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Encyclopédie Celtique

La bataille de la Trébie [décembre -218]

La bataille de la Trébie (décembre 218 av. J.-C.)

Le succès remporté par les troupes du consul Tiberius Sempronius Longus, lorsque les Carthaginois et Gaulois dévastaient le territoire des Anares, raviva le courage des soldats romains, qui voulurent attaquer sans tarder les Carthaginois. Moins intrépide et souffrant, l'autre consul, Publius Cornelius Scipio, voulut quant à lui reporter tout projet d'attaque (Polybe, Histoire générale, III, 70 ; Tite-Live, Histoire romaine, XXI, 53). En effet, selon Polybe, Publius Cornelius Scipio estimait que les Romains devaient profiter de l'hiver pour entraîner leur troupes et misait sur le fait que les relations entre les Carthaginois et les Gaulois finiraient par se dégrader. Hannibal n'ignorait rien des désaccords qui opposaient les deux consuls, ni de l'emportement de Tiberius Sempronius Longus. Conscient que son armée était plus expérimentée que les troupes romaines, il voyait aussi ses alliés gaulois enthousiastes et savait qu'ils le seraient davantage lorsque les hostilités s'éloigneraient de leur territoires (1) (Histoire romaine, XXI, 53). De plus, ses espions gaulois (2) le renseignaient sur les dispositions des Romains, lui apprirent que les Romains s'appétaient à livrer bataille. Dans cette optique, il fit reconnaître les lieux pour déterminer le lieu prendre à tendre une embuscade aux armées consulaires (Histoire générale, III, 71 ; Histoire romaine, XXI, 53).

Après ce travail préparatoire, Hannibal mit en place un stratagème pour contraindre les Romains à l'attaquer, dans une position qui leur était défavorable. Pour cela, il misa sur l'emportement du consul Tiberius Sempronius Longus, espérant que ce trait de caractère le pousserait à l'erreur (Histoire générale, III, 71 ; Histoire romaine, XXI, 54) :

En toute discrétion, il envoya Magon, son frère, à la tête de 1000 cavaliers et de 1000 fantassins de prendre position sur une portion de la rive de la rivière, dissimulée par les broussailles.

Il chercha ensuite à surprendre et provoquer les armées consulaires au petit-matin, en faisant traverser la Trébie à la cavalerie numide, afin qu'elle pu harceler les avant-postes, pour pousser les Romains à répliquer et à passer la rivière.

Pendant ce temps, le reste de l'armée punique demeura au camp, occupée à s'alimenter et se tenir au chaud près des grands feux qui avaient été allumés devant les tentes des soldats.

A l'arrivée des Numides, Tiberius Sempronius Longus donna ordre à sa cavalerie, puis 6000 fantassins et enfin à l'ensemble de ses troupes de s'avancer en direction de la Trébie. Bien que les événements se déroulèrent au plus froid de l'hiver, les Romains ne prirent aucune précaution particulière et réagirent de manière précipitée. Les troupes passèrent à l'attaque sans avoir manger et franchirent à pied les eaux froides de la Trébie (Histoire générale, III, 72 ; Histoire romaine, XXI, 54). Ils en ressortirent considérablement affaiblis. La cavaliers romains continuèrent à pourchasser les Numides, avant que ceux-ci ne leur opposèrent une vive résistance, soutenus par des renforts. Craignant de voir sa cavalerie subir de lourds dommages, Tiberius Sempronius Longus la fit rappeler et prendre place dans les lignes romaines (Histoire générale, III, 72 ; Histoire romaine, XXI, 55).

Le stratagème d'Hannibal fonctionna parfaitement, puisqu'il parvint à provoquer l'engagement des armées consulaires, non sans l'avoir considérablement affaibli. En effet, après avoir traversé les eaux froides de la Trébie, les soldats romains étaient engourdis par le froid, tandis que les soldats carthaginois, bien nourris et demeurés au chaud étaient se présentèrent sur le champ de bataille en parfaite forme (Histoire générale, III, 72 ; 73 ; Histoire romaine, XXI, 53 ; 54). Dans ces circonstances, les armées se mirent en ordre de bataille. Hannibal disposa ses 8000 soldats baléares en avant, puis son infanterie lourde, 20000 fantassins Espagnols, Gaulois et Libyens. Il dispose sur ses ailes ses éléphants et 10000 cavaliers numides et gaulois. Tiberius Sempronius Longus aligna quant à lui 16000 ou 18000 fantassins romains, et disposa sur ses ailes 20000 soldats alliés, un corps d'auxiliaires cénomans et les 4000 cavaliers qui venaient d'affronter les Numides (Histoire générale, III, 72 ; Histoire romaine, XXI, 55).

