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Les Rois du Monde

Déposez vos questions/remarques sur ce forum consacré aux connaissances actuelles concernant les Celtes...

Modérateurs: Pierre, Guillaume, Patrice

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90 messages • Page 2 sur 6 • 1, 2, 3, 4, 5, 6

Messagede Fergus » Jeu 05 Juin, 2008 19:38

Merci Thierry pour ces éléments très intéressants sur Bourges, qui est très près de chez moi. Il va falloir que je me procure ce numéro des Dossiers de l'Archéologie. Est-il déjà sorti ?
Fergus
--------------
- Ceist, a gillai forcetail, cia doaisiu mac ?
- Ni ansa : macsa Dana, Dàn mac Osmenta, (...) Ergna mac Ecnai, Ecna mac na tri nDea nDàna
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Messagede Pierre » Jeu 05 Juin, 2008 20:17

Bonjour Fearghas :wink: ,

http://www.arbre-celtique.com/encyclope ... e-8141.htm

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Re: Les Rois du Monde

Messagede Thangorodrim » Jeu 05 Juin, 2008 21:07

hello Pierre,
Mes connaissances halstattiennes se limitent à Vix, Hotchdorf et une certaine mine de sel....
Tout ce que j'avais lu à ce sujet ne parlait que de petites communautés et de princes très riches. Rien n'y faisait penser à une civilisation urbaine ou proto-urbaine (j'ignore d'ailleurs la différence entre les deux)
Jusqu'à ce que je tombe il y a quelques mois sur un fil dans l'AC sur des constructions dans les parages de Vix.
Bref, c'est quoi La Heunebourg? Un site, une sous-période de Halstatt?
(et j'ai déjà cherché dans la recherche rapide)




Pierre a écrit:
La question est : que s'est-il passer au Vème siècle avant J.-C., pour provoquer un tel changement ?

@+Pierre


Je peux jouer aussi?
Je propose : une diminution drastique et soudaine de la population (épidémie) qui traumatise les survivants au point de remettre en question des points cruciaux de leur civilisation?
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Messagede Pierre » Jeu 05 Juin, 2008 21:34

Bonjour Thangorofrim,

La Heuneburg est un habitat fortifié (en partie fortifié serait plus juste) des VIème et Vème siècles avant J.-C. près des sources du Danube (en Autriche). On y a retrouvé un habitat structuré sur une surface de plus de 20Ha, et chose très remarquable et unique dans le monde celtique, le rempart est en briques de terre crue, à l'instar de ses homologues grecs (solution qui d'ailleurs s'est avérée complétement inadaptée pour ce climat). Certains ont été jusqu'à supposer que la fameuse ville de "Pyrène" citée par Hérodote, pourrait-etre la Heuneburg...

http://www.dhm.de/museen/heuneburg/indexf.html

http://www.dhm.de/museen/heuneburg/fr/einfuehrung2.html


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Messagede Thierry » Jeu 05 Juin, 2008 22:23

Fergus a écrit:Merci Thierry pour ces éléments très intéressants sur Bourges, qui est très près de chez moi. Il va falloir que je me procure ce numéro des Dossiers de l'Archéologie. Est-il déjà sorti ?


Bonjour Fergus :)

Il s'agit du n°356 - Les Dossiers d'archéologie - Les Celtes et la Loire, sorti en Mars - Avril, cette année.

Visiblement il y a une exposition organisée à Bourges.
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Messagede Thierry » Jeu 05 Juin, 2008 22:44

Et pendant ce temps là, en Bourgogne, une autre ville, et un bâtiment géant doté d'une abside

http://www2.cnrs.fr/presse/communique/1160.htm

Pendant un moment, les archéologues ont cru s'être trompé de plus d'un millénaire :shock:
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Messagede Thierry » Jeu 05 Juin, 2008 22:48

Et voici le dossier de presse de l'exposition de Bourges

http://www.musees.regioncentre.fr/UploadFile/GED/Actualite/PJKS-Dossier_presse.pdf
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Re: Les Rois du Monde

Messagede Muskull » Ven 06 Juin, 2008 7:42

Thangorodrim a écrit:
Pierre a écrit:
La question est : que s'est-il passer au Vème siècle avant J.-C., pour provoquer un tel changement ?

@+Pierre


Je peux jouer aussi?
Je propose : une diminution drastique et soudaine de la population (épidémie) qui traumatise les survivants au point de remettre en question des points cruciaux de leur civilisation?


Il y aurait plutôt une démographie galopante à cette époque d'où recherche de nouvelles terres avec son corolaire, le développement exponentiel de l'idéologie guerrière, c'est suffisant.
Muskull / Thomas Colin
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Re: Les Rois du Monde

Messagede Thangorodrim » Lun 09 Juin, 2008 21:07

Muskull a écrit:Il y aurait plutôt une démographie galopante à cette époque d'où recherche de nouvelles terres avec son corolaire, le développement exponentiel de l'idéologie guerrière, c'est suffisant.




Oui, c'est vrai, Ségovèse et Bellovèse.... :oops:



"Jusqu'à présent, on pensait que l'urbanisation de l'Europe occidentale n'avait commencé qu'avec la civilisation des oppida (IIe - Ier siècle avant notre ère). Mais depuis quelques années, les fouilles d'autres sites contemporains de Vix avaient déjà fourni quelques indices en faveur d'un développement urbain précoce (à La Heuneburg et Ipf, en Allemagne, ou à Bourges, en France). Ces découvertes, confirmées par les trouvailles de Vix, font donc reculer l'apparition des premières villes de plusieurs siècles dans cette région."


