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Vous êtes dans Encyclopédie de l'Arbre Celtique > Celtes en Italie (Gaule Cisalpine) / Hasdrubal Barca envahit le nord de l'Italie [printemps : été -207] / bataille du Métaure [été -207]
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Encyclopédie Celtique

La bataille du Métaure [été -207]

La bataille du Métaure (été 207 av. J.-C.)

La capture des messagers d'Hasdrubal permit au consul Caius Claudius Nero de devancer les projets des Carthaginois. Voyant ici l'occasion d'empêcher la jonction des deux armées carthaginoises, il se porta à la rencontre de son collègue, le consul Marcus Livius Salinator, de manière à affronter ensemble Hasdrubal, alors cantonné près de Sena (Sinigaglia, province d'Ancône). L'arrivée de Caius Claudius Nero avait été gardée secrète et bien qu'extérieurement rien n'avait changé au niveau du camp du consul Marcus Livius Salinator et de celui du préteur Lucius Porcius Licinus, quelques petits indices permirent à Hasdrubal d'en détecter la présence. En conséquence, il renonça à affronter une armée romaine dont il ne pouvait pas estimer précisément les forces et s'en éloigna nuitamment en suivant le cours du Metaurus (le Métaure) (Frontin, Stratagèmes, I, 1, 9 ; 2, 9 ; Tite-Live, Histoire romaine, XXVII, 47).

Au cours de sa retraite, Hasdrubal fut abandonné par ses guides, si bien qu'il rencontra d'importantes difficultés dans les marais, alors qu'il voulait faire traverser le Metaurus à ses troupes (Appien, Hannibalique, VIII, 52 ; Tite-Live, Histoire romaine, XXVII, 47). Le consul Caius Claudius Nero profita de l'épuisement et de la dispersion des troupes carthaginoises, il les prit en chasse à la tête de la cavalerie, secondé par le préteur Lucius Porcius Licinus, à la tête de troupes légères. Contraint à se replier sur une position propice à l'établissement d'un camp, Hasdrubal trouva sur sa route l'armée du consul Marcus Livius Salinator en ordre de bataille, rapidement rejoint par celle de Caius Claudius Nero. Aux troupes romaines, Hasdrubal opposa au centre, en première ligne, ses éléphants. Derrière eux, il fit placer les Ligures. Il déploya les Gaulois sur son aile gauche, face à Caius Claudius Nero, et les Espagnols et les Carthaginois sur son aile droite, face à Marcus Livius Salinator (Polybe, Histoire générale, XI, 1 ; Tite-Live, Histoire romaine, XXVII, 48).

Le combat s'engagea par la charge de l'aile romaine de Marcus Livius Salinator, contre celle des Espagnols et des Carthaginois. Compte-tenu de la topographie du champ de bataille, l'aile droite romaine et les Gaulois ne s'affrontèrent pas, puisque leurs rangs étaient séparés par une colline. L'intervention des éléphants des Carthaginois fut peu décisive, puisqu'elle déstabilisa aussi bien les rangs romains que carthaginois. Peu après, les Romains prirent progressivement le dessus sur les Espagnols et Carthaginois, puis les Ligures, avant de gagner les rangs gaulois. Jusqu'alors épargnés par les affrontements, les Gaulois furent alors surpris, alors que nombre d'entre eux se reposaient et impitoyablement taillés en pièces (Polybe, Histoire générale, XI, 1b ; 2 ; 3 ; Tite-Live, Histoire romaine, XXVII, 49). La déroute des Carthaginois et de leurs alliés fut telle, qu'Hasdrubal fut tué au cours des affrontements. Selon Tite-Live, assistant au délitement de ses troupes, Hasdrubal éperonna son cheval et se jeta contre une cohorte romaine (Histoire romaine, XXVII, 49). Polybe, de son côté, évoque sans plus de détail une mort les armes à la main (Histoire générale, XI, 2). La victoire romaine fut totale et les bagages des Carthaginois et de leurs alliés tombèrent entre les mains des Romains, ce qui leur permit de faire un riche butin. D'après Tite-Live, le bilan fut très lourd, puisque au cours de la cette bataille, les Carthaginois perdirent 56000 hommes et 5400 furent faits prisonniers, tandis que les Romains (et leurs alliés) n'en perdirent que 8000 (Histoire romaine, XXVII, 49). La version de Polybe fait état quant à elle de la mort de 10000 Carthaginois et alliés (dont les Gaulois), tandis que les Romains n'en auraient perdu que 2000 (Polybe, Histoire générale, XI, 3). Quelques alliés des Carthaginois parvinrent à échapper au massacre. Ainsi, une colonne de Gaulois cisalpins et de Ligures, n'ayant pas pris part au combat ou ayant réussi à s'en extraire, s'enfuit, permettant aux soldats de regagner leurs patries respectives (Tite-Live, Histoire romaine, XXVII, 49). Ce fut également le cas d'un certain nombre de Celtibères, qui parvinrent à regagner leur patrie pour les uns, tandis que les autres rejoignirent les rangs d'Hannibal (Appien, Hannibalique, VIII, 53) (1).