Lorsque le combat s'engagea, les Romains furent très rapidement mis en difficulté. Leurs archers étaient épuisés et manquaient de projectiles (Histoire générale, III, 73). Les cheveux des cavaliers romains furent terrifiés par les éléphants carthaginois. Dans ce contexte, la cavalerie romaine fut rapidement mise en déroute, permettant aux Baléares de s'infiltrer sur les flancs des fantassins romains et de les cribler de projectiles. Aussi, les éléphants parvinrent sans aucune difficulté à percer profondément les rangs romains. Pire ! Alors que les Romains résistaient avec beaucoup de difficultés, les troupes de Magon, laissées jusqu'alors en retrait, les assaillirent par derrière (Histoire générale, III, 73 ; 74 ; Histoire romaine, XXI, 55). Dans le tumulte des combats, les vélites parvinrent finalement à trouver le point faible des éléphants, ce qui contraignit Hannibal à les faire sortir du tumulte, pour les diriger vers l'aile gauche des Romains, et les opposer au seul corps des auxiliaires cénomans, qui fut immédiatement mis en fuite. La défaite des auxiliaires gaulois provoqua la panique dans les rangs romains, qui tentèrent à leur tour de fuir le champ de bataille. Un corps de 10000 hommes parvint à s'enfuir en rompant les rangs des Carthaginois et de leurs alliés gaulois, pour gagner Placentia (Plaisance). Ceux restés sur place, séparés de leur camp par la Trébie, parvinrent à le regagner en traversant la rivière, mais beaucoup s'y noyèrent ou furent abattus par les Carthaginois. Quelques uns survécurent cependant et durent leur salut au fait d'avoir pu se disperser dans les champs, avant de regagner Placentia à leur tour (Histoire générale, III, 74 ; Histoire romaine, XXI, 56).

La victoire des Carthaginois aurait pu être encore plus totale, si les soldats et leurs montures n'avaient pas autant souffert du froid. Tite-Live indique que beaucoup de chevaux moururent, de même que la grande majorité des éléphants, ce qui compromit tout projet de traversée de la rivière en vue de prendre le camp romain. Publius Cornelius Scipio profita de la nuit suivante pour s'en échapper, avec les vestiges de son armée et pour traverser la Trébie sur des radeaux. De là, il gagna à son tour Placentia, avant de traverser le Pô pour rejoindre Cremona (Crémone), afin que la charge des deux armée ne reposa pas sur une seule colonie (Histoire générale, III, 74 ; 75 ; Histoire romaine, XXI, 56).

(1) Ces considérations que Tite-Live prête à Hannibal sont intéressantes. En effet, les Gaulois, déjà affaiblis par des années de guerre contre les Romains, assumaient l'essentiel de ravitaillement nécessaire à l'armée carthaginoise. Aussi, depuis l'arrivée d'Hannibal, cette nouvelle guerre affectait principalement leurs territoires. Ils est donc évident qu'ils étaient impatients Il est intéressant de mettre en perspective ce passage de Tite-Live avec les considérations que Polybe prête à Publius Cornelius Scipio, sur l'humeur mobile des Gaulois, qui pourraient être amenées à faire volte-face et se tourner contre Carthage (Histoire générale, III, 70). Peut-être tenait-il des informations allant dans ce sens de quelques espions gaulois ?

(2) Des Gaulois servant dans les deux armées, le passage de ces espions d'un camp à l'autre passait inaperçu selon Tite-Live (Histoire romaine, XXI, 53).