C'est très exaltant d'apprendre des choses comme ca : 3 à 5 siècles d'urbanisation en plus! C'est un bond énorme dans le temps, il me semble. Et très triste de se dire que finalement monsieur et madame Toutlemonde n'en saura rien car finalement le monde celtique continue de peu interresser les médias. Le Francais moyen continue de croire que les Romains ont apporté les villes et les routes dans leurs bagages et que les Gaulois n'étaient que de grossiers guerriers incultes et indisciplinés qui devraient dire "merci de nous civiliser" à leurs bouchers.
La preuve, le roman que je suis en train de lire où les Gaulois - mauvais cavaliers, mal chaussés, mal vêtus, armés évidemment de haches et de casques à cornes - font pitié à voir : des vrais sauvages. Il ne leur manque que les peaux de bête et le tableau est complet! :shock: :shock: :shock:
Alors, après des trucs comme ca, ca fait plaisir de lire que ces sauvages batissaient des villes et des palais.
Na!
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Messagede Thierry » Lun 09 Juin, 2008 21:22

Et nous ne sommes pas au bout des surprises......

En tout cas il est fondamentalement passionnant de réaliser que les Celtes de Vix construisaient des bâtiments complexes dont on ne retrouvera l'équivalent qu'en période byzantine ou carolingienne et que la ville de Bourges était bien plus importante que Rome au V° siècle AV JC
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Messagede Pierre » Mar 10 Juin, 2008 0:48

Bonjour à tous,

Un petit message de la part de Mr P.-Y. Milcent.
Qui m'autorise à vous communiquer le résumé de son ouvrage.
Et j'en profite pour lui adresser tous mes remerciements.

PYM a écrit:Résumé


Bourges-Avaricum, une capitale celtique au Ve s. av. J.-C.
Les fouilles du quartier Saint-Martin-des-Champs et les découvertes des Etablissements militaires


La genèse urbaine de la Gaule ne commence pas avec le règne d'Auguste, ni même avec la “Civilisation des oppida” de La Tène finale. Les couches archéologiques les plus profondes de Marseille, Arles ou Agde, colonies fondées par des Grecs, mais aussi de Nîmes, Bordeaux, Lyon et Bourges, de grandes agglomérations créées par les Gaulois, révèlent que l'histoire de nos villes débuta il y a plus de 2500 ans, dès le premier âge du Fer. La protohistoire du phénomène urbain se déploie par conséquent sur le temps long en Gaule et, comme ailleurs, elle est constituée non seulement d'éphémères tentatives, de régressions, d'abandons et d'échecs, ce sur quoi l'attention pourrait être trop focalisée, mais aussi d'expériences répétées et parfois très spectaculaires qui peuvent remonter pour les plus anciennes d'entre elles au Néolithique, et qui contribuèrent sans aucun doute, quoique indirectement et de façon originale, à la réussite des villes de la Gaule antique et, au delà, à la genèse de nos villes contemporaines. Ne présenter des sociétés de la Gaule avant la prime romanisation que les composantes rurales serait réducteur face aux découvertes accumulées depuis une vingtaine d’années.
Ainsi, près de 400 ans avant la prise par César de la ville fortifiée d'Avaricum, capitale de la cité des Bituriges Cubes, la vaste agglomération du Ve s. av. J.-C. de Bourges révèle peu à peu, grâce aux recherches archéologiques de longue haleine, que des régions de l’Europe tempérée occidentale connaissaient déjà des centres proto-urbains, ainsi qu'une organisation en Etat sous une forme embryonnaire.
Dans le quartier Saint-Martin-des-Champs à Bourges, en 1984 puis 1993, deux opérations d’archéologie préventive ont mis au jour les vestiges très arasés d’un établissement humain occupé approximativement entre 450 et 425 av. J.-C. D’autres fouilles, quoique d’ampleur plus limitée, ont confirmé ultérieurement l’extension sur plusieurs centaines de mètres de ce gisement, sans que l’on puisse néanmoins en déterminer les limites. L’établissement doit couvrir plusieurs (dizaines ?) hectares et paraît être en étroite relation avec la vaste zone des actuels Etablissements militaires dont on sait qu’elle livra, sous la pioche des ouvriers de la fin du XIXe s., de nombreux vestiges et matériaux attribuables eux aussi au Ve s. av. J.-C. Ces trouvailles anciennes étaient pratiquement tombées dans l’oubli depuis. L’ensemble des découvertes réalisées dans et autour du quartier Saint-Martin-des-Champs fait aujourd’hui l’objet de la première publication exhaustive d’un secteur essentiel de l’agglomération protohistorique de Bourges. Outre une présentation très détaillée des données disponibles, l’ouvrage a été l’occasion de réunir les études de 19 auteurs parmi lesquelles on trouvera des recherches tout à la fois poussées et ouvertes sur des aspects de synthèse.