Ayant détruit l'armée carthaginoise qui menaçait le nord de l'Italie, les deux consuls marchèrent conjointement vers Metapontum (Metaponto / Bernalda, province de Matera) où se trouvaient cantonnées les troupes d'Hannibal. Là, il signifièrent à Hannibal la défaite de la seconde armée carthaginoise, en jetant sa tête tranchée d'Hasdrubal, son frère, devant son camp (Florus, Abrégé de l'Histoire romaine, II, 6 ; Frontin, Stratagèmes, II, 9, 2 ; Tite-Live, Histoire romaine, XXVII, 51).


(1) Peut-être ne furent-ils pas les seuls ? En effet, il est possible d'imaginer qu'Hamilcar et ses troupes, qui agitèrent les Gaulois cisalpins en 201-200 av. J.-C., aient également été des rescapés de ce carnage. Il est cependant plus probable qu'ils aient été des débris de l'armée de Magon Barca, rescapés de la victoire de Publius Quinctilius Varus et de Marcus Cornelius Cethegus (fin de l'été 203 av. J.-C.).

Appien, Hannibalique, VIII, 52 : "Hasdrubal n'avait pas encore l'intention de combattre, mais il s'empressait de rejoindre son frère. Il battit en retraite, marchant de nuit au milieu des marais et des étang et le long d'un fleuve infranchissable, où il se perdit. Au point du jour les Romains les surprirent, alors qu'ils étaient dispersés et lassés par leur marche et l'absence de sommeil. Ils tuèrent un grand nombre, groupés autour de leur chef, alors qu'ils cherchaient à se rassembler et se mettre en ordre de bataille. Hasdrubal lui-même fut tué avec eux. Bon nombre d'entre eux furent fait prisonniers. C'est ainsi que l'Italie fut délivrée d'une grande crainte, car Hannibal n'aurait jamais été vaincu s'il avait reçu cette force supplémentaire."

Appien, Hannibalique, VIII, 53 : "Il me semble qu'un dieu accorda cette victoire aux Romains comme compensation pour le désastre de Cannes, car elle survint peu de temps après et fut d'une importance à peu près égale. Dans les deux cas les généraux perdirent la vie, et le nombre de soldats tués et de prisonniers fut presque tout à fait le même dans chaque cas. Chacun prit également le camp de l'autre et une grande quantité de bagages. Ainsi la fortune de Rome fut tout à tout bonne et mauvaise. Les Celtibériens qui échappèrent au carnage, les uns rentrèrent dans leur propre pays et les autres rejoignirent Hannibal."

