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E - L'art celtique (1/3)
L'unité de l'art celtique
L'art des Celtes est le premier qui fleuri dans l'Europe entière, de
l'Irlande à la mer Noire. On peut constater l'unicité de cet art
par les nombreux objets conservés dans les musées et qui ont été
réalisés sur le continent depuis la fin du Ve siècle jusqu'à
la fin du Ier siècle avant JC et dans les îles britanniques jusqu'à
la période chrétienne incluse.
Cet art se distingue de tous les arts de l'Antiquité. En effet, on trouve
de ses formes une dominance des courbes des motifs végétaux grecs,
étrusques et romains. L'art celtique se caractérise par un véritable
développement de l'abstraction. Finalement, les compositions que l'on
trouve aujourd'hui dans l'art contemporain ne sont pas si éloignées
de cet art !
Plusieurs facteurs sont à l'origine de l'unicité de l'art celtique.
Le premier est probablement la géographie : l'Europe moyenne, c'est à
dire entre les plaines nordiques et les régions méditerranéennes,
possède un climat tempéré. Celui-ci facilite donc l'existence
de mystères de la forêt et d'animaux aussi puissants que redoutables

Torque en or - 500 av JC
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L'art celtique est principalement constitués d'objets
"mobiles". Les oeuvres qui nous sont parvenues sont surtout des petits
objets métalliques : on trouve très peu de traces de sculptures
et de peintures, et l'architecture en bois n'est connue que par les traces
laissées dans le sol. Ces découvertes sont presque uniquement
des objets qui accompagnent dans leur sépulture des personnages
importants : parures en métal précieux ou en bronze, armes
décorées, pièces de harnachement, garnitures métallique
de chars de combat ou de parade, éléments du service à
boisson etc. Les sculptures en pierre sont peu nombreuses, mais ont une
grande importance. Elles ne peuvent être, en effet, que des représentations
à caractère religieux. Des visages humains sont associés
aux mêmes attributs que ceux figurés sur les objets métalliques
: il doit donc s'agir de divinités, malheureusement anonymes, du
panthéon celtique. Les Celtes n'utilisant pas l'écriture, leur
art a une influence beaucoup plus grande. Les objets sont en quelque sorte
un moyen de communication et d'expression. Ils sont composés de
toutes sortes de matières : os, fer, poteries, pierres...Certains
objets doivent probalement être en bois, mais malheureusement, ils
ne survivront pas à l'usure du temps.
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Les pièces sont rarement figuratives : ainsi, on trouve
peu de représentations d'humains dans l'art celtique. Les artistes fuyent
le réalisme et préfèrent les motifs, souvent chargés de symboles
religieux, mais pouvant aussi correspondre au statut social de celui qui
les porte. Les objets sont généralement uniques. Il n'y a pas "d'usine",
donc pas de production en série. L'art n'existe pas seulement pour l'art.
Toutes les pièces sont décorées, les bijoux, bien sûr,
(torques, anneaux de chevilles, pendentifs, colliers, bagues...) mais
également les ustensiles de la vie courante (épées, miroirs, broches,
vases, chenêts de cheminée...).
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Chenêt en fer forgé - 1er siècle
av JC
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Un peu d'histoire…

Un exemple de
romanisation - milieu du 1er sicle ap JC
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Le premier art celtique commence véritablement
à la période d'Hallstatt (âge du fer). L'art est alors surtout
influencé par l'âge du Bronze et il reste réaliste.
Il faut attendre le Ve siècle avant JC, au second
âge du fer (la Tène), pour assister à la naissance
d'une nouvelle forme d'expression artistique, très différente
de l'art géométrique connu jusque-là. Elle s'en distingue
aussi bien par son répertoire que par le développement de
procédés formels tout à fait originaux.