Introduction et méthode

Rappel est donné des modalités de l'identification, très progressive, d'un vaste site archéologique de la fin du premier âge du Fer à l'emplacement de l'oppidum d'Avaricum, la capitale des Bituriges Cubes rendue célèbre par les commentaires de César. La première découverte importante à Bourges remonte à 1849, mais il faut attendre 1984 pour que le développement de l'archéologie préventive en milieu urbain suscite la découverte, à Saint-Martin-des-Champs, d'un premier établissement à vocation domestique et artisanale attribuable au Ve s. av. J.-C., et riche d'importations méditerranéennes. Depuis, de nouvelles opérations ont permis de dégager des sites contemporains, parfois sur une surface très étendue. Afin de donner un premier aperçu de leur importance, il devenait impératif de publier un des secteurs fouillés les plus riches pour la fin du 1er âge du Fer. Nous avons porté notre dévolu sur le quartier de Saint-Martin-des-Champs et celui des Etablissements militaires, situés tous deux au sud-est du centre ancien de l'actuelle ville de Bourges.

Le cadre chrono-culturel des établissements berruyers du 1er âge du Fer est le suivant : la majorité des occupations est attribuable à LT A1 (2e-3e quart du Ve s. av. J.-C.). Comme dans le reste de la province occidentale du domaine hallstattien (c'est-à-dire le centre-est et l'est de la Gaule), et contrairement à ce que pourrait laisser entendre la terminologie chronologique héritée des travaux de P. Reinecke, l’horizon chronologique de LT A1 correspond non pas au début d'une nouvelle époque, mais à la fin de la troisième et dernière étape du 1er âge du Fer régional (1er Fer 3b de la chronologie de Gaule centrale).

A Bourges, le développement d'une vaste agglomération, de même que l'intensification des échanges avec la Méditerranée, à une époque tardive du premier âge du Fer pose naturellement le problème de la continuation, voire de l'amplification des phénomènes princiers en plein Ve s. av. J.-C. Surtout, il engage à ouvrir un débat au sujet de l'identification des fonctions et d'une économie urbaines propres aux grands centres hallstattiens. Aussi les fouilles de Bourges représentent-elles un enjeu historique qui dépasse de très loin le cadre régional.

A un autre niveau, l'intérêt de la publication est de poser le problème de la documentation des grands sites du premier âge du Fer, et de tenter de le résoudre. Des modèles et spéculations, parfois très poussés, ont été bâtis autour de la problématique des grands centres princiers, mais sur des fondements documentaires assez pauvres et dont il faut bien reconnaître qu'ils sont tronqués par une approche descriptive et analytique empreinte d'académisme, qui fait encore la part trop belle à l'objet rare et supposé précieux ou encore à la structure exceptionnelle. En l'absence d'une approche globalisante et quantitative des données archéologiques, les comparaisons d'un site à l'autre sont impossibles ou réduites à si peu de choses qu'il serait bien hardi de vouloir en tirer des conclusions générales et pertinentes. Afin de contribuer à remédier à ces problèmes qui grèvent le débat historique, nous proposons un protocole de documentation visant à évaluer, qualitativement et quantitativement, l'état de conservation des vestiges archéologiques, l'investissement en termes d'aménagements, les activités biologiques et surtout anthropiques susceptibles de laisser des traces matérielles, le niveau de richesse relatif du mobilier. Un décompte systématique du mobilier par unité stratigraphique est proposé, avec la prise en compte du nombre et du poids de restes (NR, PR), du nombre minimal d'individus (NMI), lorsque ces informations peuvent faire sens ou être estimées rigoureusement. Pour qu'elles deviennent comparables à celles qui proviennent d'autres sites, ces données doivent en outre être pondérées. Après discussion, nous avons retenu pour étalon de pondération non pas la surface ou le volume fouillé, mais le NR et le PR de la céramique.

Autour de Saint-Martin-des-Champs

Les découvertes anciennes à l'emplacement des Etablissements militaires

Les Etablissements militaires forment un quartier étendu sur quelques dizaines d'hectares, en retrait et au sud-est du centre ville. Les travaux d'aménagement et d'urbanisme dans la seconde moitié du XIXe s. ont occasionné la destruction de nombreux vestiges protohistoriques parmi lesquels certains purent néanmoins être décrits, dessinés (cf. extraits d'archives inédites) ou prélevés. Les structures consistent en fosses irrégulières, petits fossés et un grand fossé défensif de section triangulaire, orienté est-ouest, qui atteignait au maximum 4,5 m de profondeur et 8 m à l'ouverture, mais dont l'attribution chronologique demeure mal assurée. Dans les fosses comme dans les petits fossés ont été identifiées des inhumations souvent déposées de manière désordonnée, mais avec parfois des parures assez abondantes et attribuables au Ha D3 ou bien à LT A1. Dans les environs de la Fonderie de Canons, un dépôt de 7 lingots de type Spangenbarren documente une fréquentation antérieure du site, au Bronze ancien, de même que l'existence d'objets importés de l'Europe centrale dès cette époque. D'autres découvertes d'importations centre-européennes en Berry semblent conforter l'idée qu'il y eu des relations à cette époque avec les régions de la culture d'Unetice.
La découverte de quelques autres objets (fusaïole, peson, ébauches de parures annulaires en lignite) documente en outre l'existence d'activités de production domestique et peut-être artisanale.
A l'emplacement des Etablissements militaires, l'examen du dossier nous amène à identifier un quartier d'habitat peut-être enclos et daté approximativement de la fin du premier âge du Fer. Il semble réutilisé pour l'ensevelissement de nombreuses inhumations (théoriquement plus d'une centaine ?) au statut très singulier au Ha D3 et encore à LT A1. Cette succession au cours de laquelle les pratiques rituelles l'emportent sur des activités domestiques n'est pas sans rappeler l'histoire complexe d'un autre site de Bourges, mais plus éloigné du centre-ville et légèrement plus tardif, qui fut fouillé dans les années 1990 au Chemin de Gionne et a été récemment publié en détail.