Florus, Abrégé de l'Histoire romaine, II, 6 : "Mais un tel courage, une telle faveur des dieux allaient être inutiles. Asdrubal, frère d'Hannibal, arrivait d'Espagne avec une nouvelle armée, des forces nouvelles, et l'appareil d'une nouvelle guerre. Nous étions perdus sans aucun doute, si ce général avait fait sa jonction avec son frère. Mais à peine était-il descendu des Alpes, qu'au moment où il s'apprêtait à camper près du Métaure, il fut battu à son tour par les troupes réunies de Claudius Néron et de Livius Salinator. Néron contenait Hannibal, alors refoulé tout au fond de l'Italie, Livius avait conduit son armée dans une direction tout opposée c'est-à-dire tout à fait à l'entrée même de l'Italie. Un très grand espace, l'Italie dans toute sa longueur, séparait les deux consuls. Comment purent-ils se concerter et réunir si rapidement leurs troupes pour tomber à l'improviste sur l'ennemi avec toutes leurs forces sans attirer l'attention d'Hannibal ? Il est difficile de le dire. Mais quand Hannibal apprit la nouvelle et aperçut la tête de son frère qu'on avait jetée devant son camp : " Je reconnais, dit-il, l'infortune de Carthage ". Ce fut le premier aveu arraché à cet homme, et comme un présage du destin imminent. On fut désormais certain qu'Hannibal, de son propre aveu, pouvait être vaincu."

Frontin, Stratagèmes, I, 1, 9 : "Claudius Néron, voulant détruire l'armée d'Asdrubal avant que celui-ci n'eût fait sa jonction avec Hannibal son frère, résolut, dans ce but, d'aller lui-même, à cause de l'infériorité de ses propres forces, se joindre sans délai à son collègue Livius Salinator, à qui avait été confié le soin de la guerre. Mais comme il fallait éviter qu'Hannibal, en face de qui il avait son camp, s'aperçût de son départ ; après avoir choisi trois cents soldats des plus braves, il ordonna à ceux de ses lieutenants qu'il laissait de maintenir le même nombre de sentinelles et de veilles, de faire allumer la même quantité de feux, et enfin de laisser au camp le même aspect, afin qu'Hannibal, exempt de soupçon, n'osât rien contre le peu d'hommes qui devaient y rester. S'étant ensuite réuni dans l'Ombrie à son collègue en cachant sa marche, il défendit d'agrandir le camp, de peur de donner aucun indice de son arrivée au Carthaginois, qui eût refusé le combat s'il se fût douté que les deux consuls avaient réuni leurs forces. Il l'attaqua donc, ainsi abusé, avec des forces doubles, le vainquit, et revint, plus rapidement que tout courrier, en face d'Hannibal. Ainsi, des deux plus habiles généraux des Carthaginois, il réussit, par un même plan de conduite à tromper l'un, à écraser l'autre."

Frontin, Stratagèmes, I, 2, 9 : "Hasdrubal, frère d'Hannibal, comprit que l'armée de Livius était réunie à celle de Néron, malgré la précaution qu'ils avaient eue de ne pas doubler le camp, en voyant les chevaux harassés par une longue route, et les visages des hommes plus halés, comme cela arrive après une marche."

Frontin, Stratagèmes, II, 3, 8 : "Livius Salinator, et Claudius Néro, lors de la seconde guerre punique, voyant qu'Hasdrubal, pour éviter le combat, s'était rangé en bataille sur une éminence dont le terrain était inégal, portèrent toutes leurs troupes sur les ailes, après avoir dégarni leur centre, attaquèrent l'ennemi des deux côtés, et le taillèrent en pièces."

Frontin, Stratagèmes, II, 9, 2 : "Claudius Nero après avoir défait Hasdrubal fit jeter sa tête dans le camp de son frère. À cette vue, Hannibal éprouva une profonde tristesse, et tout le camp fut frappé de consternation."

