Anonyme - Le Testament du Lingon (Testamentum Lingonis) - Document testamentaire gallo-romain tardif d'un caractère exceptionnel, conservé uniquement à travers une copie médiévale. Il expose des instructions très détaillées concernant la sépulture, les rites commémoratifs, l'entretien de la tombe, la gestion de l'héritage et l'organisation post-mortem. Ce texte offre un témoignage rare et précieux sur les mentalités, le droit privé et les pratiques religieuses dans la Gaule romaine. L'inscription originale est aujourd'hui perdue. La copie connue a été intégrée dans un manuscrit médiéval plus tard conservé à la bibliothèque universitaire de Bâle (Suisse).
Le Testament du Lingon - une forme très atypique
Bien qu'il soit souvent présenté comme la reproduction d'une inscription funéraire, le Testament du Lingon se distingue fortement des épitaphes antiques classiques, généralement brèves. Contrairement à celles-ci, ce texte adopte une forme développée, proche d'un véritable testament, et comprend des directives précises relatives aux rites posthumes ainsi qu'à l'assignation de biens. Une telle ampleur est exceptionnelle pour une inscription funéraire romaine ou gallo-romaine.
Le Testament du Lingon mentionne un "domaine de Litavis" (Litavicrarus dans le texte latin), indiquant que la tombe, les rites posthumes et l'entretien du monument relèvent de cette divinité. Cette formule montre que Litavis agissait comme protectrice du tombeau ou de la terre funéraire, assurant la stabilité du lieu et la pérennité des rites.
Cette attestation prend une importance particulière si on la rapproche d'autres cultes régionaux. En effet, chez les Lingons, la déesse Litavis est souvent associée au dieu Cicolluis dans les inscriptions votives, formant vraisemblablement un couple divin protecteur. Cicolluis est généralement interprété comme une divinité guerrière ou tutélaire (souvent rapprochée de Mars), tandis que Litavis semble liée à la terre, au territoire ou à la stabilité (*litavi- : "large, vaste, étendu"). Le Testament montre ainsi que cette divinité n'était pas uniquement invoquée dans un cadre public ou votif, mais jouait également un rôle réel dans la religion domestique et funéraire, au moins chez les Lingons.