Fouilles ponctuelles autour du gisement de Saint-Martin-des-Champs : Banque de France et 35 rue de Sarrebourg

La fouille de plusieurs terrains à une distance comprise entre 400 et 200 mètres du gisement de Saint-Martin-des-Champs documente une extension très large de l'établissement protohistorique. Le mobilier, la faune et quelques structures du Ve s. av. J.-C. de deux terrains sont assez comparables à ceux qui ont été trouvés sur une superficie nettement plus importante à Saint-Martin-des-Champs. Le mobilier a donc été étudié en commun avec ce qui a été exhumé à Saint-Martin-des-Champs. La faune en revanche est l'objet d'une étude spécifique.

La fouille de Saint-Martin-des-Champs

Les fouilles de Saint-Martin-des-Champs : contexte et structures archéologiques

Ces investigations se sont étendues sur une surface de 4200 m2, à l'emplacement d'un établissement de LTA1. Ne subsistaient de cette époque que les structures en creux et leur comblement, souvent très largement amputés par des aménagements postérieurs. Les aménagements consistent en trous de poteau, silos, petits fossés et surtout constructions quadrangulaires semi-enterrées dans lesquelles les niveaux d'occupation, à une exception près, ne sont pas conservés. Aussi le mobilier doit-il être interprété presque exclusivement comme les rejets d’une couche d’occupation superficielle piégés dans ces structures. Aménagements et mobiliers sont décrits et inventoriés dans des catalogues ou des tableaux. Des plans, dessins et photographies viennent compléter la documentation (volume 2).

Les structures construites de Saint-Martin-des-Champs et leur distribution ont été étudiées sous l'angle fonctionnel. La rareté des recoupements de structures suggère une occupation courte. Les fosses sont disposées régulièrement avec une orientation cardinale et dessinent trois rangées nord-sud et, avec moins de régularité, deux rangées est-ouest. Les espaces vides intermédiaires sont suffisamment importants pour que l'on puisse envisager que des bâtiments posés sur le sol aient disparu.

Ecofacts : les fouilles de Saint-Martin-des-Champs et au 35 de la rue de Sarrebourg

Les prélèvements carpologiques ont été effectués principalement dans deux silos et quelques fosses. Avec un NR de 17209, les carporestes apparaissent conservés par carbonisation (toutes les structures) et minéralisation (les silos). La minéralisation n'a pas permis dans la plupart des cas une détermination en deçà du genre. Les céréales sont représentées par 7 espèces (orge polystique vêtue, millets commun et italien, blé froment, amidonnier, épeautre et peut-être engrain), les légumineuses par 4 espèces (lentille, pois, féverole et ers). Des noyaux de Prunoïdés, de prune ou pêche, des pépins de pomme ainsi que de raisin, des restes de noisette et de mûre sont identifiés. Des plantes plus originales, qui purent servir à la fabrication de textile, d'huile ou de condiments, complètent l'inventaire : caméline, lin, chanvre, pavot et aneth. Des fragments de pains, galettes ou gâteaux ont été aussi examinés, mais sans que des graines soient décelables. Au moins 36 taxons sauvages sont en outre conservés ; leurs préférences écologiques révèlent certains aspects de l'environnement du site et de sa gestion. Les cultures devaient être localisées dans des zones relativement sèches et sur plusieurs natures de sol ; les marais ne devaient pas être directement exploités ; la zone humide aux abords des marais était plantée de bosquets et de prairies, et la culture des millets pouvait y être pratiquée ; une végétation rudérale et des forêts ou broussailles devaient côtoyer les occupations humaines. L'étude carpologique a permis d'identifier des pratiques agricoles et alimentaires. L'usage des plantes oléagineuses et textiles est discuté. La présence d'un pépin de vigne cultivée est problématique : s'agit-il d'une pollution (le gisement protohistorique est recoupé par des tranchées antiques de provignage) ou d'un apport ancien, sous la forme d'un fruit sec ou en accompagnement de vin massaliète (cf. les amphores vinaires trouvées sur le site) ? L'hypothèse d'une culture locale de la vigne au premier âge du Fer semble en tout cas la moins probable. En revanche, la présence de semences d'aneth et d'ers peut témoigner d'échanges avec le domaine méditerranéen.

Les charbons de bois collectés dans une U.S. du silo F12-125 ont alimenté une étude anthracologique. Les restes correspondent pour moitié à du hêtre et pour plus d’un quart à du chêne caduc. Ces taxons peuvent indiquer la proximité d’une forêt. Des charbons de pomoïdés, prunus et genêts attestent quant à eux la présence de végétaux d’espaces ouverts, qui purent être collectées en lisière de forêt, en bordure de chemin ou de surfaces déboisées. Des prairies humides et marécageuses ou une forêt de bordure de rivière ont dû servir d’approvisionnement pour les aulnes et frênes. En termes d’usage, chênes et hêtres fournissent un bois de chauffe de qualité. La présence très majoritaire de leurs charbons sur le site, compte tenu de l’identification d’activités artisanales, n’est pas surprenante.

L'étude de la microfaune de Saint-Martin-des-Champs, principalement issue des deux silos, conforte certaines des conclusions tirées des études carpologique et anthracologique. Les espèces sont révélatrices d'un site voisin de zones boisées anthropisées et humides, mais aussi d'espaces ouverts qui n'étaient pas tournés exclusivement vers la céréaliculture ou l'élevage.