Polybe, Histoire générale, XI, 1b : "Tout cela ne plaisait guère à Asdrubal, mais les circonstances ne permettaient pas de reculer ; et comme il voyait les ennemis devant le camp et s'ébranlant déjà, force lui fut de disposer pour le combat les Espagnols et les Gaulois qui étaient avec lui. Il plaça en avant ses éléphants, au nombre de dix, augmenta la profondeur des rangs, resserra toute son armée dans un espace assez étroit, se plaça lui-même au centre, derrière ses éléphants, et dirigea son attaque vers l'aile gauche des Romains : il était décidé à vaincre ou à mourir. Livius s'avança fièrement à rencontre de l'ennemi , et dès qu'il l'eut rencontré, se battit avec la plus grande ardeur. Cependant Claudius, posté à l'aile droite, ne pouvait ni remuer, ni envelopper l'ennemi, gêné qu'il était par les difficultés mêmes du terrain sur lesquelles Asdrubal avait compté en attaquant la gauche es Romains. Désolé d'être réduit à l'inaction, il trouva dans son malheur même l'inspiration de ce qu'il devait faire. Il détacha donc de l'aile droite tous les soldats qui occupaient les dernières lignes, tourna par derrière l'aile gauche de l'armée romaine, et prit en flanc les Carthaginois qui combattaient sur les éléphants. Jusqu'alors la victoire était demeurée indécise. Des deux côtés on courait les mêmes dangers à être vaincu. Les Romains, s'ils étaient défaits, n'avaient pas plus de chance de salut que les Carthaginois et les Espagnols ; les éléphants étaient également nuisibles aux deux partis : pressés au milieu des combattants, criblés de flèches, ils jetaient aussi bien l'épouvante dans les rangs des Espagnols que dans ceux des Romains. Mais quand Claudius vint prendre l'ennemi en queue, la lutte cessa d'être égale pour les Espagnols qui se voyaient attaqués de tous côtés. La plus grande partie resta sur le champ de bataille, six éléphants périrent au milieu du. carnage ; les quatre autres qui avaient pénétré dans les rangs furent pris ensuite sans leurs Indiens."

Polybe, Histoire générale, XI, 2 : "Asdrubal, qui se montra homme de coeur en mainte occasion, mais surtout en cette bataille, mourut l'épée à la main. Ne passons pas sous silence l'éloge de ce capitaine. Nous avons déjà dit qu'il était frère d'Annibal et que celui-ci, au moment où il le quitta pour aller en Italie, lui remit la direction des affaires de l'Espagne."

Polybe, Histoire générale, XI, 3 : "Les Romains, vainqueurs, pillèrent aussitôt le camp des ennemis et immolèrent, comme des victimes, un grand nombre de Gaulois qui dormaient sur la paille, engourdis par l'ivresse ; ils réunirent ensuite tous les prisonniers et leur vente rapporta au trésor plus de trois cents talents. Les Carthaginois, en y comprenant les Gaulois, périrent au nombre d'environ dix mille : les Romains perdirent deux mille hommes. Quelques Carthaginois de haut rang tombèrent vivants entre les mains des vainqueurs, mais le reste fut tué. A la première nouvelle de cette victoire, Rome n'y voulut pas croire, tant elle souhaitait qu'elle fût vraie : mais quand plusieurs courriers furent arrivés, qui non-seulement racontèrent la bataille, mais de plus donnèrent les détails, la ville tout entière ressentit une immense joie : on para les enceintes sacrées, les temples regorgèrent d'offrandes et de victimes. Enfin, telle était la confiance, tel était l'enthousiasme, que cet Annibal, qui tout à l'heure encore faisait trembler, ne semblait déjà plus être en Italie."