Polybe, Histoire générale, III, 72 : "Tibérius, à la vue des Numides, fit aussitôt sortir sa cavalerie, et lui donna ordre d'en venir aux mains. Puis il détacha les 'archers au nombre de six mille, et finit par déployer hors du camp toute son armée, dont le spectacle seul devait, à son idée, décider de la victoire ; tant le nombre de ses troupes et le succès de la veille sur la cavalerie ennemie lui inspiraient de confiance ! On se trouvait alors en plein hiver ; la journée était froide, la neige abondante ; les hommes et les chevaux avaient quitté presque tous le camp sans avoir pris la nourriture nécessaire. Cependant, dans le premier moment, l'élan, l'ardeur fut générale ; mais il fallut ensuite franchir la Trébie, dont le courant, grossi par les pluies qui pendant la nuit étaient tombées à flots sur les hauteurs voisines du camp, permettait à peine aux soldats d'avancer, plongés dans l'eau jusqu'aux épaules. Alors les Romains se virent en proie au froid et à la faim, que l'heure avancée de la journée rendait plus sensible, tandis que les Carthaginois, après avoir tranquillement bu et mangé dans leurs tentes, et préparé leurs chevaux à loisir, se frottaient d'huile et revêtaient leurs armes autour du feu. Annibal, qui attendait le moment favorable, eut à peine vu les Romains au delà de la rivière, qu'il envoya au secours des Numides les soldats armés à la légère, ainsi que les frondeurs, au nombre de huit mille, et fit sortir son armée des retranchements. A une distance du camp de huit stades environ, il établit sur une seule ligne droite les fantassins, qui n'étaient pas moins de vingt mille, composés d'Espagnols, de Celtes et de Libyens, et détacha sur chacune des ailes les cavaliers qui, avec les contingents des Gaulois, formaient plus de dix mille hommes. Enfin il partagea entre ces deux ailes les éléphants, qu'il plaça devant elles. Tibérius rappela aussitôt sa cavalerie qu'il voyait fort embarrassée au milieu des ennemis, grâce aux Numides, qui tout d'un coup se dispersent et battent en retraite, pour revenir ensuite avec plus de violence et d'audace (manoeuvre qui leur est particulière), et rangea suivant la méthode romaine l'infanterie , qui comptait seize mille Romains et vingt mille alliés. C'est le chiffre auquel, chez les Romains, dans les circonstances décisives, s'élève toujours l'armée quand elle est commandée par les deux consuls. Puis il jeta sur les deux ailes ses quatre mille chevaux, et s'avança superbement vers l'ennemi en ordre et au petit pas."

Polybe, Histoire générale, III, 73 : "Dès que les deux armées furent en présence, l'action s'engagea entre les soldats armés à la légère, jetés en avant dans la plaine. Les Romains avaient contre eux de nombreux désavantages, tandis que les circonstances servaient merveilleusement les Carthaginois. Les archers romains étaient épuisés par une lutte qui durait depuis l'aurore ; ils avaient lancé contre les Numides la plus grande partie de leurs traits, et ceux qu'ils avaient encore, exposés sans cesse à l'humidité, étaient mis hors de service ; enfin la cavalerie, ainsi que le reste de l'armée, se trouvait à peu près dans le même état que les archers. La position des Carthaginois était tout autre : comme ils se présentaient au combat frais et dispos, ils exécutaient avec ardeur et facilité ce qui était nécessaire. Aussi, lorsque de chaque coté les rangs se furent ouverts aux éclaireurs qui avaient commencé le combat, et que les soldats pesamment armés en furent venus aux mains, les cavaliers carthaginois, qui remportaient de beaucoup sur les Romains par le nombre et par la vigueur des chevaux, dont rien n'avait diminué les forces à la sortie du camp, tombèrent si lourdement sur leurs ailes, que la cavalerie romaine s'enfuit, laissant à découvert par sa retraite les flancs de l'armée. À cette vue, les troupes auxiliaires des Carthaginois et les Numides se précipitèrent au delà de leurs soldats placés en tête, prirent de côté les Romains, leur causèrent beaucoup de mal et leur ôtèrent tout moyen de combattre avec ceux qui les attaquaient en face. Les soldats pesamment armés, postés aux premiers rangs et au contre, seuls luttèrent longtemps de pied ferme sans que la victoire se décidât."

Polybe, Histoire générale, III, 74 : "Mais alors les Numides en embuscade se levant tout à coup, se jetèrent sur le derrière des troupes qui se trouvaient au centre, et répandirent dans l'armée romaine la confusion et le trouble. Enfin les deux ailes de Tibérius, vivement pressées de face par les éléphants, de côté par les troupes armées à la légère, furent mises en fuite et poursuivies, culbutées dans la rivière. Cependant les derniers rangs du centre étaient maltraités et détruits par les Numides de Magon. Les soldats des premières lignes, animés par la nécessité, vainquirent d'abord les Gaulois et une partie des Libyens, en tuèrent un bon nombre, et pénétrèrent même dans les bataillons carthaginois. Mais à la vue des deux ailes en déroute, à la fois effrayés de la multitude des cavaliers ennemis et empêchés par la rivière et par une pluie battante, ils renoncèrent à l'espoir de leur porter un utile secours ou de retourner dans leur camp, et ils gagnèrent en bon ordre Plaisance, où ils arrivèrent sains et saufs au nombre de dix mille environ. La plus grande partie du reste de l'armée fut tuée sur les bords du fleuve par les chevaux et les éléphants. Les fantassins qui échappèrent au massacre et la plus forte part de la cavalerie firent retraite sur les traces des dix mille, et parvinrent à Plaisance avec eux. Les Carthaginois, après avoir poursuivi les Romains jusqu'à la Trébie sans pouvoir aller au delà, à cause de la saison, retournèrent dans leur camp. Les Carthaginois ressentirent de ce succès une vive joie. Par un heureux hasard les Espagnols et les Libyens avaient succombé en petit nombre, et la perte avait principalement porté sur les Gaulois. L'armée fut toutefois si maltraitée par la pluie et la neige, que tous les éléphants moururent, à l'exception d'un seul, et que beaucoup d'hommes et de chevaux périrent de froid."