La faune donne lieu à deux études. La première concerne la fosse du 35 de la rue de Sarrebourg, riche de 421 restes assez bien conservés. Il s'agit principalement de déchets culinaires, quelques-uns pouvant être issus de la préparation des carcasses. Le porc domine avec une possibilité d'élevage sur place pour la viande. Suivent les bovins et caprinés. Le cheval, le chien et les poissons sont attestés, mais en très faible proportion.
La seconde étude porte sur la faune mise au jour en 1993 sur le site de Saint-Martin-des-Champs. Sur 13000 restes environ, 6431 ont été déterminés. Ce sont également et avant tout des déchets culinaires qui apportent des informations sur l'alimentation carnée. Cette dernière repose sur des mammifères domestiques : bœuf, porc, mouton, chèvre et chien. La place dévolue aux équidés est minime et l'apport de la basse-cour, de la chasse aux petits animaux et de la pêche est difficile à apprécier en raison de problèmes de conservation différentielle. Beaucoup d'animaux ont été sacrifiés après une vie de service ou de labeur. La diète carnée laisse apparaître la place importante du bœuf et du porc. En outre, une vingtaine de chevilles osseuses de bœuf, une dizaine d'os travaillés et de rares bois de cerf représentent les restes d'activités artisanales.

Parmi les os de Saint-Martin-des-Champs figuraient 49 restes humains. A l'exception d'une ulna d'adulte, tous les os proviennent d'un sujet périnatal. Celui-ci a été mis au jour dans une petite fosse creusée dans le remblai d'une construction semi-enterrée utilisée pour des activités métallurgiques.

Le mobilier céramique des fouilles de la Banque de France, au 35 rue de Sarrebourg et de Saint-Martin-des-Champs

La céramique de production régionale est représentée par un NR de 12.257 et un PR de 127 kg 189. Quatre groupes technologiques ont été distingués :
- M-C : céramique modelée au colombin à surface claire ;
- M-S : céramique modelée au colombin à surface sombre ;
- M-F-T-S : céramique modelée façonnée au tour lent à surface sombre ;
- M-F-T-C : céramique modelée façonnée au tour lent à surface claire.
Les restes de Saint-Martin-des-Champs correspondent pour moitié à des tessons à pâte fine et paroi peu épaisse (inférieure à 6 mm), ce qui est original. Des inclusions de petits nodules de fer et de coquillages fossiles apparaissent comme des marqueurs de production régionale. L'étude des techniques de façonnage fait apparaître, à côté de productions modelées, de nombreux vases montés au moyen d'une technique mixte (36 % en NR) : il s'agit de céramiques dont les ébauches, montées au colombin, ont été reprises puis finies au moyen d'un tour après une durée de séchage relativement brève. Les traitements de surface sont peu variés. On note que les céramiques régularisées au tour présentent toujours une surface soigneusement polie. Quelques stries au peigne, lissages et digitations sont observables. Les décors sont représentés par des cannelures horizontales associées parfois à des baguettes parallèles (céramiques finies au tour), plus rarement par des traits lissés ou peints et des motifs estampés. La cuisson apparaît bien contrôlée au moins pour les céramiques fines.
Les formes donnent lieu à un classement typologique ainsi qu'à l'identification de 6 classes fonctionnelles : jattes, coupes, gobelets, pots et bouteilles, couvercles, vases miniatures. En proportion, les formes de la vaisselle de table (jattes et coupes) apparaissent surreprésentées (87 %), notamment par les jattes. La vaisselle culinaire, peut-être parce qu'elle est plus difficile à identifier, et surtout les vases de stockage, sont curieusement peu abondants. Les comparaisons par forme les plus étroites concernent des sites de LT A du Centre-Est de la France (Auvergne et Bourgogne principalement), dans une moindre mesure l'Est de la France et le Bade-Wurtemberg. Par rapport à l'époque précédente (Ha D3), les vases de LT A finis au tour apparaissent beaucoup mieux diffusés en Berry et donc produits en plus grande quantité. L'introduction de la tournette suppose la mise en place d'un artisanat plus spécialisé et de profonds changements dans l’organisation de la production potière.

Les céramiques importées sont bien représentées à Saint-Martin-des-Champs et se répartissent entre des amphores commerciales massaliètes et des productions attiques et à vernis noir. Les amphores (NMI : 5) appartiennent au type Bertucchi 2B et disposent, pour quatre d'entre elles, d'un bord de la forme 4 de Py. Ce sont des productions du Ve s. av. J.-C.
La chronologie absolue des importations céramiques est précisée par les vases attiques (NMI : 19) qui forment un ensemble cohérent du troisième quart du Ve s. av. J.-C. Quatre formes attiques sont représentées : coupes avec ou sans tige, skyphos de type B à figures rouges (décor à la chouette) et canthare-sessile à figures rouges. Si les deux premières sont répandues ailleurs sur tout le littoral de la Gaule méditerranéenne, les deux dernières apparaissent principalement, pour la Méditerranée nord-occidentale, en Italie du Nord, en Corse et sur la côte de l'Hérault à l'Ampurdan, au 3e quart du Ve s.
La présence, sous forme de tessons, des vases attiques dans la quasi totalité des structures principales suggère que leur utilisation concernait toute la population du site, et non pas quelques privilégiés seulement. Ces productions importées représentent 0,4 % en NR, 1,2 % en NMI, c'est-à-dire des proportions importantes comparées au nombre des fragments de vases grecs mis au jour au nord des Alpes. La qualité de leur décor reste élevée, sans être exceptionnelle pour le 3e quart du Ve s., mais elle n’est pas toutefois comparable à celle des importations attiques plus anciennes trouvées à Bourges. Autre différence également par rapport aux gisements du Collège Littré et de La Nation, à l'exception d'une grande forme, il s'agit uniquement de vases à boire. La majorité des vases attiques trouvés dans des contextes contemporains de LT A1 au nord des Alpes appartiennent également à cette catégorie fonctionnelle. A l'exemple des amphores massaliètes, les vases attiques ont pu parvenir à Bourges par la vallée du Rhône.