Tite-Live, Histoire romaine, XXVII, 47 : "Déjà les Carthaginois se tenaient rangés devant leur camp ; le retard apporté au combat vint de ce qu'Hasdrubal, étant venu en avant des enseignes avec quelques cavaliers, remarqua chez ses ennemis des boucliers rouillés, qu'il n'avait pas vus auparavant, des chevaux plus efflanqués ; les troupes lui semblèrent aussi plus nombreuses que d'ordinaire. Soupçonnant ce qu'il en était réellement, il fit vite sonner la retraite, et envoya des patrouilles au fleuve d'où l'on tirait l'eau ; on pouvait là enlever quelques adversaires, et remarquer si par hasard il n'y en avait pas ayant un teint plus bronzé, comme quand on vient de faire une marche ; en même temps, il ordonne à des cavaliers de faire à distance le tour des camps, d'observer si quelque part on a, pour les agrandir, avancé le retranchement, et d'écouter attentivement si les sonneries y sont faites une ou deux fois. Tous ces renseignements furent rapportés en détail, et les camps n'ayant pas été agrandis, cela trompait les Carthaginois : il y en avait deux - comme avant l'arrivée du second consul - celui de Marcus Livius et celui de Lucius Porcius ; ni dans l'un, ni dans l'autre, on n'avait allongé nulle part le retranchement, pour agrandir la place réservée aux tentes. Mais une chose frappa le vieux général Carthaginois, habitué à avoir des Romains comme ennemis : on lui rapporta que les sonneries se faisaient une fois dans le camp du préteur, deux fois dans celui des consuls. Il y avait donc là certainement deux consuls ; comment l'un d'eux s'était-il éloigné d'Hannibal ? Voilà le souci qui étreignait Hasdrubal. Le dernier soupçon qu'il pût former était la réalité : Hannibal joué et trompé sur un point si important qu'il ignorât où se trouvaient le général, l'armée dont le camp était à côté du sien ! Sans doute, démoralisé par une défaite qui n'avait pas été petite, n'avait-il pas osé suivre le consul. Et Hasdrubal craignait bien d'être venu trop tard lui-même au secours d'une situation déjà perdue, de voir les Romains connaître désormais la même fortune en Italie qu'en Espagne. De temps en temps, il pensait que sa lettre n'était pas parvenue à Hannibal, et que le consul, l'ayant interceptée, était accouru pour l'écraser. Étreint par ces soucis, tous feux éteints, à la première veille, après avoir dit à ses soldats de ramasser en silence les ustensiles de campement, il ordonne le départ. Dans la hâte et le désordre de cette nuit, les guides, mal gardés, vont l'un se cacher dans le refuge où il avait projeté de le faire, l'autre, par un passage connu de lui, traverser à la nage le Métaure. Ainsi abandonnée de ses guides, la colonne carthaginoise erre d'abord dans la campagne ; un certain nombre de soldats, fatigués par l'insomnie et les veilles, se couchent çà et là et laissent trop peu d'hommes autour des enseignes. Hasdrubal ordonne, en attendant que le jour montre la route, de suivre le bord du fleuve ; et comme, en déroulant sa marche pleine de détours par les boucles et les méandres de son cours sinueux, il n'avait guère avancé, dès que le jour lui aurait montré un endroit propice, il voulait traverser. Mais, à mesure qu'on s'éloignait de la mer, les rives, de plus en plus hautes, resserrant toujours davantage le fleuve et empêchant Hasdrubal de trouver un gué, il perdit un jour qui donna à l'ennemi le temps de l'atteindre."

