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prisonniers celtes

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Modérateurs: Pierre, Guillaume, Patrice

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107 messages • Page 4 sur 8 • 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8

Messagede Illanua » Jeu 28 Fév, 2008 1:25

Salut, Sedulos!

par "statut" avec les guillements, j'entendais le laps de temps entre le moment où ils s'étaient fait serrer, et celui où ils étaient envoyés à laur sort quel qu'il soit. On est effectivement encore assez loin des conventions de Genève...
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Messagede sule » Jeu 28 Fév, 2008 7:47

Bonjour à tous,

je vous remercie Sedullos et Illanua. J'en sais davantage à chaque intervention. Conclusion : je vais devoir revoir mon texte pour ne pas tordre le cou à l'Histoire.

Comme je l'ai écrit à Pierre je cherche aussi des infos sur les ports de Dubris et Gesoriacum. Merci.

A +

Sulè
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Messagede Sedullos » Jeu 28 Fév, 2008 11:09

Illanua a écrit:Salut, Sedulos!

par "statut" avec les guillements, j'entendais le laps de temps entre le moment où ils s'étaient fait serrer, et celui où ils étaient envoyés à laur sort quel qu'il soit. On est effectivement encore assez loin des conventions de Genève...


Salut, Ilanua, ok là c'est plus clair.

Parce que dans l'Antiquité, à Rome en particulier, les prisonniers de guerre sont mal vus. Les déserteurs et transfuges qui se font prendre sont crucifiés.

On ne doit pas se faire prendre vivant : on doit se faire tuer ou se suicider. La devotio du général rentre dans ce système de pensée : le général offre sa vie aux dieux en échange de la victoire pour son armée, s'il survit, c'est arrivé une fois, il devient pire qu'un pestiféré.

César, capturé par les pirates de Cilicie, paie lui même sa rançon, il en a les moyens :), il est libéré et capture ses ravisseurs qu'il fait crucifier.
C'est César et il n'est pas dans la situation d'un prisonnier de guerre puisque c'est en tant que civil qu'il a été capturé.
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Messagede sule » Jeu 28 Fév, 2008 11:37

Toutes les ruses de la "diplomatie"... :D
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Messagede Illanua » Jeu 28 Fév, 2008 11:55

D'accord aussi en ce qui concerne les prisonniers romains pris par l'ennemi. Je suis tombé hier soir sur un texte de Tite-Live sur ce sujet, et où il est en effet hors de question de racheter des captifs. On peut se rappeler, cela se passe bien plus tard, la capture de Valérien en 260 par les perses. Il fut immédiatement destitué de tous ses titres en vertu d'anciennes lois stipulant entre autres qu'un prisonnier de guerre romain perdait son droit de cité.

Et en ce qui concerne Cesar, il me semble que c'est en tant que fonctionnaire civil qu'il s'était fait prendre par les pirates, alors qu'il se rendait en Arménie. le plus drôle, c'est qu'il avait été vexé par le montant de la rançon demandée par les pirates, estimant que trop basse, elle ne reflétait pas son rang. Il avait donc exigé que ce montant soit augmenté par le chef des pirates...

Et enfin en ce qui concerne les prisonniers de guerre emmenés en captivité j'ai du nouveau, et tu vas être surpris, Sedullos!, Et désolé, Sule, cela va encore changer la donne....

Le temps que je consulte quelques docs et j'envoie un petit mot sur le sujet
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Messagede ejds » Jeu 28 Fév, 2008 12:13

Un dégrossi contradictoire sur Les esclaves a déjà mené sur l’AC.

Des marchands, mercatoris, venalicius ou mangonis (singulier mango et évoluant dans la probable composition du mot français maquignon) suivaient l’armée romaine et étaient présents lors de la mise à l’encan des prisonniers de guerre ou civils.

Un tri était effectué les besoins selon leurs âges, états de santé, compétences et talents… Réparti selon les demandes à un niveau de proximité ou éloigné : administration, éducation, travaux domestiques, des champs ou de l’artisanat industriel…, génie civile ou militaire (urbanisme, fortifications, construction des routes, ponts, tunnels, mines, carrières de pierre…), prostitution, galère, gladiature...

Au mieux ou au pire, les otages ou ceux dignes d’entrer au service des grandes familles romaines ou plus particulièrement des jeux du cirque, finissaient sur le commerce (mercatio) des esclaves (venalis) ou venalicium qui se tenait continuellement à Rome.

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Messagede Illanua » Jeu 28 Fév, 2008 12:38

Voilà, je reviens sur le statut (cette fois sans guillemets) des prisonniers de guerre faits par les romains. Car statut il y avait, cela semble clair et je suis le premier surpris.

