Tabernae / Tres Tabernae - Localité mentionnée sous les formes Tabernas et Tres Tabernas par Ammien Marcellin (Histoire de Rome, XVI, 2 ; 11) et Tabernis sur la Table de Peutinger et l'Itinéraire d'Antonin (240, 1 ; 355, 1), puis, plus tardivement, Ziaberna dans la Cosmographie de Ravenne (IV, 26). Le terme taberna signifie "taverne / boutique" en latin. Ici, ce terme est employé au pluriel ; Tabernae signifie donc "les tavernes / boutiques", tandis que Tres Tabernae signifie littéralement "les trois tavernes / boutiques". Il s'agît de l'actuelle ville de Sarverne (Bas-Rhin).

À l'époque pré-romaine, Saverne et sa région se situaient sur le territoire des Médiomatriques en contrebas de l'oppidum du Fossé des Pandours, lequel en était très certainement la métropole. Dés la première moitié du I^er s. av. J.-C., les Triboques occupèrent une portion du territoire des Médiomatriques, mais ce ne fut qu'à l'époque augustéenne que les Triboques furent érigés en cité, très certainement lorsque Auguste définit le statut des cités de la province (16-13 av. J.-C.). À cette occasion, la métropole des Médiomatriques fut déplacée, et la région de Saverne fut attribuée aux Triboques (elle relevait du diocèse de Strasbourg au Moyen âge), tout en constituant la frontière entre les deux cités.

Saverne se situe le long de la voie reliant Divodurum (Metz) à Argentoratum (Strasbourg), et occupe un emplacement stratégique au pied du col de Saverne, qui était l'un des principaux points de passage à travers le massif des Vosges. Dans le cadre de l'organisation des défenses de la frontière du Rhin (13-9 av. J.-C.), cet important point de passage fut mis en valeur. Une statio militaire fut édifiée au niveau de l'Usspann, l'endroit précis où la voie antique traverse l'oppidum du Fossé des Pandours, tandis qu'une bourgade vit le jour dans la première moitié du I^er s. ap. J.-C., là où cette même voie franchit la rivière Zorn (centre ancien de Saverne). C'est cette petite bourgade qui donna naissance à Tres Tabernae (Lafon, 1990 ; Lévy, 1990).

Au cours du II^e s. ap. J.-C., à la faveur du développement de Tres Tabernae, ce site fut érigé au rang de vicus, comme en témoigne une inscription fort endommagée, découverte en remploi dans le rempart tardif de la ville (CIL 13, 11648). Ce fut au cours de cette période de prospérité que les habitants du vicus ont érigé des monuments funéraires richement ornés, dont beaucoup recèlent des anthroponymes gaulois (II^e s.- milieu du III^e s. ap. J.-C.). Les recherches archéologiques effectuées permettent de soupçonner l'existence d'une parure monumentale, mais aucun élément ne témoigne de son existence réelle jusqu'à présent (Meyer, 2015 ; 2017).

Tres Tabernae subit par la suite une période plus que troublée, très certainement consécutive au raids répétés des Alamans. Plusieurs travaux ont fait état de l'érection d'une première enceinte fortifiée dés la première moitié du III^e s. ap. J.-C., mais comme le démontre N. Meyer (2015 ; 2017), l'archéologie ne confirme aucunement cette hypothèse. Selon ses travaux, la transformation de ce vicus en castrum est postérieure au dernier tiers du III^e s., voire au début du IV^e s. Ce fut au cours de la construction de cette enceinte et des travaux de réfection qu'elle subit par la suite, que de nombreux monuments funéraires des nécropoles avoisinantes furent démantelés, et leurs pierres utilisées en réemploi. Ammien Marcellin indique que Tres Tabernae subit de lourds dégâts lors d'une attaque perpétrée par les Alamans au milieu du IV^e s. (Histoire de Rome, XVI, 2). Ce fut pour restaurer le rempart de cette place-forte essentielle pour bloquer les incursions germaniques, que l'empereur Julien se rendit à Tres Tabernae en 357 (Histoire de Rome, XVI, 11).

Sources littéraires anciennes

Sources épigraphiques