Les vases importés du site de Saint-Martin-des-Champs sont ensuite replacés dans le contexte des apports méditerranéens documentés à Bourges, notamment les objets en bronze étrusques et italiques (17 pièces recensées). Ces derniers datent pour les plus anciens du VIIIe s. av. J.-C., mais ils sont principalement représentés à la fin du VIe et au Ve s. av. J.-C. Pour cette dernière époque, un lien existe entre la distribution des céramiques grecques et les vases de bronze italiques.

Les déchets de production et l'instrumentum des sites de la Banque de France et de Saint-Martin-des-Champs

A Saint-Martin-des-Champs, les déchets d'activités de métallurgie du fer, si l'on excepte deux masses de fer brut (17,1 kg), sont peu nombreux (2,5 kg) et représentés par des scories, chutes de métal, parois de four et de foyer. Plusieurs scories sont des culots de forge ; aucune n'atteste un travail de réduction du fer sur place. La production d'objets en fer peut être supposée au moyen d'autres indices. Les deux blocs de fer brut de réduction proviennent du comblement inférieur d'un silo et constituent une découverte exceptionnelle pour la période en raison de la rareté des pièces analogues et de leur masse (ce sont les plus grosses connues pour la Protohistoire). L'un des blocs est en fer aciéré (environ 0,8 % de carbone) et n'a subi aucun traitement mécanique tandis que l'autre est en fer et présente les traces d'un début de compactage. Ils peuvent s'insérer dans une filière opératoire dans laquelle du métal brut de réduction est mis en forme. S'agit-il d'un stock destiné à alimenter une production locale ou de témoins d'une production régionale destinée à être introduite dans les circuits d'échange ?

Un examen en laboratoire des fragments de creuset donne lieu à des observations technologiques, quant à l'argile utilisée notamment. En dépit des traces de vitrification, un seul creuset recèle des traces de fonte d'un alliage à base de cuivre.

L'étude des autres déchets de production et de l'instrumentum a pour objectif de caractériser le faciès de culture matérielle des sites d'un quartier de l'agglomération protohistorique de Bourges, en complément de l'analyse de la céramique, et de proposer une nouvelle démarche méthodologique (prise en compte des NR, NMI, PR, de la taphonomie et pondération de l'information par "l'étalon céramique"). Un tableau de classification fonctionnelle en 9 catégories et 124 classes est établi ; il fournit une vision synthétique des artefacts mobiliers et des traces d'activité que ces derniers supposent.

Parmi les objets de l'habillage et de la toilette, les productions caractéristiques du Centre-Est de la Gaule dominent, en particulier les fibules à ressort de schéma hallstattien, arc nu et pied recourbé en timbale. Ces fibules donnent lieu à une étude typo-chronologique plus détaillée car il s'agit, pour la plupart des variantes typologiques, de bons marqueurs chronologiques, non pas du Ha D3, mais de LT A1. Un objet exceptionnel, un disque en bronze de miroir, est en outre identifié.
Les éléments qui relèvent des pratiques de la guerre et de la prédation, ainsi que des moyens de transport, sont peu représentés. Des pièces de ceinturon militaire, un montant de mors en os et sans doute une douille de caisse de char font figures d'éléments rares.
Les ustensiles culinaires et de préparation alimentaire, à l'image de ce qui a été constaté pour la céramique, sont pauvrement représentés. La vaisselle métallique ou à renfort métallique, liée à la table, est en revanche, comme pour la céramique, bien documentée par des tôles, rivets, attaches et anses. Deux attaches de vases importés, l'une appartenant à un bassin étrusque, l'autre à une situle de la culture de Golasecca, ont été identifiées.
A la différence des objets qui relèvent de l'éclairage, de la quincaillerie d'habitat, ou qui possèdent des fonctions polyvalentes, les outils spécialisés et objets de la production sont nombreux. Ces derniers révèlent une production domestique et artisanale. Le travail des textiles, des matières animales souples et dures, du lignite est représenté. Les métallurgies du fer, des alliages cuivreux et du plomb sont matérialisées par de nombreux restes, essentiellement des demi-produits et déchets de production. Les objets sortis des ateliers sont plus difficiles à caractériser dans le détail, bien que l'on puisse au moins identifier la fabrication sur place d'anneaux ou parures annulaires, de fibules à pied en timbale et sans doute de vases rivetés en tôle de bronze.
Les objets de compte et mesure, du jeu et des pratiques symboliques sont rares, mais souvent remarquables. Un petit poids en bronze, des disques taillés en terre cuite et une dalle sculptée en calcaire sont du nombre des exceptions.