Tite-Live, Histoire romaine, XXVII, 48 : "Néron arriva d'abord avec toute la cavalerie ; Porcius le suivit avec les troupes légères. Tandis qu'ils harcelaient de tous côtés et chargeaient la colonne ennemie fatiguée, et que déjà, renonçant à une marche semblable à une fuite, le Carthaginois voulait piqueter un camp sur une hauteur dominant la rive du fleuve, arrive Livius avec toute l'infanterie, rangée et armée non pour une marche, mais pour engager sur-le-champ le combat. Toutefois, quand toutes les troupes romaines furent réunies et le front aligné, Claudius (Néron) dirigea le combat à l'aile droite, Livius à gauche, et l'on chargea le préteur de veiller au centre. Hasdrubal, cessant de fortifier un camp lorsqu'il vit qu'il fallait livrer bataille, plaça en première ligne, devant les enseignes, ses éléphants ; pour les encadrer, il mit à l'aile gauche, contre Claudius, les Gaulois, auxquels il se fiait moins qu'il ne les croyait craints de l'ennemi ; l'aile droite, contre Marcus Livius, il la prit pour lui-même et pour ses Espagnols - c'était là, en ces vieux soldats, qu'il mettait le plus d'espoir - ; les Ligures, il les plaça au centre, derrière les éléphants. Mais cette armée se trouvait rangée ainsi en profondeur plus qu'en largeur ; une colline qui s'avançait couvrait les Gaulois. La partie du front qu'occupaient les Espagnols et l'aile gauche romaine se chargèrent ; toute la droite romaine, débordant le combat, n'avait rien à faire : la colline située devant elle lui interdisait toute attaque, de front ou de flanc. Entre Livius et Hasdrubal, au contraire, s'était engagée une grande lutte ; il s'y faisait, de part et d'autre, un affreux carnage. Là se trouvaient les deux généraux, là se trouvaient la plupart des fantassins et des cavaliers romains, là aussi les Espagnols, vieux soldats connaissant la façon de combattre des Romains, et les Ligures, race endurcie aux armes. De ce même côté, s'étaient tournés les éléphants, qui, au premier choc, avaient mis en désordre les troupes placées devant les enseignes, et fait reculer déjà les enseignes ; puis, la mêlée et les cris grandissant, ils devenaient moins dociles à diriger, et roulaient entre les deux armées comme s'ils ne savaient à qui ils étaient, errant à peu près comme des navires sans gouvernail. Claudius, qui criait à ses soldats : " Pourquoi donc avons-nous arpenté à la hâte tant de chemin ? ", s'était efforcé en vain de gravir la colline en face de lui ; puis, constatant qu'on ne pouvait de ce côté arriver à l'ennemi, il retire quelques cohortes de l'aile droite, où il voyait qu'on monterait une garde oisive plutôt qu'on ne se battrait, les amène derrière les lignes romaines pour faire un mouvement tournant, et, à la surprise non seulement de l'ennemi, mais des siens, charge le flanc droit des ennemis ; et il alla si vite que s'étant montré sur leur flanc, bientôt ses hommes les attaquaient déjà de dos. Ainsi de tous côtés, de face, de flanc, de dos, on massacre Espagnols et Ligures ; et maintenant le carnage était arrivé aux Gaulois. Ce fut là qu'il y eut le moins de lutte : car beaucoup étaient loin de leurs drapeaux, s'étant échappés pendant la nuit et couchés pour dormir, çà et là, dans les champs ; et ceux qui étaient présents, accablés par la marche et les veilles - leur corps n'ayant aucune résistance à la fatigue - avaient peine à porter leurs armes sur leurs épaules ; de plus, on était déjà au milieu du jour, et la soif et la chaleur les offraient tous, la bouche ouverte, à qui voulait les tuer ou les prendre."

Tite-Live, Histoire romaine, XXVII, 49 : "Il y eut plus d'éléphants tués par leurs conducteurs mêmes que par l'ennemi. Ces conducteurs avaient un ciseau et un marteau ; quand les bêtes commençaient à s'emporter et à se ruer contre leurs propres troupes, leur maître, appliquant le ciseau entre des oreilles, juste sur l'articulation qui joint la tête à la nuque, l'y enfonçait du coup le plus fort possible. C'était le moyen le plus rapide qu'on eût trouvé pour tuer de telles masses, quand elles avaient ôté l'espoir de les diriger ; et il avait été institué par Hasdrubal, ce général digne de mémoire pour bien des exploits, mais surtout pour cette bataille. Il soutint les combattants carthaginois en les encourageant et en affrontant comme eux le danger ; il ralluma l'ardeur des soldats harassés et renonçant, par dégoût et fatigue, à la lutte, soit en les suppliant, soit en les blâmant ; il rappela les fuyards, et, en plusieurs endroits, rétablit le combat déjà abandonné ; enfin, voyant que la chance était, sans aucun doute, du côté des Romains, pour ne pas survivre à l'armée si grande qui avait suivi son nom, il éperonna son cheval et se jeta sur une cohorte romaine. Là, d'une façon digne de son père Hamilcar et de son frère Hannibal, il tomba en combattant. Jamais pendant cette guerre on n'avait, en une seule bataille, tué tant d'ennemis ; c'était, semblait-il, la revanche de la défaite de Cannes, égale à celle-ci par le massacre et du général et de l'armée ennemie. Cinquante-six mille Carthaginois furent tués ; on en prit cinq mille quatre cents ; il y eut beaucoup d'autre butin en tout genre, et surtout en or et en argent. Bien mieux, des citoyens romains, qui se trouvaient prisonniers chez l'ennemi, furent recouvrés au nombre de plus de quatre mille ; ce fut une consolation pour les soldats perdus dans ce combat. Car la victoire fut loin de ne pas coûter de sang : il y eut environ huit mille Romains et alliés de tués ; et les vainqueurs eux-mêmes étaient si rassasiés de sang et de carnage, que, le lendemain, comme on annonçait au consul Livius que des Gaulois Cisalpins et des Ligures, absents du combat ou échappés au massacre, se retiraient en une colonne sans général reconnu, sans enseignes, sans ordre ni commandement aucun, qu'on pouvait, en lançant sur eux une aile de cavalerie, les anéantir, il répondit : " Qu'il reste quelques hommes pour faire connaître la défaite des ennemis et notre valeur  "."