devient stylisé. Ainsi, l'art celtique du Ve siècle
emprunte certains de ses éléments au répertoire étrusque
: un monde végétal composé de palmettes et de fleurs
de lotus, peuplé de personnages affublés d'attributs animaux
et de monstres tels que griffons, sphinx et chimères. Les artisans
celtes retiennent donc principalement de l'art étrusque son aspect
orientalisant, relégué au Ve avant JC à une fonction
presque exclusivement ornementale. Ils puisent d'autres motifs, toujours
de loitaine ascendance orientale, dans l'art des peuples italiques, et
peut-être même dans l'art oriental. C'est ainsi qu'apparaissent
chez les Celtes les thèmes très anciens de l'Arbre de vie,
flanqué de gardiens montrueux et d'oiseaux, et du Maître
des animaux. Ce monde imagé est probablement choisi par les Celtes
car il peut être adapté sans trop de difficulté à
leur propre univers religieux. Il les accompagnera dorénavant,
transformé jusqu'à devenir méconnaissable ou sous
une forme à peine différente des modèles, pendant
près d'un demi-millénaire sur le continent, et bien plus
longtemps encore dans les îles britanniques.
L'autre nouveauté qui marque l'art celtique du
Ve siècle est l'emploi du compas, pour graver directement des décors
ou pour élaborer l'épure de compositions plus complexes
et raffinées. Le goût pour le jeu géométrique
de formes ou de volumes curvilignes, engendré par l'utilisation
de cet outil, restera lui aussi l'un des caractères fondamentaux
de l'art celtique.
quelques traits suffisent à suggérer telle
ou telle créature, ce qui nous prouve que l'artiste, en faisant
ces traits, à un grand savoir-faire et une excellente perception
de l'animal. A cette même période, l'art subit un certain
essor. Les artistes utilisent surtout des motifs abstraits, souvent géométriques.
Ils s'inspirent volontiers des oiseaux et d'autres animaux sacrés
mais peuvent aussi emprunter des motifs à l'art grec, étrusque
et persan.
Au IVème et IIIème siècles avant J-C, les Celtes sont
menacés par les Germains à l'Est et les Romains au Sud. Les objets riches
deviennent plus rares. A l'inhumation succède l'incinération, permettant
de garder une partie des richesses que l'on aurait placées dans la tombe
du mort si celui-ci avait été inhumé. Quelques temps plus tard, la monnaie
commence à être vraiment utilisée, représentant souvent des événements.
A partir du milieu du Ier siècle avant JC jusqu'au IIème siècle après
JC, c'est la conquête de la Celtie par les Romains. L'art tend alors à
se "romaniser". Seules la Grande Bretagne et l'Irlande arrivent à conserver
leurs symboles traditionnels.
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Peu après la conquête des romains, le christianisme s'implante.
Un nouvel art naît : croix de pierre ornementées, enluminures sur les
manuscrits…On retrouve d'ailleurs sur ces derniers les traces de techniques
utilisées autrefois sur le fer. Au Vème siècle, les Celtes chrétiens excellent
dans l'art de l'enluminure. Ils utilisent un support nouveau, le vélin
(voir illustrations ci-contre), constitué de peaux de veaux et de moutons.
Ils peuvent écrire sur ce vélin à l'aide de plumes d'oies et de corbeau.
Les couleurs sont réalisées grâce à de nombreux minéraux (plomb pour le
rouge et le blanc, cuivre pour le vert…)
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Livre de Kells - Irlande - Fin du VIIIème
siècle ap JC
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Livre de Durrow - Dublin - VIIème
siècle ap JC
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Evangéliaire de Lindisfarne
- Londres - Début du VIIIème siècle ap JC
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L'artiste et artisan celte
Les artistes sont de véritables professionnels, comme
le prouve la qualité des oeuvres réalisées. Ils sont probablement
sous la coupe d'un personnage plus puissant, qui possèdent ses propres ressources
minières et donc, de fait, les artistes pour les transformer. Les oeuvres sont
souvent commandées par ces puissants. En ce qui concerne le domaine du militaire,
il est probable que les artistes se déplacent avec les convois de manière à
graver les boucliers, les épées et autres armes. Des pièces de même type, trouvées
à des endroits différents laissent supposer que certains artistes sont mobiles,
restant quelques semaines chez le même client de manière à terminer l'œuvre
commandée.