Je n’ai pas trouvé les textes de lois originaux, mais par contre un texte de Gaius, célèbre professeur de droit qui exerça dans les années 130-160 ap. J.-C. Son traité « Institutes » ou « Commentaires » selon les traductions est divisé en trois parties, traitant des choses, des personnes et des contentieux. Il fut largement reconnu, le « Digeste » le cite plus de 500 fois.

Dans son traité sur les personnes, il distingue d’abord les libres et les esclaves, ce qui tombe sous le sens. Puis parmi les libres :

Les ingénus sont ceux qui sont nés libres.
Sont affranchis ceux qui ont été libérés d’une servitude conforme au droit
Et parmi les affranchis, on détermine trois espèces : les citoyens romains, latins et les déditices anciens prisonniers de guerre.

Sur les déditices :

La loi Aelia Sentia, promulguée en 4 ap. J.-C. dit que les déditices ou les déditices étrangers, c'est-à-dire ayant pris les armes contre Rome, puis défaits se sont rendus après avoir été vaincus, auront la possibilité d’être affranchis et devenir des hommes libres, mais auront le même statut que les anciens esclaves qui ont été enchaînés par leur maître à titre de peine, ou auront subi la marque, ou ceux qui soupçonnés d’une infraction, auront été soumis à la torture et ont été reconnus coupables, ainsi que ceux qui auront été ramassés pour les écoles de gladiateurs ou pour combattre les bêtes. Ils deviennent donc libres, mais ne peuvent en aucun cas obtenir le droit de cité romain ou latin, et conservent le statut de déditices libres ou déditices étrangers libres.
Par contre, les esclaves affranchis qui ne sont pas déditices ou d’anciens gladiateurs ou délinquants peuvent devenir citoyens romains ou latins (sous certaines conditions).

Voilà, cette loi Aelia Sentia est donc un aménagement d’un statut plus ancien, dont je n’ai pas retrouvé la trace pour le moment. La notion de déditice est par contre connue, mais je la croyais plus récente, apparue à l’époque des guerres germaniques et danubiennes de Marc-Aurèle, temps où les déditices furent utilisés au repeuplement des terres abandonnées. Leur statut était proche du servage et, liés à leur terre, ils étaient vendus avec elle en cas de changement de propriétaire. Au bas empire, il semble même que les citoyens qui avait été faits prisonniers, puis libérés après un retournement de situation militaire, devenaient eux aussi déditices, mais cela demande confirmation et sort quelque peu du sujet.


Sources :

Gaius, Institutes, I, 9-20

Sources d’histoire romaine, X. Loriot, C. Badel, Larousse, textes essentiels, 1993, ISBN 2-03-741009-3


Voilà, cela nous donne une piste. Esclaves déditices, esclaves déditices étrangers, puis déditices libres et déditices étrangers libres sont bien des statuts régis par le droit romain. Je pense qu’on doit pouvoir encore trouver des précisions, notamment sur la manière d’attribuer ce genre de statut, ainsi que sur les procédures décisionnelles.

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Messagede Sedullos » Jeu 28 Fév, 2008 13:05

Bien !

C'est intéressant pour Sulè puisque ça concerne l'empire, la loi Aelia Sentia date du règne d'Auguste.

Il y aura plus tard, l'histoire des Sarmates vaincus sur le Danube et envoyés en Bretagne contre les Pictes avec un "statut" bizarre, sans qu'ils soient vraiment des Fédérés ou des Lètes.

http://www.forum.arbre-celtique.com/viewtopic.php?p=41961&highlight=bradshaw#41961
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Messagede Sedullos » Jeu 28 Fév, 2008 13:07

sule a écrit:Toutes les ruses de la "diplomatie"... :D


Désolé, je ne comprends pas ce que tu veux dire.
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Messagede sule » Jeu 28 Fév, 2008 14:50

En fait, tu as raison Sédullos, ce n'est pas du tout ce que je voulais dire. Je me suis très mal exprimée. :? Ce que je voulais dire n'a rien, mais, rien à voir. Je tenais juste à souligner que ce sont les privilèges de la suprématie. Tu vois que ça n'a aucun rapport. J'ai besoin de beaucoup d'heures de sommeil !!! :)
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Messagede sule » Jeu 28 Fév, 2008 14:59

C'est vrai que tout ceci est intéressant pour moi, j'ai noté depuis le début toutes les infos que vous avez tous pu m'apporter au fil du débat et j'en ferai une synthèse quand ce thème sera épuisé.