Tite-Live, Histoire romaine, XXVII, 50 : "Néron, partant la nuit qui suivit, la bataille, en poussant sa colonne plus vite encore qu'à l'aller revint, cinq jours après, à son campement et à son ennemi propre. Son passage provoqua une affluence moins grande, parce que, cette fois, nul messager ne l'avait précédé, mais une telle allégresse, que les gens déliraient presque de joie. Quant à Rome, on ne peut bien dire, ni dépeindre, aucun des deux sentiments qu'elle éprouva ni quand la cité, incertaine, attendait le résultat, ni quand elle reçut la nouvelle de la victoire. Pas un seul jour, depuis qu'on apprit le départ du consul Claudius, du lever au coucher du soleil, aucun sénateur ne s'éloigna de la curie et des magistrats, ni le peuple du forum : les matrones, ne pouvant rendre aucun service, s'étaient tournées du côté des prières et des adjurations, et, répandues par tous les sanctuaires, fatiguaient les dieux de leurs supplications et de leurs voeux. Dans la cité si inquiète et si anxieuse parvint d'abord le bruit, peu sûr, que deux cavaliers de Narnia, arrivés au camp qui barrait le défilé de l'Ombrie, disaient sortir d'une bataille où les ennemis avaient été taillés en pièces. D'abord les oreilles seules, plutôt que les esprits, s'ouvrirent à cette nouvelle, trop importante, en effet, et trop heureuse pour qu'on pût la concevoir ou y croire fermement ; sa rapidité même empêchait d'y ajouter foi : c'était deux jours avant, disait-on, que la bataille s'était livrée. Puis on apporte une lettre, envoyée du camp par Lucius Manlius Acidinus, sur l'arrivée de ces cavaliers de Narnia. Cette lettre, portée, à travers le forum, au tribunal du préteur, fit sortir les sénateurs de la curie. Il y eut alors une telle bousculade, un tel tumulte du peuple accourant aux portes de la curie, que le courrier ne pouvait y arriver, étant tiré par les gens qui l'interrogeaient et demandaient à grands cris qu'on lût la lettre à la tribune avant de le faire au sénat. Enfin la foule fut écartée et contenue par les magistrats, et l'on put dispenser la joie aux esprits, qui en déliraient. On lut la lettre au sénat d'abord, puis à l'assemblée publique ; et, suivant le naturel de chacun, les uns éprouvaient déjà une allégresse assurée, les autres ne voulaient pas croire à leur bonheur avant d'avoir entendu les envoyés ou une lettre des consuls."

