieux, favorisé des dieux, invincible Auguste, après la construction des murailles des Cularonenses avec leurs édifices intérieurs, ouvrage de leur prévoyante sollicitude, heureusement entrepris et achevés, ont donné à la porte du côté de Vienna le nom de porte d'Hercule."

Grenoble (CIL 12, 2252)
D(IS) M(ANIBVS) C(AI) SOLLI MARCVLI LIBRARI(I) XL GALLIAR(VM) STATIO[I]NIS CVLAR(ONIS) OBITI ANNOR(VM) XXVI C(AIVS) SOLLIVS MARCVS PATER FIL(IO) PIISSIMO ET ATTIA MARCIAN(A) ET MARCVLA SORORES <F=E>RATRI PIISSIMO ET ATTIA AVRELIA CON/IVGI <I=T>NCOMPARAB(ILI) SVB ASCIA DEDICAV(ERVNT)

"Aux Dieux Mânes. Gaius Sollius Marculus, secrétaire du 40e des Gaules à la station de Cularo. Il mourut à l'âge de 26 ans. Gaius Sollius Marculus, son père, à son fils si affectionné, et Attia Marciana et Attia Marcula, ses soeurs, à leur frère si affectionné, et Attia Aurelia, à son mari incomparable, ont dédié ce monument sous l'ascia."



Sources:
  • F. Baucheron et al., (1998) - "Chapitre 2. Les remparts de la ville : enceinte et fossé", in : F. Baucheron et al. (dir.), Autour du groupe épiscopal de Grenoble. Deux millénaires d'histoire, DARA 16, Alpara, Lyon, pp.39-56
  • Y. Bonfand, (2017) - Grenoble (Isère). Enceinte antique, Rapport de prospection thématique opération n°2212490, Université Grenoble‐Alpes, 83p.
  • A. Dauzat & C. Rostaing, (1979) - Dictionnaire étymologique des noms de lieu en France, Librairie Guénégaud, Paris, 786p.
  • X. Delamarre, (2003) - Dictionnaire de la langue gauloise, Errance, Paris, 440p.
  • X. Delamarre, (2012) - Noms de lieux celtiques de l'Europe ancienne, Errance, Paris, 384p.
  • X. Delamarre, (2013) - "Une récurrence de la toponymie vieille-celtique : les formations en nasale -(h3)on- faites sur un théonyme du type Vesontiō (locus) ← Vesontis (deus)", in : J. L. García Alonso (ed.), Continental Celtic word formation : the onomastic data, Ediciones Universidad de Salamanca, Salamanca, pp.175-180
  • X. Delamarre, (2019) - Dictionnaire des thèmes nominaux du gaulois (I. Ab- / Ixs(o)-), Les Cent Chemins, 398p.
  • J.-P. Jospin, (2005) - "Recherches sur la topographie de Cularo (Grenoble, Isère) aux Ier - IIIe siècles après J.-C.", Revue archéologique de Narbonnaise, tome 38-39, pp.73-83
  • P. Leveau, (2005) - "Les agglomérations de la cité de Vienne, un dossier en devenir", Revue archéologique de Narbonnaise, tome 38-39, pp.157-169
  • B. Rémy & J.-P. Jospin, (2002) - "Grenoble à l'époque gallo‐romaine d'après les inscriptions", Presses Universitaires de Grenoble, Grenoble, 260p.
  • B. Rémy & J.-P. Jospin, (2006) - Cularo, Gratianopolis, Grenoble, Presses Universitaires de Lyon, Galliae civitates, 141p.
  • Julien Quiret pour l'Arbre Celtique

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    F. Baucheron et al., (1998b) - "Chapitre 2. Les remparts de la ville : enceinte et fossé"
    J.-P. Jospin, (2005) - "Recherches sur la topographie de Cularo (Grenoble, Isère) aux Ier - IIIe siècles après J.-C."
    P. Leveau, (2005) - "Les agglomérations de la cité de Vienne, un dossier en devenir"
    X. Delamarre, (2013) - "Une récurrence de la toponymie vieille-celtique : les formations en nasale -(h3)on- faites sur un théonyme du type Vesontio (locus) <- Vesontis (deus)"
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