Encore merci.
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Messagede Sedullos » Lun 03 Mar, 2008 16:14

Illanua a écrit:Et pour les fortes têtes qui conservaient leurs deux mains, il y avait encore la possibilité d'être envoyés aux mines de plomb et d'argent en Sardaigne. Il me semble que dans ce cas les prisonniers ne devenaient pas propriété de marchands privés, mais étaient directement envoyés aux mines, propriétés d'Etat, et perdaient leur "statut" de prisonniers de guerre en devenant esclaves. Parfois en compagnie de gêneurs politiques et sectaires agités.

Des auteurs antiques parlent de l'envoi de prisonniers aux mines et de leurs conditions de travail, apparemment épouvantables, mais pas pu remettre la main sur des références...


Iluana
Va voir chez Diodore de Sicile, Histoire universelle, livre V.
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Messagede ejds » Mar 04 Mar, 2008 16:38

Illanua a écrit:Sur les déditices :

Voilà, cela nous donne une piste. Esclaves déditices, esclaves déditices étrangers, puis déditices libres et déditices étrangers libres sont bien des statuts régis par le droit romain. Je pense qu’on doit pouvoir encore trouver des précisions, notamment sur la manière d’attribuer ce genre de statut, ainsi que sur les procédures décisionnelles.

Déditice, du latin dediticii, celui qui a capitulé, s’est rendu …; du verbe dedico, dédier, consacrer ; deditio, reddition, soumission, capitulation.

Les ennemis qui s’étaient rendus, ou dedititii, ceux pris soit sur le champ de bataille, soit après l’assaut d’une ville, étaient vendus à l’enchère ou encan, se retrouvent dans les textes de Tite-Live, Histoire romaine, livre V, XXII, et concerne ainsi la reddition des habitants de la ville étrusque de Véies vers 396 av. J.-C.

Le livre VII, XXXI, raconte la guerre menée contre les Samnites en 343 av. J.-C. : — « ... quidquid deinde patiemur, dediticii uestri passur. (... si jamais on nous outrage, c’est vos sujets qui seront outragés.) »
Ceux qui avaient mis bas les armes volontairement, et qui s’étaient rendus, conservaient les droits de liberté. Bien souvent, les dieux étaient fêtés comme des conquêtes comme pour les remercier d’avoir été du côté des vainqueurs.

Le terme "deditione", reddition ou soumission, des Helvètes se retrouve dans César, en 58 av. J.-C., Guerre des Gaules, I, 27 : — « Helvetii, omnium rerum inopia adducti, legatos de deditione ad eum miserunt. (Les Helvètes, réduits à la dernière extrémité, lui envoyèrent des députés pour traiter de leur soumission.) »

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Messagede Sedullos » Mer 05 Mar, 2008 11:25

ejds a écrit: Bien souvent, les dieux étaient fêtés comme des conquêtes comme pour les remercier d’avoir été du côté des vainqueurs.

e.


Salut à tous,

ejds, ce que tu mentionnes concerne l' evocatio ou "appel".

Avant l'assaut final, la ville étant investie, le général romain invite les dieux de la cité adverse à abandonner celle-ci et ses habitants en échange d'un temple et d'un culte à Rome.

On a un exemple historique avec Carthage en 146 av. J.-C. Scipion Emilien invite tous les dieux de Carthage selon Macrobe ou la principale divinité, Tanit équivalent de Junon, selon Appien à recevoir à Rome un "accueil chaleureux dans sa patrie, un temple, des sacrifices", cf Histoire militaire des guerres puniques : 264-146 avant J.-C. / Yann Le Bohec.- Monaco : Rocher, 2003.- (L'art de la guerre), p. 309-310.

Yann Le Bohec ajoute : "Abandonnée par ses dieux, Carthage ne pourrait plus résister."
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Messagede ejds » Jeu 06 Mar, 2008 11:04

Sedullos a écrit:Avant l'assaut final, la ville étant investie, le général romain invite les dieux de la cité adverse à abandonner celle-ci et ses habitants en échange d'un temple et d'un culte à Rome.

On a un exemple historique avec Carthage en 146 av. J.-C. Scipion Emilien invite tous les dieux de Carthage selon Macrobe ou la principale divinité, Tanit équivalent de Junon, selon Appien à recevoir à Rome un "accueil chaleureux dans sa patrie, un temple, des sacrifices", cf Histoire militaire des guerres puniques : 264-146 avant J.-C. / Yann Le Bohec.- Monaco : Rocher, 2003.- (L'art de la guerre), p. 309-310.

Yann Le Bohec ajoute : "Abandonnée par ses dieux, Carthage ne pourrait plus résister."

