Sénat romain réprouve la campagne de Marcus Popillus Laenas [-173] - 15558 - L'encyclopédie

Le Sénat romain réprouve la campagne de Marcus Popillus Laenas (173 av. J.-C.)

Après avoir remporté la bataille de bataille de Carystum et obtenu la capitulation des Statielles, le consul Marcus Popillus Laenas fit parvenir un compte-rendu de sa campagne au Sénat. La lecture de ce récit, faite par le préteur urbain Aulus Atilius Serranus, consterna le sénat. Il apparut que les Statielles, l'un des rares peuples de la région qui s'était toujours gardé de prendre part aux guerres contre Rome, furent attaqués et réduits à néant sans aucune raison valable. Pire, alors que les justifications de ce conflit étaient inexistantes, les Statielles furent traités avec une rare cruauté, puisque les survivants furent réduits en esclavage et leurs biens vendus, après leur capitulation. Enfin, au-delà du seul cas des Statielles, le Sénat s'inquiétait du fait que ce tragique exemple ôterait inévitablement tout espoir de voir certains peuples ligures accepter l'idée d'une capitulation, puisqu'il leur avait donné toute raison de douter de la loyauté des Romains (Tite-Live, Histoire romaine, XLII, 8).

Les sénateurs remirent donc en cause l'ensemble de la campagne de Marcus Popillus Laenas et statua sur le fait que le consul devait, en réparation, libérer les Statielles de l'esclavage et dédommager les acheteurs, les reconduire sur leurs territoires et leur restituer leurs biens. En outre, il fut décidé que les Romains fabriqueraient des armes sur leur territoire, de manière à ce qu'ils pussent reconstituer leurs forces. Enfin, le Sénat ordonna au consul de quitter la Ligurie au terme de sa mission (Histoire romaine, XLII, 8).

Contre toute attente, le consul Marcus Popillus Laenas refusa d'obéir aux dispositions prises par le Sénat. Il rapatria ses troupes à Pisa (Pise, province de Pise, Italie) et regagna lui-même Rome, d'où il convoqua le Sénat au temple de Bellone. Là, il critiqua vertement le préteur urbain Aulus Atilius Serranus qui, au lieu de réclamer la célébration du succès du consul et une cérémonie d'action de grâces, avait poussé le Sénat à statuer défavorablement sur cette campagne. En conséquence, il dénonça le décret du Sénat qui lui ordonnait de libérer les Statielles et de leur restituer leurs biens, et revendiqua la supplication d'action de grâces. Le Sénat statua de nouveau, rejeta ses deux revendications et le renvoya dans sa province, avec pour mission de faire appliquer le décret du Sénat (Histoire romaine, XLII, 9).

Peu avant les comices, le consul regagna la Ligurie, où ses exactions reprirent de plus belle.

Tite-Live, Histoire romaine, XLII, 8 : "Quand le préteur A. Atilius en eut donné lecture au sénat (car Postumius, l'autre consul, était occupé en Campanie à une délimitation de territoire), le sénat trouva cette sévérité exorbitante : Les Statellates, les seuls de la Ligurie qui n'avaient pas porté les armes contre Rome, attaqués de plein saut, sans avoir, cette fois encore, déclaré eux-mêmes la guerre ! Des gens qui s'en étaient rapportés à la loyauté du peuple romain traités avec la dureté la plus insigne, frappés et anéantis ! Tant de milliers d'innocents qui imploraient la foi du peuple romain, scandaleusement vendus, pour ôter, par cet exemple, l'envie de capituler à quiconque y serait disposé ! arrachés de leurs foyers, pendant que les vrais ennemis du peuple romain vivent à l'abri des capitulations, ceux-ci vont être esclaves ! Par ces considérations le sénat décide que Popilius rendra la liberté aux Ligures, en remboursant aux acheteurs leurs débours ; qu'il les fera rentrer dans tous ceux de leurs biens qu'il sera possible de recouvrer ; qu'au premier moment on fabriquera des armes dans ce pays ; que le consul quittera la province aussitôt qu'il aura rétabli dans leurs foyers les Ligures qui avaient fait leur soumission. Qu'une belle victoire c'est de vaincre celui qui attaque, et non de frapper sur celui qui est à terre."

Tite-Live, Histoire romaine, XLII, 9 : "La raideur que le consul avait déployée à l'égard des Ligures, il la retrouva pour refuser d'obéir au sénat. Il envoie aussitôt ses légions en quartier d'hiver à Pise, et, l'âme pleine de mécontentement contre le sénat, de rancune contre le préteur, il revient à Rome : il convoque le sénat dans le temple de Bellone, et là il s'emporte d'abord en invectives contre le préteur qui, au lieu de demander, dans son rapport au sénat, des honneurs pour les dieux immortels en remerciement d'un beau succès, avait fait un sénatus-consulte hostile à son concitoyen, favorable aux ennemis, et qui, donnant gain de cause aux Ligures, proposait presque de leur livrer le consul. En conséquence, il le mettait à l'amende ; il demandait au sénat la suppression du sénatus-consulte dont il se plaignait, et une supplication aux dieux, qu'ils eussent dû décréter en son absence, sur le vu de la dépêche où il annonçait le service rendu par lui à la république, mais qu'ils décréteraient en sa présence, d'abord pour honorer les dieux, puis un peu aussi par égard pour leur consul. Après quelques discours, où les sénateurs qui parlèrent ne le ménagèrent pas plus de près que de loin, débouté de sa double requête, il retourna dans sa province. Postumius, l'autre consul, passa toute cette campagne à reconnaître des limites de territoire, et sans avoir même vu sa province, revint à Rome pour la tenue des comices. Il créa consuls C. Popilius Laenas et P. Aelius Ligur ; puis préteurs, C. Licinius Crassus, M. Junius Pennus, Sp. Lucrétius, Sp. Cluvius, Cn. Sicinius et C. Memmius, pour la seconde fois."