Cependant, très peu de signatures existent sur les œuvres
(sauf p 18), ce qui laisse une part de mystère quant au mode de vie de
ces artistes. Les artistes s'inspirent généralement de l'art provenant
de l'Italie et de la Grêce. Parfois même, on retrouve l'influence des
Etrusques. Lors de l'invasion des romains, les artistes n'ont plus les
mêmes commandes, et doivent s'adapter. Ils se mettent alors à réaliser
des statues de divinités romaines en bronze, en argile ou en pierre. Ils
commencent aussi à réaliser des peintures murales et autres
mosaïques. Enfin, ils utilisent de nouveaux matériaux, comme le plomb
et le zinc
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Les motifs
Tous les motifs peuvent être associés par simple juxtaposition, donnant
ainsi un enchainement continu
Les représentations humaines / anthropomorphes
Anthropomorphe signifie "de forme humaine". Le terme
s'applique surtout dans le domaine de l'art laténien à certaines
fibules du Ve siècle avant JC (fibules dites "à masques"),
aux anses des canthares danubiens du IIIe siècle avant JC et à
des poignées d'épées, durant toute la période laténienne.
Les représentations d'humains en entier sont très rares. On trouve
plûtot des têtes (voir dans la rubrique symbolisme le culte de
la tête).
Femme en bronze
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Triple-tête
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Double tête de Roquepertuse
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Tête en pierre
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Tête d'homme
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Têtes d'homme
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Les représentations animales / zoomorphes (ou
encore thériomorphes)
Cerf en bois
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Qu'ils soient sauvages ou domestiques, les animaux sont
constamment représentés : loups, cerfs, sangliers...ou plus
exotiques, léopards, éléphants. La possession de
chevaux et de têtes de bétail est un signe de richesse dans
la réalité. Peut-être en est-il de même en ce
qui concerne ces possessions dans l'art ?
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Tête de chat
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Cheval (bronze) - Allemagne - Vème
ou IVème siècle av JC
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Une chose est certaine cependant. Les animaux occupent
une place centrale dans le système religieux. En effet, les Celtes
pensent que les animaux sont le lien entre le monde terrestre et le monde
du surnaturel. Cette idée persistera jusqu'au début de la
période chrétienne (manuscrits enluminés, sculptures
sur pierres de figures animales...)
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Autre représentation de cheval
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Taureau à triple corne - France
- Ier ou IIème siècle ap JC
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Au niveau de la représentation, les animaux sont
rarement réalistes. Ils sont généralement déformés
ou schématisés. La tête, le pelage et la ramure de
l'animal peuvent être exagérement accentués, la queue
est subdivisée en trois. Cette schématisation existe déjà
en Grande Bretagne dès le seconde âge du Fer.
La symbolique des animaux est détaillée dans la partie
approfondissement (rubrique symbolisme, animaux)
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Sanglier en bronze
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Canard en bronze
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Rapace en pierre - Sanctuaire de Roquepertuse
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Fourchette à viande avec cygnes et corbeaux
(bronze) - Irlande - VIIème siècle av JC
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Reproduction d'une fibule à la colombe - Alésia
- IIème siècle ap JC
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Les représentations fantastiques

Cheval à tête d'homme
(bronze) - Reinheim
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Les Celtes attribuent quelques fois aux animaux l'apparence
de monstres fantastiques, donnant ainsi des griffons, des sphinx, des
dragons...L'inspiration provient probablement de la déformation
d'animaux existant en Orient ou en Méditerranée. Peut-être
ces monstres appartiennent-ils à une mythologie que nous ne connaissons
pas. Un motif fantastique est intéressant : deux dragons groupés
deux à deux, face à face et gueule ouverte sont représentés
à partir du IIIème siècle av JC en Roumanie, Est
de la France, Sud Angleterre. La présence de ces mêmes dragons
à plusieurs endroits différents laissent supposer la provenance
d'un seul et même atelier.
Certaines représentations prêtent des caractéristiques
animales aux êtres humains. Il est possible que les origines proviennent
de certains rituels chamanistes. Ces représentations mi-homme,
mi-animal pourraient définir les limites du passage entre les deux
mondes : l'un terrestre, l'autre spirituel.
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Montres en bronze

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