On retrouve aussi cette "invitation", à l'issue de la prise de la ville étrusque de Véies par le général Camille (v. 396 av. J.-C.), dans les commentaires de Tite-Live, livre V, XXII, avec les anotations de Montesquieu : :shock:

Tite-Live, livre V, a écrit: ----Image

----XXII. Le jour suivant, le dictateur vendit les têtes libres à l'encan : ce fut le seul argent qui rentra au trésor. Cette mesure irrita le peuple; il ne tenait compte du butin qu'il avait emporté, ni au général qui, en renvoyant au sénat la décision d'une affaire dont il était le maître, avait ménagé une excuse à son avarice; ni au sénat, mais aux Licinius : au fils, pour avoir engagé la discussion dans le sénat; au père, pour avoir ouvert un avis si populaire.

Toutes les dépouilles profanes de Véies une fois enlevées, les Romains s'emparèrent des richesses des dieux, et des dieux eux-mêmes, mais en adorateurs plutôt qu’en ravisseurs. Des jeunes gens choisis dans l'armée entière, le corps purement lavé de toute souillure, vêtus de blanc, furent désignés pour transporter Junon Reine à Rome. Ils entrèrent avec respect dans son temple, et ce ne fut point sans un scrupule religieux qu’ils portèrent la main sur elle : car les usages de l'Étrurie n'accordent ce droit qu'à un prêtre d'une certaine famille. L’un d'eux ensuite, ou par une inspiration divine, soit par une saillie de jeune homme, ayant dit : « Veux-tu aller à Rome, Junon ? » les autres s'écrièrent qu’elle avait, par un signe, exprimé son contentement, ce qui donna lieu à cette tradition fabuleuse qu'on l'entendit parler et dire : « Je veux bien. » Toutefois, il est certain, qu'on put l'enlever de sa place sans recourir à de bien grands efforts; on eût dit qu’elle suivait, légère et docile, les mouvements de ceux qui la portaient. Elle arriva intacte sur l'Aventin, son éternelle demeure, où l'avaient appelée les vœux du dictateur romain, où Camille lui avait voué un temple qu'il lui dédia par la suite. Ainsi tomba Véies, la plus opulente ville du nom étrusque, et dont la grandeur se révéla même en sa ruine. Après dix étés, dix hivers d'un siège non interrompu, après avoir plus porté que reçu de dommage, à la fin, cédant à la pression de la destinée, elle se laissa vaincre aux efforts de l'art, mais la force ne put la réduire.



NOTES DU LIVRE V.

----CHAP. XXII. Deportanda Roman Regina Juno.

----« La politique qui régnoit dans la religion des Romains, dit Montesquieu, se développa encore mieux dans leurs victoires. Si la superstition avait été écoutée, on auroit porté chez les vaincus les dieux des vainqueurs; on auroit renversé leurs temples; et, en établissant un nouveau culte, on leur aurait imposé une servitude plus rude que la première. On fit mieux : Rome se soumit elle-même aux divinités étrangères, elle les reçut dans son sein; et par ce lien, le plus fort qui soit parmi les hommes, elle s’attacha des peuples qui la regardèrent plutôt comme le sanctuaire de la religion que comme la maîtresse du monde.

---- « Mais, pour ne point multiplier les êtres, les Romains, à l’exemple des Grecs, confondirent adroitement les divinités étrangères avec les leurs; s’ils trouvoient dans leurs conquêtes un dieu qui eût du rapport à quelqu’un de ceux qu’on adoroit à Rome, ils l’adoptoient, pour ainsi dire, en lui donnant le nom de la divinité romaine, et lui accordoient, si j’ose me servir de cette expression, le droit de bourgeoisie dans leur ville. Ainsi, lorsqu’ils trouvoient quelque héros fameux qui eût purgé la terre de quelque monstre, ou soumis quelque peuple barbare, ils lui donnoient aussitôt le nom d’Hercule. « Nous avons percé jusqu’à l’Océan, dit Tacite (de Mor. German., c. 34) ; et nous y avons trouvé les colonnes d’Hercule; soit qu’Hercule y ait été, soit que nous ayons attribué à ce héros tous les faits dignes de sa « gloire. » Varron a compté quarante-quatre de ces dompteurs de monstres; Cicéron n’en a compté que six, vingt-deux Muses, cinq Soleils, quatre Vulcains, cinq Mercures, quatre Apollons, trois Jupiters. Eusèbe va plus loin; il compte presque autant de Jupiters que de peuples.

----« Les Romains, qui n’avoient proprement d’autre divinité que le génie de la république, ne faisoient point d’attention au désordre et à la confusion qu’ils jetoient dans la mythologie : la crédulité des peuples, qui est toujours au-dessus du ridicule et de l’extravagant, réparoit tout. »
(MONTESQUIEU, Politique des Romains dans la religion.)


Histoire romaine de Tite-Live, nouvelle édition par M. E. Pessonneaux, Librairie Garnier Frères, tome deuxième, année inconnue (1947 ?), 512 pages, pp. 42—3 et 102—3.

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