Vallenses

Localisation

Cité gallo-romaine qui a appartenu successivement au district de la Vallée pennine, à la province de Rhétie et Vindélicie et à celle des Alpes atrectiennes et pennines. Leur territoire correspondait à la haute-vallée du Rhône, en amont du lac Léman, soit l'actuel canton du Valais et la partie méridionale du canton de Vaud (Suisse). Leur métropole était Forum Claudii (Martigny).

Attestations et étymologie

Cette cité fut constituée par la réunion de quatre cités antérieures, régulièrement associées au début du I^er s. ap. J.-C. sous la dénomination de CIVITATES IIII VALLIS POENINAE "les 4 cités de la Vallée pennine". Lorsque la fusion fut opérée, elle fut mentionnée par la sources épigraphiques sous le nom de Vallenses et apparut plus communément indirectement dans le nom de Forum Claudii Vallensium, leur capitale, l'actuelle Martigny. Plus tardivement, cette cité fut mentionnée sous la forme ciuitas Valensium Octodoro sur la Notice des Gaules (IV^e-V^e s. ap. J.-C.). Cet ethnonyme est latin, il s'agît d'un gentilé désignant les habitants de la Valles Poenina, la "Vallée pennine", signifiant littéralement "ceux de la vallée".

Histoire

● Les débuts de la romanisation

Au moment de la conquête des Alpes pennines par les Romains (vers 15 / 14 av. J.-C.), quatre populations distinctes se partageaient ce territoire, les Nantuates, les Sédunes, les Ubères et les Véragres. Par la suite, entre la fin du I^er s. av. J.-C. et le début du Ier s. ap. J.-C., ces populations furent administrées au sein du district militaire de la Vallée pennine, puis de la province de Rhétie et Vindélicie et commencèrent à se doter d'une organisation municipale.

Entre le premier et le second quart du I^er s. ap. J.-C., les quatre cités de la Vallée pennine, sans doute très modestes, semblent s'être associées pour mener des travaux d'intérêt commun, comme en attestent quelques monuments édifiés par les CIVITATES IIII VALLIS POENINAE. Ainsi, en 23 ap. J.-C., elles firent poser une inscription honorifique, suite au décès de Iulius Caesar Drusus à Saint-Maurice d'Agaune (CIL 12, 147). En 37-38 ap. J.-C., elles prirent part aux travaux routiers effectués sur la route reliant le lac Léman à l'Italie, comme en témoigne l'une des bornes de Saint-Triphon (CIL 17-02, 120 ; 12, 5524 ; AE 1985, 659). La même année, elles firent poser une inscription en l'honneur de Caligula à Saint-Maurice d'Agaune (AE 1897, 2). Les différents peuples de la Vallée pennine ne furent mentionnés que très exceptionnellement dans l'antiquité. Les rares sources épigraphiques sont généralement antérieures à la mention des CIVITATES IIII VALLIS POENINAE, à de rares exceptions près.

● La difficile datation de la création de cette cité

La datation de la fusion des cités de la Vallée pennine est loin d'être évidente. On considère régulièrement qu'elle doit être rapportée à 41-47 ap. J.-C., lorsque Octodurum fut refondée sous le nom de Forum Claudii Augusti. Nous savons également par Pline, qui écrivait autour de 75 ap. J.-C., que les Octodurenses s'étaient vus attribuer le droit latin, événement qui semble contemporain de cette refondation. Qui étaient ces Octodurenses ? S'agissait-il des seuls Véragres, ou de ceux qui furent plus tard connus sous le nom de Vallenses ?

Les Octodurenses furent mentionnés par Pline, peu après que cet auteur ait mentionné les Ubères (Histoire naturelle, III, 135), ce qui laisse entendre qu'ils ne constituaient pas encore une même cité. À quand remontent les attestations les plus tradives de ces peuples ? On connaît une inscription de Karkamış (province de Gaziantep, Turquie), qui mentionne un homme que l'on suppose avoir été originaire de la cité des Nantuates, qui était soldat dans l'aile I Bosporanorum (CIL 03, 6707). La présence de cette dernière aile n'est attestée dans la province de Syrie qu'au milieu du I^er s. ap. J.-C. Notons aussi que l'on connaît une mention fort tardive de la CIVITA]S SEDVNENSIS, figurant sur un monument érigé à Sion (Valais) en l'honneur d'un homme qui fut nommé praeses provinciae, c'est-à-dire un gouverneur qui était en même temps sénateur. Cette inscription est mal datée, mais ne serait pas antérieure au III^e s. ap. J.-C. (Collectif, 2001). Ptolémée (vers 150 ap. J.-C.) ne permet pas tellement d'y voir plus clair. En effet, il fut lui-même extrèmement flou dans sa description de cette portion de la province de Rhétie et Vindélicie, puisqu'il n'a mentionné aucune cité. Il s'est contenté d'énumérer les noms de quatre villes Οὔικος / Vivisco (Vevey, canton de Vaud), Ἐβόδουρον / Ebodurum (non-localisée), Ὀκτόδουρον / Octodurum (Martigny) et Δρουσόμαγος / Drusomagus (Sion) (Géographie, II, 12, 3). Les deux premières furent certainement de simples localités, tandis que les deux autres furent les métropoles de deux cités. Cette source est donc peu éclairante sur le cas des Vallenses.

La plus ancienne attestation de cette cité pourrait être identifiée sur un autel votif découvert à Rottenburg am Neckar (Bade-Wurtemberg, Allemagne), qui mentionne des AL(ARES?) VALLE/NSIVM, des "(soldats) de l'aile Vallensium" (CIL 13, 6361). Cette inscription est communément datée de la période comprise entre 70 et 130 ap. J.-C. La question se pose cependant de savoir à quoi faisait référence cette qualification de Vallensium. En effet, elle pouvait tout aussi bien se rapporter à la Valles Poenina (Vallée pennine), qu'à la supposée cité des Vallenses, dont le nom découle. Une attestation plus évidente provient d'une inscription honorifique dédiée au procurateur Titus Pomponius Victor, découverte à Martigny, qui semble pouvoir être datée de la période comprise entre la seconde moitié du II^e s. et le début du III^e s. ap. J.-C. (AE 1897, 75 ; 1898, 98). Par la suite, on retrouve le nom de cette cité sur une inscription honorifique dédiée à l'empereur Valérien, provenant de Martigny, et datée de 253 ap. J.-C. (AE 1977, 527 ; 1982, 674), puis sur de nombreuses bornes milliaires de la fin du III^e et du début du IV^e s.

En conclusion, la création de cette nouvelle cité se fit entre le milieu du I^er s. et le III^e ap. J.-C. Notons que durant ce lapse de temps, et plus précisément dans la seconde moitié du II^e s. ap. J.-C., cette cité fut détachée de la province de Rhétie et Vindélicie, et réunie aux Alpes grées pour constituer la province des Alpes atractiennes et pennines.

Sources épigraphiques