L'instrumentum du quartier de Saint-Martin-des-Champs présente un faciès chrono-culturel homogène et caractéristique de l’horizon de LT A1 du Centre-Est de la Gaule. Daté du 3e quart du Ve s. av. J.-C. par l'association avec les céramiques attiques, il constitue une série de référence pour la connaissance des cultures matérielles sur les habitats groupés de la province occidentale du domaine hallstattien. S'il apparaît en continuité relative avec les faciès matériels régionaux du Ha D3, tel n'est pas le cas avec ceux que l'on connaît pour LT A2. Dans la mesure où les standards mobiliers et stylistiques dits laténiens semblent s'imposer, à Bourges comme dans le reste du Centre-Est de la Gaule, avec LT A2 (la céramique de ce point de vue relève d'une autre dynamique évolutive, avec des profils en S bien présents dès le Ha D3), il convient logiquement de ne parler d'une culture matérielle du second âge du Fer qu'à partir de cette phase qui doit débuter au dernier quart du Ve s. av. J.-C. En matière d'évolution des cultures matérielles, le décalage qui apparaît avec des régions plus occidentales ou septentrionales bien documentées telles que la Champagne ne s'explique pas en termes de retard : il s'agit simplement de dynamiques culturelles différentes, la culture Aisne-Marne appartenant aux marges du complexe atlantique plutôt qu'à celles du domaine hallstattien pour ne prendre qu’un exemple.

Le faciès matériel et des traces d’activités du quartier Saint-Martin-des-Champs s'établit de la façon suivante : échanges extra-communautaires et productions artisanales dominent, tandis que l'économie domestique et vivrière est peu représentée. Les activités apparaissent parfois très spécialisées et diversifiées bien qu’elles soient associées dans le même quartier. Outre certains aspects qualitatifs, les traces archéologiques de consommation du métal traduisent, au plan quantitatif, un accès aisé à la matière première et sans doute une certaine prospérité des habitants du quartier, probablement des hommes libres exerçant le métier d’artisan et de commerçant pour la plupart. Evaluer la richesse et le statut des habitants reste toutefois un exercice très délicat, dans la mesure où les données de comparaison pour d'autres sites contemporains sont insuffisantes en l'état des publications.

Les sites des Etablissements militaires et du quartier Saint-Martin-des-Champs dans le contexte du Ve s. av. J.-C.


En préalable à l’examen détaillé de la situation de l'agglomération de Bourges au Ve s. av. J.-C., nous avons fait le point des connaissances pour les occupations des autres périodes de la Protohistoire. Le territoire communal de Bourges apparaît fréquenté, on l'a déjà vu, à l'âge du Bronze. Il faut néanmoins attendre la première moitié du VIe s. av. J.-C., sinon même le milieu de ce siècle, pour voir l'installation durable d'un habitat sur l'éperon de confluent, à l’emplacement de l'actuelle vieille ville, et l’occupation de zones périphériques (Etablissements militaires et Port Sec). Des importations, d'abord originaires du sud-ouest de l'Allemagne, puis méditerranéennes, parviennent dès cette époque. Ce n'est toutefois qu'au second tiers du Ve s. av. J.-C., à LT A1, que les établissements berruyers s'étendent au point de former une agglomération multipolaire au tissu lâche, mais étendu sur une très grande surface. A la fin du Ve s., cette agglomération se désagrège et ne subsistent que de petites unités dispersées. Il faut attendre le courant du IIe s. av. J.-C. pour qu'une nouvelle agglomération proto-urbaine, l’Avaricum décrite et ravagée ultérieurement par César, soit constituée et fortifiée.

Au Ve s. av. J.-C., les sites du quartier Saint-Martin-des-Champs et des Etablissements militaires correspondent à l'un des pôles périphériques d'une agglomération proto-urbaine étendue sur près de 200 ha, mais dont les limites demeurent à identifier pour l’essentiel. Le cœur de l'agglomération semble constitué par des habitats aristocratiques juchés sur l’éperon baigné par les rivières de l’Yèvre et de l’Auron. Cet éperon de confluent pouvait être déjà fortifié. Il apparaît cerné, à quelques distances, d'au moins trois pôles à vocation principalement artisanale : secteurs de l'hôpital Baudens, du quartier Saint-Martin-des-Champs et de Port Sec. Le grand fossé des Etablissements militaires bien repéré à la perpendiculaire de l’actuel Boulevard Auger, mais dont la datation pose problème, laisse ouverte la question d'une délimitation défensive du pôle de Saint-Martin-des-Champs. Une étude fine du mobilier montre que toutes les structures des Etablissements militaires ne sont pas strictement contemporaines : un déplacement au gré des générations de certaines unités domestiques et de production est envisageable.
Des gisements à vocations funéraires et symboliques (Etablissements militaires, Lazenay, secteur de la Route de Dun, Butte d'Archelet…) forment une seconde couronne périphérique. A côté de dépôts singuliers où figurent des corps humains, on trouve dans quelques-uns de ces sites de véritables sépultures, plutôt à caractère aristocratique.