Polybe, Histoire générale, III, 75 : "Tibérius, bien qu'il appréciât au juste un tel désastre, envoya dire, afin d'en dissimuler autant que possible la grandeur aux Romains, qu'il avait livré bataille, et que l'hiver lui avait enlevé la victoire. Les Romains ajoutèrent d'abord foi à ce rapport ; mais quand ils apprirent que les Carthaginois s'étaient rendus maîtres du camp, et que tous les Gaulois inclinaient à l'alliance d'Annibal que leurs soldats, au contraire, après avoir quitté leurs retranchements et déserté le champ de bataille, s'étaient retirés dans les villes voisines et n'avaient pas d'autres provisions que celles que la mer leur envoyait par le Pô, alors ils ne comprirent que trop la vérité."

Tite-Live, Histoire romaine, XXI, 53 : "Cependant, plus que tout autre, le consul avait trouvé le succès grand et mérité. Il était transporté de joie, d'avoir été vainqueur dans un genre de combat où son collègue avait été vaincu. Il venait de relever, de ranimer le courage des soldats ; tous, excepté Cornélius, demandaient à l'instant la bataille. Encore plus affecté au moral qu'au physique, l'autre consul, au souvenir de sa blessure, redoutait la mêlée et les javelots de l'ennemi ; mais fallait-il laisser vieillir cette ardeur, près d'un malade ? pourquoi différer et perdre le temps ? Attend-on un troisième consul, une troisième armée ? Les Carthaginois sont campés au sein de l'Italie, presque à la vue de Rome. Ce n'est plus la Sicile, la Sardaigne, enlevées à des vaincus, que viennent attaquer leurs armes ; ce n'est plus l'Espagne, en deçà de l'Hèbre, qu'ils essaient d'envahir : c'est du sol paternel, de la terre de la patrie, qu'ils veulent chasser les Romains. " Combien gémiraient nos pères, disait-il, accoutumés à porter la guerre près des murs de Carthage, s'ils nous voyaient, nous, leurs enfants, s'ils voyaient deux consuls, deux armées consulaires, au milieu de l'Italie, arrêtés par la crainte dans leurs retranchements : tandis que l'Africain a soumis à sa domination tout le pays entre les Alpes et l'Apennin ! " Tels étaient les discours qu'il tenait près du lit de son collègue malade, qu'il répétait presque publiquement dans sa tente. Il était aiguillonné et par l'idée de l'approche des comices, qui pouvaient remettre à d'autres consuls le soin de la guerre, et par l'occasion de faire rejaillir sur lui seul toute la gloire d'un succès, pendant la maladie de son collègue. Aussi, malgré les représentations de Cornélius, il ordonne aux soldats de se tenir prêts à livrer bataille au plus tôt. Hannibal, qui voyait bien que la prudence était le parti le plus sûr pour l'ennemi, ne se doutait guère que les consuls agiraient avec légèreté et imprudence. Mais, convaincu par la renommée d'abord, ensuite par ses observations, de la fougue, de l'emportement d'un des consuls, dont un succès sur ses fourrageurs avait dû accroître encore l'impétuosité, il ne désespérait plus que la fortune lui fournit bientôt l'occasion de frapper un grand coup. Afin de ne point la laisser échapper, il redoublait de vigilance et d'activité, tandis que le soldat romain était peu aguerri, que le meilleur des deux généraux se trouvait, par sa blessure, hors d'état de combattre, et que rien jusque là n'avait refroidi l'enthousiasme des Gaulois, dont il savait que le grand nombre le suivrait avec plus de répugnance, à mesure qu'on les entraînerait plus loin de leur patrie. Ces motifs, d'autres encore, lui firent espérer une bataille prochaine : d'ailleurs, en cas de retard, il était résolu à la provoquer, lorsque ses espions, choisis parmi les Gaulois, qui excitaient moins la défiance, parce que cette nation servait dans les deux armées, lui rapportèrent que les Romains se disposaient au combat ; il se mit alors à chercher dans les environs un lieu propre à une embuscade."