Tite-Live, Histoire romaine, XXVII, 51 : "On annonça ensuite que ces envoyés eux-mêmes approchaient. Cette fois, les gens de tout âge courent à leur rencontre, chacun voulant être le premier à boire de ses yeux et de ses oreilles une si grande joie. Leur colonne ininterrompue arriva jusqu'au pont Mulvius. Les envoyés - c'étaient Lucius Veturius Philo, Publius Licinius Varus, Quintus Caecilius Metellus - entourés d'une foule de personnes de toute sorte, parvinrent au forum, tandis que les uns leur demandaient à eux-mêmes, les autres à leur suite, ce qui s'était passé. À mesure que chacun apprenait que l'armée et le général ennemi avaient été massacrés, que les légions Romaines étaient intactes, les consuls saufs, aussitôt il communiquait à d'autres et propageait sa joie. Après être arrivés avec peine à la curie, et avoir, avec plus de peine encore, écarté la foule, pour qu'elle ne se mêlât pas aux sénateurs, on lut au sénat la lettre (des consuls). Puis on conduisit les envoyés à l'assemblée publique. Lucius Veturius y lut la lettre, puis raconta lui-même avec plus de détails tout ce qui s'était passé, soulevant l'approbation générale, et même, à la fin, les acclamations de toute l'assemblée, qui avait peine à contenir sa joie. Puis on courut de tous côtés les uns faire le tour des temples, afin de rendre grâces aux dieux, les autres chez eux, pour annoncer à leurs femmes et à leurs enfants une nouvelle si heureuse. " Parce que les consuls Marcus Livius et Caius Claudius avaient, en gardant leur armée intacte, massacré le général et les légions ennemies ", le sénat décida trois jours de prières publiques. Le préteur Caius Hostilius lut ce décret à l'assemblée, et une foule d'hommes et de femmes participa à ces prières ; tous les temples, ces trois jours durant, reçurent une foule égale, les femmes en grande toilette, accompagnées de leurs enfants et délivrées, comme si la guerre était terminée, de toute crainte, remerciant les Immortels. Cette victoire changea aussi la situation économique de la cité, car dès lors, comme en temps de paix, on osa conclure des affaires en vendant, en achetant, en prêtant de l'argent, en remboursant les prêts. Le consul Caius Claudius, revenu dans son camp, ordonna de jeter la tête d'Hasdrubal, - qu'il avait apportée, conservée avec soin - devant les postes ennemis, de leur montrer les prisonniers africains enchaînés, comme ils étaient, et même d'envoyer deux d'entre eux délivrés, à Hannibal, pour lui dire ce qui s'était passé. Hannibal, frappé en même temps de deux si grands chagrins, public et privé, déclara, dit-on, qu'il reconnaissait la mauvaise fortune de Carthage ; et, quittant cet endroit pour réunir tous ses auxiliaires, qu'il ne pouvait plus protéger s'ils restaient répandus sur un trop large espace, dans l'angle extrême de l'Italie, dans le Bruttium, il y fit passer et tous les citoyens métapontins, qui abandonnèrent leurs demeures, et, parmi les Lucani, ceux qui étaient sous ses ordres."


Sources:
  • Julien Quiret pour l'Arbre Celtique

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    Abrégé de l'Histoire romaine [Florus] [ ouvrages antiques & anciens ]
    Appien [ auteurs antiques et anciens ]
    Campagne de Publius Quinctilius Varus et de Marcus Cornelius Cethegus [fin de l'été -203] [ Magon Barca occupe l'Italie du Nord [-205:-203] ]
    capture des courriers d'Hasdrubal donne l'avantage aux Romains [-207] (La) [ Hasdrubal Barca envahit le nord de l'Italie [printemps : été -207] ]
    Celtibères [ Les peuples celtes de la péninsule ibérique ]
    Florus [ auteurs antiques et anciens ]
    Gaulois dirigés par le général carthaginois Hamilcar se soulèvent contre Rome [-201:-200] (Les) [ Les Celtes en Italie (Gaule Cisalpine) ]
    Hannibalique [Appien] [ Histoire romaine [Appien] ]
    Hasdrubal Barca envahit le nord de l'Italie [printemps : été -207] [ Les Celtes en Italie (Gaule Cisalpine) ]
    Histoire générale [Polybe] [ ouvrages antiques & anciens ]
    Histoire romaine [Tite-Live] [ ouvrages antiques & anciens ]
    Ligures (Les) [ Informations diverses sur les peuples celtes ]
    Ligures lèvent une armée destinée à soutenir Hasdrubal [hiver -208/-207] (Les) [ Les Celtes en Italie (Gaule Cisalpine) ]
    Polybe [ auteurs antiques et anciens ]
    Romains réinvestissent le territoire de Cremona et de Placentia [printemps -206] (Les) [ Les Celtes en Italie (Gaule Cisalpine) ]
    Sena / Sena Gallica / Senogallia (Sinigaglia) [ villes de Cisalpine (et Ligurie) ]
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