L'étude des sites berrichons contemporains de la grande agglomération laisse deviner un contrôle de celle-ci sur un vaste territoire, avec un rayon de l'ordre d'une trentaine de km au minimum, éventuellement d'une cinquantaine de km. Outre ce contrôle territorial très étendu, l'agglomération posséde d'autres fonctions urbaines. Elle forme un pôle dominant en matière de productions artisanales diversifiées (l'économie vivrière y est en revanche sous-représentée), d'échanges qui peuvent prendre un caractère commercial, d'influences politiques et de rayonnement culturel. Bourges-Avaricum constituait, à la fin du premier âge du Fer, la capitale d'un état primitif placé aux limites occidentales du domaine hallstattien, probablement le puissant royaume des Bituriges connu par la tradition livienne.

L'analyse des données archéologiques collectées à Bourges conduit à porter un nouveau regard sur l'histoire de la fin du phénomène princier hallstattien. A contrario de ce qui était supputé généralement, la fin du Ha D3 n'est aucunement synonyme de désintégration globale des pôles princiers hallstattiens : ceux-ci demeurent occupés à LT A1 et quelques-uns, à l'image de l'agglomération de Bourges, sont même florissants à cette époque et disposent encore d’importations lointaines (Lyon, Asperg, Bopfingen, Forchheim…). La véritable crise apparaît plus tard, à LT A2 (fin du Ve s. av. J.-C.), époque où tous les sites agglomérés de la fin du premier âge du Fer apparaissent abandonnés ou au mieux très faiblement occupés. C’est également à cette époque que cesse pratiquement l'importation d'objets manufacturés méditerranéens. Retenons surtout que chaque grand pôle hallstattien dispose d'une histoire propre et qu'il serait réducteur de penser qu'ils eurent les mêmes fonctions et importance socio-économique, ou qu'ils furent fondés, se développèrent et dépérirent au même moment, en vertu d'une forte dépendance vis-à-vis de réseaux d'échanges gréco-étrusques qui n'a jamais pu être véritablement démontrée. L'accès plus large et régulier aux trafics et contacts méditerranéens n'est que l'un des corollaires d'une dynamique endogène de développement et de concentration des activités de production et d'échanges autour des grands établissements hallstattiens, en aucun cas la cause.
L'agglomération de Bourges met aussi en évidence un phénomène historique et politique majeur, qui demeurait mal cerné jusqu'à présent : l'émergence éphémère, au premier âge du Fer, des premières villes et des premiers états de l'Europe moyenne occidentale. Ce phénomène peut être expliqué par différents facteurs conjugués : conditions climatiques plus propices, stimuli externes et surtout mutation socio-économique de grande ampleur concomitante à un développement de la hiérarchie sociale. Cette mutation socio-économique bénéficia du sensible développement de l'économie du fer et du dégagement de surplus agricoles, autant d'éléments en mesure d’engendrer l'accroissement et la concentration des artisans, de leur spécialisation et de leurs productions, ainsi que l'émergence de pratiques commerciales.

L'identification de cette expérience urbaine hallstattienne rend caduques les interprétations forgées dans les années 1970-80 où les sociétés protohistoriques apparaissaient semi-passives : celles-ci ne forment ni un monde de guerriers-paysans qui attendrait la fin d'un cycle d'acculturation auprès des civilisations méditerranéennes pour connaître un essor urbain, ni des chefferies dominées par de petits princes résidant dans une citadelle et utilisant les moyens de production qu'ils dominent à seule fin d'obtenir de marchands méditerranéens les biens de prestige qui leur permettraient d'accroître leur pouvoir à la manière supposée de chefs amérindiens ou africains.

Les découvertes archéologiques berruyères sont enfin l'occasion d'une nouvelle confrontation avec les données littéraires relatives aux premières migrations gauloises en Italie du Nord et en Europe centrale. Au delà des enjolivements mythiques propres à une tradition qui apparaît de surcroît fragmentaire et déformée par divers compilateurs, essentiellement Tite-Live et Trogue-Pompée, certains des aspects du récit des colonisations gauloises initiées par un royaume biturige puissant et ses souverains, peu avant la fin du Ve s. av. J.-C., retrouvent aujourd'hui une crédibilité historique.
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Messagede Muskull » Mar 10 Juin, 2008 17:03

Très intéressant, merci :)
Un petit point : Le développement du village à la ville dépend surtout des surplus agricoles. Nous savons que cette évolution a été permise au Moyen-Orient par "l'invention" de l'irrigation et je pense qu'il a du aussi se passer quelque chose en Europe durant le Hallstatt.
Inventions améliorant le rendement des terres ou nouveaux produits plus performants ? Là est la question :?:

Sinon le livre de P.-Y. Milcent me semble fort intéressant, à suivre donc :wink:
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Messagede Muskull » Jeu 12 Juin, 2008 19:17

Bonjour,
Pour les visuels (comme moi) quelques images de la situation hydrologique de Bourges dont une interprétation de la carte de Cassini (18° S).
http://www.cher.pref.gouv.fr/atlas-cher ... es/B71.pdf

Le moins qu'on puisse dire c'est qu'il y a beaucoup d'eau avec des rivières au débit relativement stable même l'été et des crues modérées.
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Messagede Muskull » Ven 13 Juin, 2008 19:02

Encore moi à défaut d'autres commentateurs :(
En étudiant les données du terrain ici et là sur le web et ailleurs, il me semble qu'il y a plusieurs pôles d'habitat (en terrain sec) même si le coeur est sur la "hauteur" au confluent des rivières principales.
Peut-on imaginer une citée multipolaire comme Matthieu l'a signalé pour Corent ?
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Messagede Alexandre » Ven 13 Juin, 2008 19:33

Pour une ville, le synécisme est presque obligatoire à partir d'une certaine taille.
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