Tite-Live, Histoire romaine, XXI, 54 : "Entre les deux armées coulait un ruisseau, renfermé, de toutes parts, dans des rives profondes et couvertes d'herbes marécageuses, de buissons, de broussailles, comme le sont d'ordinaire tous les lieux incultes. On pouvait cacher même de la cavalerie dans cet endroit obscur : Hannibal s'en aperçut, après avoir lui-même reconnu te terrain : " Voilà quel sera ton poste, dit-il à Magon, son frère : choisis dans l'armée cent cavaliers, cent fantassins, et viens avec eux me joindre à la première veille. Il faut maintenant prendre de la nourriture et du repos ". Il dit, et congédie le conseil. Magon paraît bientôt avec sa troupe d'élite. " Je vois, dit Hannibal, des guerriers intrépides. Mais, afin de vous assurer l'avantage du nombre ainsi que de la valeur, vous choisirez chacun, dans tous les bataillons d'infanterie ou de cavalerie, neuf braves qui vous ressemblent. Magon vous montrera où vous devez vous embusquer. Vous aurez affaire à un ennemi incapable de rien voir dans ces ruses de guerre ". Les mille cavaliers et les mille fantassins de Magon sont partis. Hannibal, au point du jour, ordonne à la cavalerie numide de passer la Trébie, de voltiger le long du camp romain, et de harceler les avant-postes, pour attirer l'ennemi au combat ; puis, lorsque l'action serait engagée, de lâcher pied peu à peu, afin de l'entraîner en deçà de la rivière. Telles étaient les instructions des Numides. Les autres chefs de l'infanterie et de la cavalerie reçoivent l'ordre de faire dîner tous leurs soldats, de seller ensuite les chevaux, et d'attendre le signal sous les armes. Sempronius, à la première alerte donnée par les Numides, fait d'abord avancer toute sa cavalerie, cette partie de ses forces dont il est si fier, puis six mille hommes d'infanterie, et enfin toutes ses troupes, tant il était avide de mettre à exécution sa résolution prise longtemps d'avance de livrer bataille. Ce jour-là, la brume était assez piquante, et il tombait de la neige dans ces lieux situés entre les Alpes et l'Apennin, et refroidis encore par le voisinage des fleuves et des marais. Comme les hommes et les chevaux étaient sortis précipitamment, sans avoir pris d'avance aucune nourriture, sans s'être munis d'aucune protection contre la rigueur de la saison, ils n'avaient plus de chaleur ; et, à l'approche de la rivière, l'air, devenu plus vif, les glaçait de froid. Bientôt ils entrent dans l'eau, afin de poursuivre les Numides qui fuient devant eux, et ils en ont jusqu'à la poitrine, à cause des pluies qui, la nuit précédente, ont grossi la Trébie : alors, à mesure qu'ils sortent de la rivière, ils sentent leurs membres si engourdis, qu'à peine ils peuvent tenir leurs armes ; et, comme déjà la journée est avancée, ils se trouvent épuisés de fatigue et de besoin."

