Rhodanus - Nom antique du Rhône, l'un des principaux fleuves de Gaule et surtout l'une des (sinon "la plus") importantes voies commerciale d'Europe occidentale au cours de l'antiquité.
Origines de cet hydronyme
L'origine de cet hydronyme a longtemps fait débat. En effet, Pline (Histoire Naturelle, III, 5, 2) explique l'origine du nom du Rhodanus par la présence antique de Rhodiens, qui laissèrent également leur nom aux comptoirs de Rhoda / Rhodè / Rhodopè (Santa-Maria, Rosas) et Rhodanousia / Rhodanusia (Espeyran, Saint-Gilles).
Pline, Histoire Naturelle, III, 5, 2 : "le lieu où fut Rhoda des Rhodiens, et d'où provient le nom du Rhodanus, le plus riche fleuve de la Gaule. Se précipitant du haut des Alpes, il traverse le lac Lemanus, et emmène la Saône paresseuse, ainsi que l'Isara et la Druentia, non moins rapides que lui."
Il est vrai que la présence grecque près du delta du Rhône, dés la plus haute antiquité (VIIIe-VIIe s. av. J.-C.) ne fait plus guère de doutes, néanmoins, une autre explication paraît plus réaliste. Tout d'abord, notons que Denys le Périégète (Description de la terre habitée, V, 289), reprenant Philostephanos de Cyrène (milieu du IIIe s. av. J.-C.) estime quant à lui que l'hydronyme Rhodanos serait d'origine indigène, les Grecs le nommant de leur côté Eridanos.
Denys le périégète, Description de la terre habitée, V, 289 : "Philostéphane dit que de son temps l'Éridanos a été nommé par les indigènes le Rhodanos. Quelques-uns pensent que les deux ne font qu'un; c'est l'avis d'Apollonius [...] et ils franchirent le cours profond du Rhodanos, qui se jette dans l'Eridanos, où se mêlent leurs eaux."
On notera ensuite dans le célèbre Glossaire d'Endlicher (9-11) un passage évoquant une origine belle et bien gauloise à cet hydronyme. Décomposé en *(h)ro-dan(us), avec *(h)ro- signifiant "trop / beaucoup", associé à *-dano "magistrat / curateur", Rhodanus signifierait le "violent magistrat".
Glossaire d'Endlicher (9-11) :roth violentum,[nam rho nimium] dan et in Gallico et in Hebraeo iudicem : ideo Hrodanus iudex violentus
Le tracé du fleuve
Le Rhodanus prend sa source dans les Alpes suisses, au Glacier du Rhône, au niveau du Massif de l'Adulas (Massif du Saint-Gothard). Il s'écoule par la suite en direction de l'Ouest vers le Lemannus / Lemena (Lac Léman). Au-delà de ce lac, son cours devient sinueux. Il reçoit alors les eaux de nombreux affluents, les Principaux étant la Sauconna (Saône), l'Isara (Isère) et le Druentias (Durance). Il se jette en Mer Méditerranée, formant un vaste delta à plusieurs bouches. Deux de ces bouches restent fonctionnelles aujourd'hui. Dans l'antiquité, il semble qu'il ait pu y en avoir entre deux et sept.
Pline, Histoire Naturelle, III, 5, 3 : "Ses deux petites bouches sont appelées Libiques, dont l'une porte le nom d'Espagnole, et l'autre de Métapine ; la troisième et la plus grande se nomme Massaliotique. Il est des auteurs qui disent qu'il y eut à l'embouchure du Rhône une ville Héraclée."
Strabon, Géographie, IV, 1, 8 : "Au sujet des bouches du Rhône, Polybe censure Timée et prétend que ce fleuve n'a pas cinq bouches, mais deux : Artémidore dit qu'il en a trois. Plus tard Marius, voyant les bouches du fleuve s'aveugler par suite des atterrissements, et l'entrée en devenir difficile, creusa un nouveau canal qui, reçût la plus grande partie des eaux du Rhône, et le concéda aux Massaliotes comme prix de leur valeur dans la guerre contre les Ambrons et les Toygénes [?]Au-dessus des embouchures du Rhône se trouve un étang marin, qu'on appelle Stomalimnè, qui fournit en grande quantité des huîtres et d'autres mets excellents. Quelques-uns ont compté cet étang parmi les bouches du Rhône ; ce. sont ceux-là surtout qui affirment que le fleuve a sept bouches, mais ils se trompent en ceci comme en cela ; car il y a une montagne qui sépare le fleuve de l'étang."
Pomponius Mela, Description de la Terre, II, 72 :"Le Rhône commence à peu de distance des sources de l'Ister et du Rhin ; il se jette ensuite dans le lac Léman, le traverse avec son impétuosité ordinaire, sans mêler ses eaux à celles du lac, et en sort aussi gros qu'il y était entré. De là il roule vers l'occident, et sépare les deux régions de la Gaule jusqu'à une certaine distance ; puis, se tournant vers le sud, il entre dans la Narbonnaise, où, déjà considérable, il se grossit encore du tribut de plusieurs rivières, et va se jeter dans la mer, entre le pays des Volces et celui des Cavares."