Tite-Live, Histoire romaine, XXI, 55 : "Cependant les soldats d'Hannibal, qui ont allumé des feux devant leurs tentes, assoupli leurs membres avec l'huile distribuée dans chaque bataillon, et pris tranquillement leur repas, à la nouvelle que l'ennemi a passé la rivière, saisissent leurs armes, pleins d'ardeur et de force, et viennent se ranger en bataille. Hannibal place en première ligne les Baléares, troupes légères, qui forment à peu près huit mille hommes ; ensuite son infanterie, pesamment armée, tout ce qu'il a de braves, de vigoureux guerriers : il répand sur les ailes dix mille chevaux, et, en tête de chacune il dispose ses éléphants. Le consul, qui voit sa cavalerie, ardente à la poursuite des Numides débandés, assaillie à l'improviste par ces mêmes Numides qui tout à coup lui opposent une vive résistance, fait sonner la retraite, la rappelle, et la distribue sur les deux ailes de son infanterie, composée de dix-huit mille Romains, de vingt mille alliés de nom latin, et d'un corps d'auxiliaires cénomans, la seule des nations gauloises dont la foi ne s'était point démentie. Telles étaient les deux armées marchant au combat. L'action fut engagée par les Baléares ; mais, comme les légions leur présentaient une masse de forces trop imposante, on fit bientôt retirer sur les ailes ces troupes légères. Par ce mouvement, la cavalerie romaine fut aussitôt accablée. En effet, quatre mille cavaliers, qui déjà par eux-mêmes avaient peine à résister à dix mille Carthaginois, la plupart aussi dispos que les Romains étaient épuisés, se trouvèrent encore écrasés par une grêle de traits que leur lancèrent les Baléares. Avec cela, les éléphants, qui débordaient les extrémités des ailes, et dont l'aspect et l'odeur extraordinaire effrayaient surtout les chevaux, répandaient au loin le désordre. Entre les deux infanteries, il y avait plutôt égalité de courage que de vigueur ; car les Carthaginois, tout frais et bien nourris à l'avance, luttaient avec avantage contre des ennemis épuisés de faim et de lassitude, engourdis et paralysés par le froid. Cependant les Romains eussent résisté, s'ils n'avaient eu à combattre que de l'infanterie : mais notre cavalerie une fois mise en déroute, les Baléares criblaient de traits nos fantassins sur les flancs, et déjà les éléphants s'étaient portés sur le centre. Bientôt Magon et les Numides, qui ont vu les Romains dépasser leur embuscade secrète, arrivent par derrière, et sèment çà et là le trouble et la consternation. Cependant, au milieu de tant de maux qui la menacent de toutes parts, notre armée demeura quelque temps inébranlable, et, contre l'attente générale, soutint surtout le choc des éléphants. Des vélites, disposés pour cet effet, leur firent tourner le dos, en leur lançant des javelines acérées ; puis, se précipitant sur leurs traces, ils les perçaient sous la queue, à l'endroit où leur peau plus molle était plus accessible au fer."

Tite-Live, Histoire romaine, XXI, 56 : "Au moment où, dans leur effroi, ils allaient se rejeter sur les Carthaginois eux-mêmes, Hannibal ordonna de les faire repasser du centre vers les extrémités, et de les diriger sur l'aile gauche, contre les Gaulois auxiliaires : la déroute ne fut pas un instant douteuse. Surcroît d'alarmes pour les Romains, à la vue de la fuite des auxiliaires. Aussi, obligés de combattre sur tous les points, dix mille hommes environ, car le reste ne put s'échapper, s'ouvrirent un passage, par le massacre de beaucoup d'ennemis, à travers le centre de l'armée africaine, renforcée de Gaulois auxiliaires ; et, comme il leur était impossible de regagner le camp, dont la Trébie leur fermait l'entrée, ou de distinguer assez, à cause de la pluie, les endroits où ils auraient pu venir au secours des leurs, ils se rendirent droit à Plaisance. Chacun ensuite chercha à s'échapper d'un côté ou d'un autre. Ceux qui coururent vers la rivière furent engloutis dans les eaux, ou accablés par les Carthaginois, s'ils hésitaient à tenter le passage. Ceux qui, dans leur fuite, s'étaient dispersés à travers champs, prirent la route de Plaisance, sur les traces du corps d'armée qui effectuait sa retraite. D'autres enfin, enhardis par la crainte même de l'ennemi, s'élancèrent dans la Trébie, la traversèrent heureusement, et se réfugièrent dans leurs lignes. Une pluie mêlée de neige, et la rigueur intolérable du froid, firent périr une grande quantité de chevaux et presque tous les éléphants. Les Carthaginois ne poursuivirent pas les Romains au-delà du fleuve, et ils retournèrent dans leur camp, tellement transis et glacés, qu'à peine ils sentaient la joie de leur victoire. Aussi la nuit suivante, lorsque le détachement commis à la garde de nos retranchements, et les faibles débris de nos troupes nombreuses passaient la Trébie sur des radeaux, les Carthaginois ne s'en aperçurent point ; soit parce que la pluie tombait par torrents, ou qu'incapables, par leur lassitude et par leurs blessures, de faire aucun mouvement, ils feignirent de ne rien entendre. Scipion, sans être inquiété dans sa marche silencieuse, conduisit sa division à Plaisance : de là, traversant le Pô, il gagna Crémone, pour que le cantonnement de deux armées ne restât point à la charge d'une seule colonie."


Sources:
  • Julien Quiret pour l'Arbre Celtique

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